Lampadaires, panneaux publicitaires, bureaux constamment allumés, écrans… L’environnement urbain moderne pâtit d’une forte exposition nocturne à la lumière artificielle. Quelles conséquences sur la santé ? Quelles solutions ?

Si l’exposition nocturne à la lumière artificielle part d’une bonne intention – augmenter le sentiment de sécurité, la facilité à se repérer dans le noir ou encore développer l’économie nocturne urbaine –, un article paru dans Science fait le point sur les effets néfastes pour la santé.

Quels effets ?

Notre rétine reçoit les stimuli lumineux par des cônes photorécepteurs, qui permettent la vision, mais également par des cellules ganglionnaires photosensibles, impliqués dans la régulation de nombreux comportements : le sommeil et la sécrétion de mélatonine, le maintien du rythme circadien dans notre organisme, ou encore nos performances cognitives. Différentes études de laboratoire chez l’homme et l’animal démontrent que ces dernières cellules, par leur activation anormale via l’illumination nocturne, sont susceptibles de désynchroniser l’horloge interne, elle-même responsable de perturbations du sommeil, de troubles de l’humeur ou cognitifs (troubles de la mémoire, diminution de la vigilance…).

Ainsi, des études ont montré que les travailleurs de nuit ont des rythmes circadiens déréglés et sont plus à risque de développer certaines pathologies : cancers (du sein par exemple), obésité, hypertension, dépression. L’effet de la lumière artificielle extérieure sur les citadins est plus difficile à quantifier, mais certaines études épidémiologiques suggèrent un risque accru de cancers ou de maladies cardiovasculaires chez les urbains exposés à la pollution lumineuse extérieure. Par ailleurs, résider dans un environnement urbain plus pollué par la lumière nocturne a été corrélé avec une infection par le Covid plus sévère et plus longue.

L’exposition des adolescents, grands utilisateurs des écrans, y compris tard le soir, pose aussi question, générant inévitablement une désynchronisation de l’horloge interne et une dette de sommeil.

Autre problème : les nouvelles sources lumineuses artificielles étant très performantes (elles comportent une forte émission de lumière bleue dans la bande 380-500 nm, proche du rayonnement ultraviolet), des arguments expérimentaux suggèrent qu’elles pourraient être phototoxiques pour la rétine, en particulier la macula, et être ainsi un facteur de risque de la DMLA (aucune étude prospective n’a cependant montré une association entre une exposition cumulée et des pathologies oculaires).

Quelles pistes d’amélioration ?

Les auteurs recommandent d’approfondir les études sur la pollution visuelle urbaine afin de la réguler par la législation. Cependant, de telles études devront davantage individualiser l’effet de la pollution nocturne visuelle parmi d’autres facteurs environnementaux à risque. Ainsi, cette tâche s’annonce herculéenne, d’autant plus que la variabilité du seuil de luminosité nocturne à partir duquel il y a suppression de la synthèse de mélatonine varie par exemple quasiment du simple au centuple selon les individus.

Pour en savoir plus
Zielinska-Dabkowska KM, Schernhammer ES, Hanifin JP, et al. Reducing nighttime light exposure in the urban environment to benefit human health and society.  Science 2023;380(6650):1130-5.
Dufier JL, Touitou. Pollution lumineuse.  Rev Prat 2022;72(2);141-6.
Torriglia A, Behar-Cohen F. LED : dangereux pour la santé ?  Rev Prat Med Gen 2020;34(1035);122-3.

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