Après avoir récemment auditionné les sociétés savantes de gynécologie, l’ANSM affine ses recommandations pour réduire le risque de méningiome associé à certains progestatifs, émises à la suite d’une étude de pharmaco-épidémiologie parue en juin 2023.

Entre 2019 et 2020, des études épidémiologiques successives d’Épi-phare ont démontré un sur-risque de méningiome, qui augmente avec la dose cumulée reçue, pour trois progestatifs (Androcur, Lutényl, Lutéran et génériques). Ces derniers ont donc fait l’objet d’un changement des règles de prescription et renouvellement.

Début 2023, ces précautions ont été élargies à d’autres progestatifs (médrogestone, progestérone, dydrogestérone et diénogest) après que certains cas de méningiome eurent été rapportés chez des femmes prenant ces traitements. Cet élargissement des restrictions a été critiqué par les sociétés savantes de gynécologie, qui ont pointé l’absence de preuves formelles et le risque de laisser des patientes sans aucune ressource thérapeutique dans plusieurs situations cliniques. Une étude de d’Épi-phare parue en juin 2023 a permis de trancher : elle a montré que l’utilisation prolongée de promégestone (Surgestone 0,5 mg), de médrogestone (Colprone 5 mg) ou d’acétate de médroxyprogestérone (Depo Provera 150 mg/3 mL) est associée à un sur-risque de méningiome ; en revanche, elle n’a pas trouvé de sur-risque de méningiome avec les DIU au lévonorgestrel 13,5 et 52 mg (Mirena, Donasert, Kyleena et Jaydess), l’exposition à la progestérone (par voie orale, intravaginale et cutanée ; Utrogestan et génériques) ni à la dydrogestérone (Duphaston, Climaston).

Réuni en octobre et après avoir auditionné les sociétés savantes de gynécologie, le comité scientifique temporaire (CST) a donc confirmé que les mesures de réduction de ce risque en cas d’utilisation de médrogestone (Colprone) et d’acétate de médroxyprogestérone (Depo Provera) doivent être similaires aux mesures adoptées pour l’acétate de chlormadinone (Lutéran et génériques) et de nomégestrol (Lutényl et génériques). S’agissant de la promégestone (Surgestone), dont la commercialisation a cessé depuis 2020, des mesures spécifiques concernent les femmes traitées avec ce médicament.

Pour les autres progestatifs utilisés seuls (diénogest [Visanne et génériques], drospirénone [Slinda] et désogestrel [Cérazette et génériques]), cette étude n’a pas pu étudier le risque de méningiome. Il ne peut donc pas être exclu à ce jour. Des études complémentaires sont nécessaires, notamment au regard de leur utilisation croissante.

Recommandations d’utilisation

Médrogestone (Colprone)

Elle ne doit pas être utilisée en première intention dans les indications suivantes :

  • ménopause, cycle artificiel en association avec un œstrogène ;
  • irrégularités du cycle ;
  • syndrome prémenstruel (dysménorrhées essentielles) ;
  • douleur mammaire (mastodynie) non sévère.

En revanche, sa prescription peut rester justifiée en première intention pour les indications suivantes :

  • saignements liés au fibrome ;
  • endométriose ;
  • douleur mammaire (mastodynie) sévère.

Acétate de médroxyprogestérone (Depo Provera)

Il doit être utilisé lorsqu’il n’est pas possible d’utiliser d’autres méthodes contraceptives, conformément à son AMM.

Sa prescription peut rester justifiée dans certains cas très particuliers, tels que non-respect de l’observance, l’intolérance à l’implant sous cutané ou au DIU.

Recommandations de suivi par imagerie

Pour la médrogestone et l’acétate de médroxyprogestérone, une surveillance par imagerie cérébrale est désormais recommandée selon les mêmes modalités que pour l’acétate de chlormadinone ou de nomégestrol : une infographie synthétique de ces consignes peut être téléchargée sur ce lien.

Un examen par IRM doit être également réalisé quel que soit l’âge de la patiente dans les cas suivants :

  • à tout moment pendant ou après le traitement en cas de signes évocateurs de méningiomes ;
  • à l’instauration d’un traitement progestatif par l’un des 5 progestatifs à risque (acétate de cyprotérone, acétate de chlormadinone, acétate de nomégestrol, médrogestone, acétate de médroxyprogestérone) ou par un progestatif avec un risque de méningiome non connu à ce jour (diénogest, drospirénone et désogestrel), si la patiente a été traitée plus d’un an par médrogestone ou médroxyprogestérone (voir également recommandations générales sur les progestatifs ci-dessous).

Cas particulier de la promégestone (Surgestone)

Ce progestatif n’est plus commercialisé depuis 2020. Une IRM cérébrale doit être réalisée :

  • si la patiente a été traitée plus d’un an et qu’elle a ensuite été traitée par un des 5 progestatifs à risque cités ci-dessus ou par un progestatif avec un risque de méningiome non connu à ce jour ;
  • si la patiente a des signes évocateurs d’un méningiome, même à distance de l’arrêt de son traitement par promégestone, une IRM cérébrale doit être réalisée.

Recommandations générales d’utilisation des progestatifs et de changement de traitement entre progestatifs

En cas d’antécédent de méningiome ou de méningiome existant, la mise en place d’un traitement par l’un des 5 progestatifs à risque de méningiome est contre-indiquée. Pour les autres progestatifs (seuls ou en association dans un contraceptif ou un traitement hormonal substitutif de la ménopause) il est recommandé de ne pas les utiliser. Dans des situations exceptionnelles, la prescription est discutée en réunion de concertation pluridisciplinaire.

La prescription d’un nouveau progestatif en relais d’un traitement antérieur par l’un des 5 progestatifs à risque de méningiome n’exclut pas le risque de méningiome, sans que l’on puisse actuellement le déterminer. L’ANSM recommande donc :

  • réalisation d’une IRM cérébrale à l’instauration du nouveau traitement progestatif en cas d’utilisation supérieure à un an d’un de ces 5 progestatifs et de changement de traitement vers un progestatif à risque de méningiome ou dont le risque n’est pas connu ;
  • réalisation d’une IRM cérébrale en présence de signes évocateurs d’un méningiome, en cas de changement de traitement pour un progestatif non associé à un risque de méningiome (DIU au lévonorgestrel, progestérone par voie orale, vaginale ou cutanée, dydrogestérone).

Le traitement doit toujours être prescrit à la dose minimale efficace et pendant une durée d’utilisation la plus courte possible.

Réévaluer chaque année l’intérêt de poursuivre le traitement, notamment aux alentours de la ménopause car le risque de méningiome augmente fortement avec l’âge.

Une IRM cérébrale doit être réalisée en cas de signes évocateurs d’un méningiome.

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