Eaux contaminées
La fermeture temporaire, au début de l’été, de quelques plages bretonnes, méditerranéennes ou basques le rappelle : près des côtes, il arrive que la mer soit contaminée par des bactéries d’origine fécale (Escherichia coli, entérocoques, etc.), surtout après de fortes intempéries.
Néanmoins, leurs concentrations restent inférieures aux seuils à risque sur 97,6 % des plages de l’Union européenne (96,9 % en France). Il y a donc peu de risque d’attraper une infection gastro-intestinale en nageant, si on respecte les arrêtés locaux d’interdiction de baignade. Cependant, des conjonctivites et otites sont possibles. Et attention : en cas de blessure, même petite, après une glissade sur un rocher par exemple, il faut désinfecter. Un rinçage à l’eau de mer ne suffit pas.
Pathogènes cachés dans le sable
Les enfants qui creusent le sable peuvent développer un impétigo, ou ingérer un parasite intestinal. En effet, des vers véhiculés par les excréments d’animaux (de chiens notamment) peuvent se trouver dans le sable, donc sous les ongles.
Les ascaris , parasites cosmopolites (bien que plus fréquents en zone tropicale) sont responsables d’infections le plus souvent bénignes, se manifestant par douleurs abdominales, vomissements, diarrhées. En cas d’infestation importante, des perturbations neuropsychiques (réaction méningée ou convulsions) et de complications sont possibles, liées notamment à la migration erratique des parasites vers d’autres organes.
Les larves d’ascaris de chien (Toxocara canis) ou de chat (Toxocara cati) peuvent aussi provoquer une toxocarose (ou larva migrans viscérale). Les chiots de moins de 3 mois, qui émettent de nombreux œufs dans leurs excréments, sont les principaux vecteurs. En Europe, le taux de séroprévalence humaine varie de 2 à 8 % en ville et atteint jusqu’à 40 % dans les campagnes. La toxocarose peut rester asymptomatique et être découverte fortuitement (hyperéosinophilie sanguine lors d’un bilan de santé) ou provoquer divers signes cliniques peu évocateurs (asthénie, prurit, douleurs abdominales, dyspnée), ou plus prononcés (fièvre, asthénie importante, œdèmes, urticaire, troubles digestifs et pulmonaires). L’atteinte neurologique ou oculaire (baisse unilatérale de la vision) est plus rare. L’examen clinique peut retrouver une éruption maculopétéchiale et une hépatomégalie ferme et indolore. Le diagnostic et le traitement, fondé sur les antiparasitaires, sont précisés ici.
Pour prévenir ces infections, un geste simple : se laver les mains après la plage.
Intoxications alimentaires graves
Bien qu’il ne soit pas directement lié à la baignade, un autre risque concerne les restaurants à la plage : celui d’intoxications alimentaires. Dans les tropiques, de plus en plus de poissons carnivores sont touchés par une toxine, la ciguatoxine : transmise par une algue, elle ne disparaît pas à la cuisson ou la congélation. Malgré les alertes sanitaires, certains restaurants servent les espèces concernées, y compris en ville. La ciguatera se manifeste par des fortes démangeaisons, des signes digestifs, cardiologiques, voire par des atteintes nerveuses, hallucinations et/ou paralysies musculaires. Une hospitalisation en urgence est parfois nécessaire. Certains patients se plaignent de fatigues chroniques plusieurs mois après leur retour.
Dans le golfe du Mexique, il faut redouter le Vibrio vulnificus, un cousin du choléra qui peut infecter les huîtres, palourdes, crabes.
Si l’on marche pieds nus sur le sable…
La larva migrans cutanée est due à la pénétration sous la peau d’une larve d’ankylostome présente dans les sols ou sables chauds et humides (véhiculé par les excréments surtout de chiens et chats). C’est la plus fréquente des dermatoses tropicales touchant les voyageurs (endémique en Amérique intertropicale, Afrique subsaharienne, Sud-Est asiatique, Antilles). Quelques cas autochtones en Europe ont été recensés ces dernières années, y compris en France (en Bretagne notamment). Le diagnostic est clinique : sillon serpigineux, érythémateux, mobile et extrêmement prurigineux (fig. 1). Le grattage peut entraîner une eczématisation avec une surinfection, et une impétiginisation. Le traitement repose sur l’ivermectine per os à la dose de 200 mg/kg en une prise, éventuellement répétée si les troubles persistent.
Il n’est pas rare qu’un touriste développe une tungose (ou sarcopsyllose) en marchant pied-nus sur le sable ou en s’y allongeant directement. Cette parasitose cutanée est causée par l’infestation par la puce de sable femelle Tunga penetrans (et T. trimamillata dans certaines zones) ou puce chique, qui pénètre dans la peau, surtout au niveau du sillon péri-unguéal ou sous-unguéal, et y pond ses œufs. Endémique en Afrique subsaharienne, dans l’océan Indien (Madagascar, Seychelles), au Pakistan et en Amérique intertropicale, l’infestation se manifeste par une tuméfaction enchâssée dans le derme (fig. 2), de couleur blanchâtre, centrée par un point noir (correspondant à l’orifice de ponte), souvent entourée d’une réaction érythémateuse inflammatoire. Pendant la phase aiguë, érythème, œdème, desquamation, douleur et démangeaisons sont constants. Le prurit, induisant le grattage, peut favoriser une surinfection bactérienne. Les abcès sont fréquents. Il faut extraire le parasite et/ou cureter l’abcès.
Moins fréquente, et typiquement tropicale, une autre parasitose à connaître est l’anguillulose, causée par les larves d’un nématode qui pénètrent dans la peau puis migrent dans les intestins. Elle peut se manifester par une éruption urticarienne serpigineuse (larva currens ), une toux, une dyspnée, des symptômes gastro-intestinaux (douleurs et selles molles), mais elle est asymptomatique dans 50 % de cas. Il est surtout important de la dépister (par examens des selles ou tests sérologiques), chez les patients – voyageurs ou migrants – provenant des zones d’endémie lorsqu’ils vont entamer un traitement immunosuppresseur (corticostéroïdes notamment), même de courte durée : toute immunosuppression peut engendrer un syndrome d’hyperinfestation parfois gravissime (sepsis, syndrome de détresse respiratoire aiguë).
Le traitement repose sur l’ivermectine. Les cas sévères, chez le sujet immunodéprimé, sont à adresser au spécialiste.
Pour éviter ces infections, on recommande d’utiliser tongs et transats, surtout aux tropiques !
Bourée P, Dembele Y, Focham F, et al. Des ascaris dans les voies biliaires. Rev Prat 2019;69(8);876.
Infectiologie.com. Quels risques infectieux à la plage ? Juillet 2023.