Les enfants nés prématurément, ne bénéficiant que d’un faible taux d’IgG maternelles (transmises au 3e trimestre de la grossesse), sont particulièrement vulnérables aux infections. Le « calendrier simplifié » recommandé en France pour les nouveau-nés à terme doit donc être adapté. Les erreurs à ne pas commettre.
Un enfant est considéré prématuré s’il naît avant 8 mois et demi de grossesse, soit 37 semaines d’aménorrhée (SA). En France, 7 à 8 % des naissances sont prématurées.
Compétences immunitaires de la prématurité
Les enfants nés prématurément ne bénéficient que d’un faible taux d’anticorps d’origine maternelle (IgG) puisque ceux-ci sont majoritairement transmis au 3e trimestre de la grossesse. Les anticorps maternels diminuent ensuite de moitié toutes les 3 semaines après la naissance. Par ailleurs, le nouveau-né prématuré a une compétence immunitaire inférieure à celle du nouveau-né à terme, et ce d’autant plus que la prématurité est grande.1
Pour ces raisons, ces enfants sont particulièrement vulnérables aux infections virales et bactériennes, plus fréquentes et plus graves. Or certaines peuvent être prévenues par la vaccination (infections invasives à pneumocoque, à Haemophilus influenzae b, coqueluche, grippe…).
La maturation du système immunitaire après la naissance dépend essentiellement de l’exposition postnatale à la flore microbienne de l’environnement. Cette maturation dépend de l’âge chronologique et non de l’âge corrigé par rapport au terme. Une réponse vaccinale est donc possible dès l’âge de 6 à 8 semaines, quel que soit le degré initial de prématurité.
Schéma de vaccination du nouveau-né prématuré2
Les recommandations spécifiques pour les enfants nés prématurément concernent la prévention des infections invasives à pneumocoques, et la prévention des infections par le virus de l’hépatite B chez le nouveau-né prématuré dont la mère est positive pour l’antigène HBs (Ag HBs).
La vaccination par le vaccin antipneumococcique conjugué 13-valent doit suivre le schéma suivant : une dose à l’âge chronologique de 2 mois (8 semaines), 3 mois et 4 mois avec un rappel à l’âge de 11 mois, soit une schéma « 3+1 » (tableau 1).
Tableau 1. Schéma de vaccination du prématuré hors nouveau-nés de mère positive pour l’Ag HBs²
Les enfants nés de mère porteuse de l’hépatite B (Ag HBs+) doivent impérativement être vaccinés dès la naissance selon un schéma à trois doses : à la naissance, 1 mois et 6 mois. La première dose est associée à l’administration d’immunoglobulines anti-HBs (tableau 2).
Tableau 2. Tableau des vaccinations des prématurés nés de mères ayant un antigène HBs positif, au cours de la première année de vie.3
En 2014, Infovac et le Groupe de pathologie infectieuse pédiatrique de la Société française de pédiatrie recommandent un schéma 3+1 pour la vaccination hexavalente DTCPHibHepB avec une dose supplémentaire à 3 mois chez les enfants prématurés < 33 semaines, du fait d’une moins bonne réponse immunitaire chez eux.4
Dans son avis du 22 mai 2015, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) estime qu’il n’existe pas à ce jour de données épidémiologiques justifiant de recommander un tel schéma vaccinal renforcé pour l’immunisation des nourrissons nés prématurés contre la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, la coqueluche et les infections à Haemophilus influenzae b.5
Quoiqu’il en soit, il est fondamental de débuter la vaccination de routine à 2 mois d’âge chronologique quel que soit le degré de prématurité.
Modalités pratiques spécifiques
Tolérance
Les propositions admises au niveau international sont de pratiquer sous monitoring cardiorespiratoire pendant 48 heures la première vaccination des enfants prématurés de moins de 33 SA et/ou d’un poids inférieur à 1 500 g qui sont encore hospitalisés à 8 semaines d’âge chronologique.
Si une apnée, une bradycardie et/ou une désaturation survient lors de cette première injection, il est préconisé de réaliser également l’injection suivante sous monitoring et surveillance en milieu hospitalier (risque de récidive évalué à 20 %).
En l’absence d’effets indésirables lors de la première injection, la vaccination peut être poursuivie en ambulatoire dans les mêmes conditions que chez l’enfant à terme.
Les prématurés dont l’état est suffisamment stable pour permettre un retour à domicile avant l’âge de 8 semaines ne nécessitent pas de précautions particulières.
Acte vaccinal
Comme chez les nourrissons nés à terme, l’injection intramusculaire se fait au niveau de la face antérolatérale de cuisse, sans purger l’aiguille et sans recherche de reflux sanguin. Seules la succion sucrée non nutritive et la mise au sein ont fait la preuve de leur efficacité dans la prévention de la douleur. Enfin, il est recommandé d’administrer d’abord le vaccin le moins douloureux chez le petit enfant.
Vaccination de l’entourage
Le site Vaccination info service insiste sur l’importance de la stratégie du cocooning autour de l’enfant né prématurément3 :
« Au-delà des règles d’hygiène de base, certaines vaccinations des parents, des grands-parents, de la fratrie ainsi que des personnels ayant l’enfant en garde, effectuées avant ou juste après la naissance, permettent de diminuer le risque d’exposition. Il est donc nécessaire de vérifier et, si besoin, de mettre à jour les vaccinations de l’entourage particulièrement pour la coqueluche, en raison du risque élevé de complications graves dues à cette maladie chez les enfants nés prématurément.
La grippe représente également un risque de réhospitalisation pour les prématurés et un risque de complications sévères pour ceux ayant des séquelles pulmonaires. La vaccination n’étant recommandée qu’à partir de 6 mois, l’entourage de ces enfants doit être vacciné contre la grippe saisonnière pendant les deux premiers hivers.
La ou les personne(s) ayant la garde de l’enfant, comme le personnel de santé qui s’occupe de ces enfants, doivent également bénéficier d’une mise à jour régulière de leurs vaccinations.
De plus, les jeunes enfants de la fratrie du prématuré sont la principale source de transmission des bactéries encapsulées (Haemophilus influenzae b et pneumocoque), tandis que les adolescents sont à risque de transmission du méningocoque C. Les enfants de la fratrie de moins de 2 ans doivent être à jour de leur vaccination contre le pneumocoque, ceux de moins de 5 ans être à jour de leur vaccination contre l’Haemophilus influenzae b et les adolescents et jeunes adultes jusqu’à 24 ans doivent être à jour de leur vaccination contre le méningocoque C. »
Il semble indispensable d’ajouter, en contexte actuel, la nécessité de conseiller la vaccination contre le SARS-CoV-2 à l’entourage de l’enfant né prématurément.
Dr Laëtitia Duché, médecin de PMI, 75017 Paris
Références :
1. Guével-Delarue K. L’hésitation vaccinale, les mots pour expliquer. Presses de l’EHESP, mai 2020.
2. Ministère des solidarités et de la santé. Calendrier des vaccinations et recommandations vaccinales. Juillet 2021.
3. Vaccination info service. Recommandations vaccinales spécifiques – Prématurés. 2021.
4. Gaudelus J, Pinquier D, Romain O, et al. Le nouveau calendrier vaccinal est-il adapté à l’ancien prématuré ?Arch Pedatr 2014;21(9):1062-70.
5. HCSP. Recommandations vaccinales pour les enfants nés prématurément. Mai 2015.