Ces dernières années, les propriétés antidépressives des psychédéliques suscitent un fort intérêt. La psilocybine, principe actif de certains champignons hallucinogènes, a fait ses preuves dans un essai randomisé qui vient de paraître dans le JAMA

Cette étude de phase II a été menée entre décembre 2019 et juin 2022 dans 11 centres aux États-Unis. Les 104 participants recrutés (âge moyen : 41 ans ; 50 % de femmes) avaient un diagnostic de dépression caractérisée selon les critères du DSM-V, depuis au moins 60 jours, avec des symptômes modérés à sévères. Les personnes ayant des antécédents psychotiques ou maniaques, celles ayant un trouble de l’usage de substances psychoactives et celles ayant des idéations suicidaires ont été exclues de l’étude.

Les participants ont été randomisés pour recevoir soit une dose unique de psilocybine 25 mg (N = 51), soit une dose de placebo (100 mg de niacine ; N = 53). Il s’agissait d’un placebo « actif », c’est-à-dire induisant une réaction physiologique (flushing) censée améliorer le processus en « aveugle » des participants, qui est difficile en pratique en raison des effets psychotropes de la molécule essayée.

Dans les deux groupes, il y avait un accompagnement psychologique en trois temps : des sessions de préparation (6 à 8 heures) avant le jour de l’intervention ; une session le jour de l’administration du médicament (7 à 10 heures, dans une pièce confortable sous supervision des thérapeutes et comprenant l’écoute d’une musique sélectionnée pour l’occasion) ; des sessions postérieures (4 heures), durant lesquelles les participants parlaient de l’expérience.

Le critère principal de jugement était l’évolution du score MADRS (Montgomery-Asberg Depression Rating Scale ; score entre 0 et 60 où un chiffre plus haut indique un degré plus sévère de dépression) entre le début de l’étude et le jour 43 du suivi. Les critères secondaires comprenaient l’évolution du score MADRS au jour 8, des évolutions de scores évaluant le handicap physique et social induit par la dépression (autoévalués) et la proportion de participants montrant une amélioration constante des symptômes (soit une réduction du score MADRS d’au moins 50 % entre le début de l’étude et les jours 8, 15, 29 et 43).

À l’issue du suivi, le traitement par psilocybine était associé à une réduction significative du score MADRS, par rapport à celle induite par le placebo, avec une différence moyenne de − 12,3 points [IC95% : − 17,5 à − 7,2] ; P <0,001) ; cette réduction était observée dès le jour 8 du suivi. La psilocybine était également associée à une réduction significative des scores de handicap physique et social à la fin du suivi. Par ailleurs, davantage de participants du groupe traité montraient une amélioration constante des symptômes sur la période de suivi (mais pour la rémission totale des symptômes, la différence n’était pas significative).

La prise de psilocybine était associée à un pourcentage plus élevé d’effets indésirables (nausées, céphalées…), en majorité légers à modérés et limités au jours de la prise, mais aucun effet indésirable grave lié au traitement n’a été rapporté.

Les auteurs en concluent que la psilocybine pourrait devenir un des traitements les plus efficaces des dépressions caractérisées.

Pour en savoir plus
Raison CL, Sanacora G, Woolley J, et al. Single-Dose Psilocybin Treatment for Major Depressive Disorder.  JAMA 31 août 2023.