Le variant omicron est rapidement devenu la souche dominante du SARS-CoV-2 dans le monde, supplantant notamment son principal rival : le variant delta. Sa haute transmissibilité est-elle due à une production de particules virales accrue par les personnes infectées ? Deux travaux rapportés cette semaine dans Nature montrent plutôt le contraire…
Le variant omicron du SARS-CoV-2 – dont l’émergence a été initialement signalée par les autorités sud-africaines en novembre 2021 – s’est propagé dans le monde à une vitesse spectaculaire. En quelques semaines, il est devenu le variant majoritaire, supplantant delta qui avait à son tour, dans l’espace de 6 mois, remplacé les souches des premières vagues sur tous les continents.
Le taux de transmissibilité (R0) du variant delta est estimé entre 5 et 6, en comparaison d’un R0 initial de 2,5-3 pour les virus des premières vagues. Sa forte contagiosité a été corrélée à de très forts niveaux de charge virale (quantité de virus produite par une personne infectée), par rapport aux souches précédentes. La charge virale est généralement estimée via la quantification de l’ARN viral dans les prélèvements nasopharyngés des personnes infectées (par RT-PCR donc).
Par extrapolation, la progression rapide d’omicron pourrait être expliquée par des niveaux de charge virale encore supérieurs. Or les résultats préliminaires de deux études parues en preprint semblent prouver plutôt le contraire !
La première étude a été réalisée par une équipe de virologues d’Harvard : les chercheurs se sont appuyés sur les données de la National Basketball Association, la ligue de basketball professionnel américaine. Cette dernière effectue fréquemment des tests Covid sur les joueurs et le personnel administratif des clubs américains. En comparant les résultats des tests PCR effectués sur écouvillons nasopharyngés, ils ont découvert de façon surprenante que les personnes infectées par delta avaient des charges virales plus élevées que celles infectées par omicron.
Dans la deuxième étude, B. Meyer et collaborateurs ont poussé l’analyse plus loin : les chercheurs ne se sont pas contentés d’évaluer la charge virale dans les prélèvements nasopharyngés, ils ont aussi quantifié le nombre de particules virales à partir de 150 sujets vaccinés infectés soit par omicron, soit par delta. Les résultats montrent que le nombre de particules virales était comparable dans les deux groupes de patients ; de plus, la moitié des personnes infectées (dans les deux groupes) avaient, 5 jours après le test initial positif, un nombre de particules virales suffisamment élevée pour qu’elles soient potentiellement capables de contaminer une autre personne à proximité.
Les résultats de ces études ont deux implications.
Tout d’abord, d’un point de vue sanitaire, l’interruption de l’isolement des personnes infectées 5 jours après un test positif initial, telle que préconisée par les autorités de certains pays comme les États-Unis, est potentiellement associé à un risque de dissémination virale. La nécessité d’un test négatif pour mettre fin à l’isolement, comme recommandé aujourd’hui en France, a donc tout son intérêt.
En deuxième lieu, si l’hypertransmissibilité d’omicron ne provient pas de la libération de grandes quantités de virus par les personnes infectées, sa propagation fulgurante est plus probablement liée à sa capacité à échapper à l’immunité induite par la vaccination ou une infection passée.
Cinzia Nobile, La Revue du Praticien
Pour en savoir plus :
Kozlov M. How does Omicron spread so fast? A high viral load isn’t the answer. Nature 20 janvier 2022.
Hay JA, Kissler SM, Fauver JR, et al. Viral dynamics and duration of PCR positivity of the SARS-CoV-2 Omicron variant. medRxiv 14 janvier 2022.
Puhach O, Adea K, Hulo N. Infectious viral load in unvaccinated and vaccinated patients infected with SARS-CoV-2 WT, Delta and Omicron. medRxiv 18 janvier 2022.