L’arbre de Noël
Le « syndrome du sapin de Noël »
Pour les allergiques et asthmatiques, le choix du sapin est crucial. Pencher pour un conifère naturel se révèle parfois dangereux. Il y a quelques années, le constat d’une augmentation des consultations pour crises d’asthme durant les 15 jours entourant Noël a interpellé. En 2011, la publication d’une étude sur le sujet a identifié le suspect : le sapin naturel. Plus exactement, il s’agit des spores de moisissures présentes sur son écorce qui se dispersent dans l’habitat chauffé. Celles-ci, en concentration importante, engendrent de nombreux symptômes ORL et pulmonaires chez les personnes sensibilisées. Il s’agit d’épisodes de rhinite, de toux, de dyspnée, de crise d’asthme associée ou non à une conjonctivite. Les moisissures incriminées le plus souvent sont l’Aspergillus, le Penicillium, le Cladosporium ou encore l’Alternaria même si d’autres espèces ont également été retrouvées. En 2007, un travail expérimental a montré une augmentation importante de la concentration de spores de moisissures, passant de 800 à 5 000 spores/m3 dans un appartement où trônait un sapin de Noël !
La solution réside dans le choix d’un arbre de Noël synthétique en évitant de l’asperger de neige artificielle, source de polluants de l’air intérieur. Nettoyer le sapin naturel avant son entrée dans la salle est une autre option mais plus aléatoire dans sa réalisation. Une chose est sûre : l’arbre naturel ne doit pas rester plus de 15 jours à l’intérieur.
Colophane
Un autre désagrément lié à la manipulation d’un sapin naturel est l’eczéma de contact à la résine présente sur le tronc : la colophane. L’apparition des lésions cutanées se fait dans les 48 heures sur les mains et le visage. Le diagnostic repose sur la réalisation de patch-tests à distance de l’épisode aigu. La positivité du test à la colophane s’accompagne souvent d’une réaction aux parfums (fragrance-mix), au baume du Pérou, à la térébenthine et aux lactones sesquiterpéniques.
On peut retrouver cette substance sous différentes formes dans de nombreux éléments de la vie quotidienne : dans des cosmétiques (mascaras waterproof, ombres à paupières, fonds de teint, cires dépilatoires, brillantines, rouges à lèvres et vernis à ongles nacrés), des laques, certains adhésifs de sparadrap (de plus en plus remplacés par des acrylates), dans l’industrie (huile de coupe, fabrication du papier, peintures), sur les violons, dans les chewing-gums, les palettes en bois de pin.
Recevoir un allergique à sa table
Le menu
Lorsque l’un des convives est allergique alimentaire, il faut respecter quelques consignes pour ne pas stigmatiser la personne et éviter tout accident durant le réveillon.
Dans un premier temps, la personne qui reçoit doit bien évidemment s’enquérir des ingrédients qui sont interdits à son invité(e) afin de ne pas les inclure même en petite quantité dans le menu. Lors de l’achat, la lecture des étiquettes (sur les produits préemballés ou vendus en vrac) doit être soigneuse (encadré ci-dessous : « Comment faire ses courses ? »).
Lors de la préparation du repas, deux solutions s’offrent en cuisine :
- Préparer des plats sans aucun allergène pour tous les invités. De nombreux sites web ou livres proposent des recettes adaptées à cette situation (encadré). Vous trouverez une recherche de bûche à télécharger ici.
- Opter pour un repas mixte avec une préparation spéciale pour le ou les allergiques. Dans ce cas, il faut éviter les risques de contamination croisée, en l’occurrence sur le plan de travail et les ustensiles de cuisine. Pour cela il faut avoir à l’esprit que, par exemple, l’allergène Ara h1 de l’arachide (cause de possible anaphylaxie) peut persister sans lavage sur une surface lisse non poreuse en stratifié pendant 110 jours (penser à bien nettoyer avec de l’eau savonneuse ou une lingette du commerce et pas avec un produit vaisselle). Pour la farine de blé, une étude a prouvé que ses protéines allergisantes sont capturées dans la structure des éponges même rincées…
En dernier recours, l’invité allergique peut en accord avec son hôte apporter son propre repas.
Il est important que l’entourage de l’allergique connaisse les symptômes d’alerte de la réaction anaphylactique ainsi que le maniement du stylo auto-injecteur d’adrénaline qui doit toujours être à portée de main.
SEIPA aux huîtres
Durant les festivités, le plat d’huitres est souvent au programme. Cependant il faut pouvoir dans certaines circonstances faire le distingo entre une intoxication alimentaire et un possible SEIPA (syndrome entérocolite induite par les protéines alimentaires). Le premier cas de SEIPA aux mollusques date de 2012. Plus récemment, des observations liées à la consommation d’huitres sont répertoriées en France avec un passage aux urgences dans 16,7 % et en réanimation pour 2,7 % des personnes concernées. La fréquence d’allergie alimentaire non IgE médiée est vraisemblablement sous-estimée ; la diarrhée profuse (atteinte individuelle) peut être confondue à tort avec une intoxication alimentaire qui généralement touche plusieurs convives lors d’un repas ; dans les formes sévères, en raison du risque de déshydratation, une hospitalisation est nécessaire.
