À la fois traumatisme visible et immédiat, la PFP a des répercussions fonctionnelles mais aussi psychologiques qu’il est indispensable d’évaluer pour une prise en charge globale adaptée. Elles impactent significativement la qualité de vie et entravent quotidiennement la communication verbale et non verbale.3,4
Un grade supérieur à 2 à la classification de House et Brackmann, un score total < 85 % au Sunnybrook Facial Grading System à 3 mois et une prise du traitement retardée, 4 jours après l’apparition de la paralysie semblent être des facteurs pronostiques d’une récupération avec séquelles dans une population francophone.
Évaluation et rééducation
Selon notre pratique (280 patients mensuels), une PFP qui ne récupère pas totalement à 1 mois gardera des séquelles plus ou moins invalidantes. La rééducation est primordiale, elle débute précocement, dans les 15 premiers jours, quel que soit le grade initial.3 Elle repose sur des massages et des exercices praxiques dans le sens de récupération des fibres. Le suivi régulier permet de contrôler, observer et ajuster les différents paramètres de la réalisation du mouvement.
En pratique
Le rééducateur est vigilant quant au contexte clinique (paralysie faciale brusque et/ou progressive sur plusieurs mois), et porte attention à l’ancienneté de la paralysie. Connaître la physiopathologie de la lésion nerveuse, en ayant certains repères est important. En effet, après parotidectomie avec préservation du nerf, la rééducation n’est pas nécessaire car la récupération se fait en 3 mois et 15 jours (délai de repousse axonale). Après une chirurgie de l’oreille ou de l’angle ponto-cérébelleux, le rééducateur réadresse le patient pour de nouvelles investigations, si celui-ci demeure flasque au-delà respectivement de 7 mois et 10 mois.
Rééducation par automassages
Dans un second temps, on donne des conseils d’hygiène de vie quotidienne, les attitudes néfastes à éviter (protection palpébrale avec compresse, mâcher du chewing-gum, faire des grimaces) qui favorisent spasmes et syncinésies. On enseigne ensuite les massages (sens, direction, intensité, durée) afin que le patient les reproduise. On lui procure un schéma modélisant les bons gestes à effectuer (
Les massages visent à prévenir les contractures et l’apparition de séquelles définitives. Au stade séquellaire, leur objectif est de faire régresser l’hypertonie en décollant les adhésions, en cassant les fibres pour supprimer les contractures et détendre au maximum l’hémiface paralysée.
Après avoir appliqué une crème neutre, le patient se masse une fois par jour à raison de 10 à 15 minutes du côté paralysé et du côté sain (pour éviter un « surinvestissement » de cette hémiface et un risque d’hyper- activité).
Les massages externes sont réalisés du centre vers la périphérie du visage de manière symétrique et en restant toujours bien parallèle au sol, et du territoire supérieur vers le territoire inférieur, 3 à 5 fois par mouvement (
Les massages internes ou endobuccaux sont réalisés avec la pince pouce- index (pouce dans la joue, index à l’extérieur ;
Exercices praxiques
– la lenteur d’exécution des mouvements permettant au patient de modifier l’aspect, la force et la vitesse d’exécution pour augmenter le contrôle moteur et inhiber les syncinésies ;
– les petits mouvements limitant l’hyper- activité des muscles voisins ;
– leur symétrie renforçant la réponse physiologique normale et réduisant l’hyper- activité du côté sain.
Plusieurs stades sont à respecter pour éviter cocontractions, voire spasmes (
Bien menée, cette rééducation développe le contrôle cortical des mimiques et réhabilite le sourire lors de la communication. Ce principe fonde également la chirurgie palliative. Le tonus de la face en effet peut être apporté soit par un nerf soit par un muscle. Qu’il s’agisse d’une anastomose hypoglosso-faciale ou d’une myoplastie d’allongement du temporal, la rééducation fait intervenir un processus d’apprentissage moteur, conscient et inconscient, impliquant la mémoire. Cette neuroplasticité intervient lors du travail des mimiques, et principalement du sourire en modifiant l’organisation des zones corticales grâce au feedback.
1. Paralysie faciale : erreurs à éviter
Omettre la corticothérapie et l’IRM sur tout le trajet du nerf.
Ne pas prescrire un bilan pré–rééducation pour en fixer la ligne de base.
Préconiser de mâcher du chewing-gum ou de faire des grimaces.
« Promettre » une récupération totale sous 3 semaines.
2. Rééduquer la paralysie faciale périphérique : en 5 étapes
Passif
Le patient mentalise le mouvement. Le thérapeute l’exécute à sa place.
En cas d’ébauche de mouvement par le patient, le stade Passif-Assisté est préconisé.
Passif-Assisté
Le patient se regarde dans un miroir et essaye d’initier le mouvement.
Quand le thérapeute décèle un frémissement, il accompagne le geste et le maintient quelques secondes afin de solliciter son attention visuelle et cognitive.
Actif-Assisté
Le thérapeute ne maintient le geste qu’en fin de mouvement.
Actif
Lorsque l’ébauche est suffisante pour déclencher le départ du mouvement, le patient travaille seul devant sa glace, sans forçage ni exagération.
Actif-Contre-Résistance
Quand le patient arrive à maintenir le mouvement, le thérapeute y oppose une légère résistance.
2. Lamas G, Tankéré F, Gatignol P, et al. Réhabilitation de la face paralysée. Les Monographies Amplifon 2016 (n° 60). https://bit.ly/2Pu1Wlh
3. Gatignol P, Lannadère E, Bernat I, Tankéré F, Lamas G. Bénéfices de la rééducation d’une paralysie faciale périphérique. Rev Med Suisse 2011;7:1908-13.
4. Lannadère E, Picard, D, Gatignol P. Principes de rééducation d’une paralysie faciale périphérique. Les Monographies Amplifon 2016(n° 60):89-115.
5. Diels HJ. Facial paralysis: is there a role for a therapist? Facial Plastic Surg 2000;16:361-4.