Avec environ 150 000 nouveaux cas par an, l’AVC est la première cause de handicap d’origine non traumatique chez les adultes en France. Un tiers des survivants gardent des séquelles neurologiques majeures.
La prise en charge rééducative de l’AVC est multiple et a pour objectifs, d’une part, la prise en charge des déficiences afin de limiter les incapacités et, d’autre part, la mise en place d’un travail de préservation et de restauration des capacités fonctionnelles pour permettre l’acquisition d’une autonomie maximale et d’une qualité de vie satisfaisante.
Rééducation précoce après un AVC
Afin de réduire la mortalité et la morbidité qui en découlent, une prise en charge se fondant sur des filières spécialisées doit être envisagée dès la phase aiguë.
Ainsi, l’évaluation spécifique des déficiences neuromotrices, neuro-orthopédiques, cognitives, sensorielles et psychologiques est nécessaire pour mettre en place sans délai les stratégies adaptées de rééducation et réadaptation.
De nombreuses techniques, que nous avons largement abordées dans un article signé par le Dr Sonia Hamdoun, permettent de cibler les objectifs de récupération et rééducation, motrice et cognitive. Ces techniques sont choisies principalement en fonction de la sévérité des déficits et du délai après l’AVC. Chaque patient est donc orienté non seulement en fonction de la sévérité de ses déficiences, mais aussi de ses paramètres personnels médicaux et psychologiques, ainsi que des paramètres environnementaux pouvant justifier des besoins particuliers (v. tableau).
Si le médecin généraliste peut être au cœur de ce parcours de soins et le coordonner, ce dernier est multidisciplinaire (kinésithérapeute, ergothérapeute, psychomotricien, professeur d’activité physique adaptée) et mis en œuvre dans des structures dédiées : en unité hospitalière, à domicile, en établissement de santé, dans un service de médecine physique et de réadaptation, en hôpital de jour, en ambulatoire.
Rééducation dans la phase chronique (après 6 mois)
Il n’existait pas jusqu’à présent de recommandation concernant la rééducation lors de la phase chronique, c’est-à-dire au-delà de 6 mois après la survenue de l’accident.
Celles qui viennent d’être publiées par la HAS sont donc les premières à aborder ce sujet : après une revue de littérature, elles recensent et classent selon le niveau de preuve les différentes interventions possibles dans le cadre de la rééducation des fonctions motrices et cognitives (hors traitements médicamenteux et éducation thérapeutique).
Leur pertinence, indications et modalités y sont mentionnées, afin de guider les professionnels de santé impliqués (médecins prescripteurs et rééducateurs, masseurs-kinésithérapeutes, ergothérapeutes, orthophonistes…) et d’harmoniser les pratiques.
Rééducation de la fonction motrice
Un programme de rééducation adapté et suivi – aussi bien pour le membre inférieur que pour le membre supérieur – doit être proposé aux patients ayant des séquelles d’une paralysie initiale au-delà de 6 mois après l’AVC. Son but : la prévention secondaire, la conservation, le rétablissement, l’optimisation ou la suppléance des troubles de la fonction motrice.
Effectué manuellement ou avec des instruments, ce traitement est à adapter aux spécificités du patient, par exemple en mélangeant différentes approches thérapeutiques.
Les programmes d’activité physique et les exercices de marche sont ceux qui ont le plus haut niveau de preuve (grade A) pour améliorer la fonction motrice et les capacités de déplacement.
Les orthèses de membre inférieur (de type releveur ou orthèses suropédieuses), la réalité virtuelle pour aider à la rééducation motrice ainsi que le biofeedback (rétroaction biologique) sont aussi préconisées (grade B). Cette dernière technique consiste en l’utilisation d’appareils de contrôle (visuels, auditifs…) qui permettent de « visualiser » des signaux physiologiques pour rendre le sujet conscient de son fonctionnement.
Enfin, il est possible d’y associer (grade C) : une rééducation de la posture et de l’équilibre, la méthode de contrainte induite du membre supérieur (limiter ou empêcher l’activité du membre supérieur sain afin de susciter l’activité du membre atteint) ou encore l’utilisation de toxine botulique (qui réduit le tonus musculaire et la suractivité des muscles spastiques) et d’imagerie mentale motrice (évocation ou répétition mentale d’une expérience motrice pour faciliter sa mémorisation et sa réalisation).
Rééducation de la fonction cognitive
Troubles de la mémoire, de l’attention et des fonctions exécutives sont fréquents et peuvent subsister plusieurs années après la survenue d’un AVC : ils peuvent aggraver la dépendance du patient, provoquer une détresse psychologique, voire mettre en péril sa sécurité. Pour y faire face, la HAS recommande notamment les stratégies de compensation mnésique comme l’utilisation d’aide-mémoires (agendas, outils électroniques, aides humaines, etc.), associées à une activité physique aérobie (grade B), dans le but d’améliorer la vitesse de traitement des informations. Pour ces patients – ayant un ralentissement de la vitesse de traitement des informations –, la rééducation de type Time Pressure Management, c’est-à-dire l’apprentissage de stratégies pour gérer les situations où le temps est un facteur de stress, est aussi préconisée (grade B).
Par ailleurs, en cas troubles du langage et de la communication, notamment l’aphasie, la méthode de stimulation magnétique transcrânienne répétitive (rTMS) et la rééducation informatisée du langage en présence d’un thérapeute sont particulièrement recommandées (grade A). L’implication de l’aidant ou du partenaire par l’information et l’éducation thérapeutique est également indiquée.
Faute de données, des méthodes telles que l’acupuncture ou la musicothérapie ne peuvent pas être recommandées en l’état actuel des connaissances.
HAS. Rééducation à la phase chronique d’un AVC de l’adulte : pertinence, indications et modalités. 4 juillet 2022.
Colle F, Hamdoun S. Prise en charge rééducative précoce après un accident vasculaire cérébral. Rev Prat 2016;66(4):436-41.
Lire aussi :
Laurence C. Post-AVC : rééduquer l’aphasie. Rev Prat Med Gen 2019;33(1022);419.
Barthélémy C, Brissot P, Danis M, et al. Récupération de la motricité après un AVC, facteurs pronostiques et rééducation. Rev Prat 2022 ;72(5) ;489.
Mas JL. Dossier post-accident vasculaire cérébral. Rev Prat 2016;66(4):431-52.