La femelle moustique agresse entre autres l’humain et se gorge de sang destiné à son cycle de reproduction. Lorsqu’elle pique, elle régurgite, dans sa salive, un grand nombre de substances : histamine, lysozymes, glucosidase, antiagrégant plaquettaire, vasodilatateur et allergènes.
Le moustique femelle sélectionne ses proies en fonction de l’influence de différents stimuli olfactifs, puis visuel et thermique. Ce culicidé est capable de détecter le dioxyde de carbone exhalé par l’humain à plus de 10 mètres, et jusqu’à 70 mètres pour des gabarits plus importants comme les ruminants. L’humain devient visible pour le moustique à une distance évaluée entre 5 et 15 mètres. L’activité visuelle est accrue si la cible est vêtue de couleur sombre. À une distance d’un mètre, c’est la chaleur et l’hypersudation qui deviennent des éléments attractifs. D’autres éléments semblent également rentrer en ligne de compte : cycle menstruel, groupe sanguin, etc.
Réactions cutanées classiques
Une piqûre de moustique commun (Culex pipiens) entraîne dans les 15 minutes qui suivent l’apparition d’une papule érythémateuse et prurigineuse d’environ 2 à 5 cm de diamètre, qui persiste près de 24 à 48 heures. Le traitement est symptomatique avec antihistaminique et lavage de la zone à l’eau et au savon sans parfum. L’application d’un antiseptique est discutée au cas par cas en raison des lésions de grattage. Mains et ongles coupés et propres restent des conseils de bon sens !
Le déclenchement des symptômes peut être plus tardif : quelques heures après la piqûre, apparaît une réaction d’un diamètre plus important, de 12 à 15 cm. Le traitement de cette réaction locale étendue durant plusieurs jours +/- œdème repose sur des antihistaminiques 2e génération +/- corticoïdes locaux.
La vigilance doit -être accrue avec un traitement adéquat (antibiothérapie) lorsqu’apparaissent des signes de lymphangite.
Pour les enfants surtout en cas d’atopie, la réaction locale est souvent majorée en raison de l’absence d’une tolérance naturelle qui s’acquière au fur et à mesure des années. En effet, le stade I correspond à la première piqûre de moustique. Les attaques consécutives entraînent ensuite différents stades évolutifs des lésions. Ainsi la désensibilisation naturelle à la salive des moustiques s’installe avec une exposition à long terme.
Quand la piqûre est source de réaction systémique
Le syndrome de Skeeter a été décrit pour la première fois en 1999. Il atteint surtout les enfants et les personnes immunodéprimées.
Rare en France, il a été décrit en Italie et surtout au Mexique. Il s’agit de l’apparition rapide (en quelques heures) d’un érythème prurigineux et d’une chaleur locale de diamètre important associé à un œdème.
Dans sa forme sévère, une hyperthermie, des vomissements, des troubles respiratoires sont possibles. Les manifestations régressent en 3 à 10 jours.
L’amélioration spontanée est plus rapide sous traitement antihistaminique et dermocorticoïdes.
Lorsque la réaction est localisée sur le visage, elle peut être confondue à tort avec une cellulite de la face, dont le délai d’apparition est plus lent.
Allergie IgE-médiée
À ce jour, seuls des allergènes de différents moustiques tropicaux sont identifiés et répertoriés au niveau international :
- Pour le moustique Aedes aegypti : 11 allergènes débutant par Aeda dont 8 d’origine salivaire. Les trois autres sont retrouvés dans la structure de l’insecte. Aed a10 est une tropomyosine pouvant expliquer des allergies croisées avec la tropomyosine Der p10 de l’acarien de type Dermatophagoides pteronyssinus . L’isolation de ces allergènes dans le squelette du moustique peut expliquer des sensibilisations par inhalation de débris, de moustiques morts, présents dans la poussière domestique. En Inde, 47 % de la population souffrant d’asthme et de rhinite est sensibilisée à ces allergènes. En Guadeloupe, ce chiffre atteint les 65 %.
- Pour le moustique tigre (Aedes albopictus), deux allergènes sont identifiés dans la salive : Aed al2 et Aed al3
- Pour Culex quinquefasciatus : Cul q2 et Cul q3
- Pour Anopheles dirus : Ano d2.
Les réactions allergiques de mécanisme IgE-médié vont de l’urticaire, géante, et l’angioœdème jusqu’à la réaction anaphylactique. Pour l’instant, 3 000 cas d’anaphylaxie aux piqûres de moustique sont répertoriés dans le monde. La recherche d’une mastocytose sous-jacente doit alors systématiquement faire partie du bilan.
Pour le bilan allergologique, hormis le dosage des IgE spécifiques anti-Aedes communis (code i71), aucun autre test biologique ou cutané n’est disponible en pratique courante. Les extraits de corps totaux ne sont plus disponibles en raison de leur faible sensibilité. C’est également pour cette raison qu’aucune immunothérapie allergénique n’est proposée.
En dehors des mesures de protection, un traitement préventif par antihistaminiques de seconde génération permet la diminution des réactions cutanées. L’association de levocétirizine et rupatadine au quotidien est préconisée par certaines études. D’autres essais tendent à prouver que l’ébastine et la cétirizine seraient plus efficaces sur le prurit que la loratadine.
En prévention de la réaction anaphylactique, une publication relate le bénéfice d’un traitement prophylactique (hors AMM) par injection d’omalizumab 300 mg en sous-cutané toutes les 4 semaines pendant 3 mois chez un patient italien.
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