Pas de « French kiss » à l’apéro
Lors des apéritifs festifs, il faut éviter les erreurs de contact inopiné avec l’arachide pour les allergiques à cette légumineuse. Un baiser d’une personne en ayant ingéré sur la joue d’une personne allergique à la cacahuète peut entraîner quasi immédiatement une urticaire, un œdème ou des signes d’anaphylaxie. Le risque est encore plus grand en cas de « French kiss ». Plusieurs décès sont à déplorer surtout chez des adolescents et adultes jeunes.
L’arachide possède 17 allergènes identifiés dont certains sont cause d’anaphylaxie. Ara h1 (globuline 7S), Ara h3 (globuline 11S), Ara h2 et Ara h6 (toutes deux : albumine 2S) sont les principaux*. Il est désormais prouvé qu’il faut attendre 4 heures 30 après ingestion d’arachide pour que l’allergène majeur Ara h1 soit indétectable dans la salive du consommateur. Avant ce délai, le lavage des dents ne fait baisser le taux que de 20 %. Mâcher un chewing-gum n’a aucune incidence.
Ainsi, il faut impérativement qu’un délai minimum de 5 heures soit respecté entre l’ingestion d’arachide et un baiser avec une personne qui y est allergique. Le lavage des dents renforce la prévention d’événements dramatiques. Il va sans dire que la solution la plus raisonnable est de ne pas consommer du tout d’arachide dans la journée lorsqu’on invite chez soi un allergique…
Sous le sapin : attention aux ordinateurs et téléphones portables
Les fêtes de fin d’année sont parfois l’occasion d’offrir de cadeaux dispendieux comme des PC portables ou smartphones. Ces objets utilitaires sont parfois à l’origine d’eczéma de contact lié à la présence de nickel. Même s’il existe une réglementation sur le taux autorisé de nickel relargué par les articles de consommation destinés à être en contact direct et prolongé avec la peau (0,5 µg de nickel/cm2/semaine) – et les téléphones portables font partie de la liste des objets libérant du nickel depuis 2009 – les consignes sont peu respectées.
Un test simple détecte la libération de nickel des objets : le spot test à la diméthylglyoxime (DMG) se révèle positif (> 0,5 μg/cm2) lorsque la coloration vire au rose après application à l’aide d’un coton tige sur l’objet suspect. Différentes pièces métalliques des ordinateurs portables peuvent ainsi être testées (logo de la marque, bords latéraux, charnières, rebord de l’écran…).
En ce qui concerne l’allergie au smartphone, le premier cas publié de réaction au nickel date de 2000. Le bichromate de potassium, le chlorure de cobalt ou des résines peuvent également être incriminés. Dans ce cas, l’eczéma de contact prédomine au niveau de la zone de frottement (oreille, joue, la main) mais aussi de l’abdomen, de la cuisse et du sein (contact lors du transport de l’objet).
Quant aux casques audios et montres connectées, les thiurams (agent rentrant dans la fabrication du caoutchouc) peuvent être incriminés.
Les patch tests effectués par l’allergologue permettent d’identifier l’agent responsable.
Fragrances : jouets et bougies d’ambiance
Les fragrances envahissent littéralement notre environnement. On les retrouve comme parfums d’ambiance sous forme de bougies (souvent offertes à Noël), d’huiles essentielles, de brumisateurs pour oreillers. Cependant pour les allergiques et asthmatiques, elles peuvent s’avérer nocives : non seulement elles sont source de pollution de l’air intérieur, mais elles peuvent induire un eczéma de contact. Offrir un cosmétique, c’est prendre la responsabilité préalable de vérifier la composition et la présence ou non des 25 allergènes parfumés à étiquetage obligatoire.
Attention aussi aux substances glissées par les industriels dans les jeux pour enfants et peluches. Les réactions allergiques en augmentation ont amené les autorités à renforcer la sécurité des jouets en ajoutant depuis juillet 2022 de nouvelles molécules interdites à la (déjà longue) liste des substances parfumées interdites dans ce domaine. Il s’agit de l’atranol, du chloroatranol et de l’heptine carbonate de méthyle.
Quelques sites utiles
Liste d’éviction des aliments : comment faire ses courses ?
Allergodiet est un groupe de diététiciennes travaillant avec la Société française d’allergologie. Sur leur site, vous trouverez des fiches pour un grand nombre d’aliments avec des renseignements sur comment faire ses courses et les évictions à réaliser : https ://allergodiet.org
Pour trouver des recettes sans les 14 ADO (allergènes à déclaration obligatoire) :
https ://allergiquegourmand.blog
Pour trouver produits sans les allergènes majeurs et/ou farines sans gluten :
https ://www.happylolie.com/20 -chocolats
https ://www.maviesansgluten.bio
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Légifrance. Arrêté du 24 février 2010 fixant les modalités d’application du décret n° 2010-166 du 22 février 2010 relatif à la sécurité des jouets. 5 décembre 2022.
Direction de l’information légale et administrative. Jouet : les parfums allergisants doivent être signalés. 24 février 2022.
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