Signes typiques : pyrosis (brûlures rétrosternales ascendantes) et régurgitations acides : diagnostic clinique chez 90 % des patients.
Si atypiques (douleurs thoraciques ou épigastriques sans pyrosis, manifestations ORL, toux chronique) : explorer !
Chez un sujet de moins de 50 ans, sans signe d’alarme (dysphagie, anémie, altération de l’état général...) : traitement empirique d’emblée, le plus souvent par inhibiteurs de la pompe à protons (IPP) ; mais échec (réponse absente ou partielle) dans 30 à 40 % des cas (
Évaluation clinique
Si brûlures épigastriques ou cervicales sans caractère rétrosternal ascendant : probabilité de RGO beaucoup plus faible.
Généralement de nature dyspeptique ou ORL (alors que les manifestations typiques ont disparu).
Régurgitations : moins bien soulagées que le pyrosis.
Troubles fonctionnels digestifs coexistants : facteur majeur d’échec du traitement (lié probablement à une hypersensibilité viscérale sous-jacente).
Optimiser les IPP
S’assurer que les IPP sont pris à jeun, 15 à 20 minutes avant un repas (meilleure efficacité antisécrétoire).
Suggérer de diviser la simple dose en 2 prises quotidiennes (1/2 dose matin et soir), changer d’IPP ou augmenter la posologie (la doubler – 1 dose matin et soir, hors AMM – soulage 20 à 25 % de patients supplémentaires).
Leur associer des alginates (Gaviscon), mais pas un prokinétique (efficacité non démontrée).
Endoscopie digestive haute : indispensable ?
Documente une authentique œsophagite peptique (inflammation avec érosions et ulcérations de la paroi interne, de gravité variable, pouvant induire un endo-brachyœsophage ou une sténose) ou un œsophage de Barrett (état précancéreux dans lequel la muqueuse squameuse œsophagienne se transforme en épithélium de type intestinal).
Apporte des arguments en faveur d’un trouble moteur de l’œsophage (stase, ressaut cardial).
Rendement diagnostique faible chez les patients déjà sous IPP.
Quelles explorations ambulatoires ?
PH-métrie de 24 heures, à réaliser après une semaine de sevrage : recherche une exposition acide œsophagienne pathologique (temps passé à pH < 4 supérieur à 5 %).
Si un reflux est identifié (œsophagite peptique, Barrett, pH-métrie positive), la pH-impédancemétrie permet :
– d’évaluer sa persistance sous IPP ;
– de détecter tous les types de reflux, acides ou non, et de les corréler aux symptômes (sous IPP, la plupart sont non acides et non détectés en pH-métrie simple).
Parmi les patients explorés sous IPP :
– 50 à 60 % n’ont pas de symptômes associés à un RGO, ce qui explique probablement l’échec de ces derniers (en cause : dyspepsie ou pyrosis fonctionnels, manifestations d’hypersensibilité pharyngolaryngée) ;
– reflux acide seulement dans 10 % des cas ;
– peu ou non acide : corrélé aux symptômes dans 30 à 40 % des cas.
=> chez la majorité des patients, les troubles qui perdurent sous IPP ne sont pas en rapport avec un reflux persistant, mais sont fonctionnels, et ce d’autant plus qu’ils sont atypiques ou extra-œsophagiens (ORL par exemple).
Traitements
Compte tenu du rôle majeur de l’hypersensibilité viscérale dans la résistance aux IPP, proposer des modulateurs de la douleur : antidépresseurs tricycliques ou ISRS, à des doses inférieures à celles modifiant l’humeur (citalopram et amitriptyline ont montré une efficacité dans l’œsophage acido-sensible).
Chirurgie (fundoplicature cœlioscopique) :
– meilleurs résultats chez des patients « dépendants » des IPP que chez les résistants ;
– à tenter si la pH-métrie est positive (exposition acide élevée et/ou association symptômes-reflux positive) ;
– indiquée en cas de reflux documenté lors de la persistance d’un syndrome postural avec régurgitations, après avoir éliminé un trouble moteur œsophagien sévère par manométrie œsophagienne.
IPP : modalités de prescription
RGO : chez les plus de 60 ans et/ou si symptômes typiques et rapprochés (1 fois par semaine ou plus) : IPP demi-dose pendant 4 semaines (sauf oméprazole pleine dose) puis éventuellement à la demande en cas de symptôme épisodique. Si rechutes fréquentes et précoces à l’arrêt de l’IPP : traitement d’entretien à dose minimale efficace.
Œsophagite non sévère (érythème, érosions non circulaires) : idem RGO.
Œsophagite sévère (érosions muqueuses circulaires, ulcération chronique, sténose ou encore endobrachy-œsophage) : IPP pleine dose pendant 8 semaines avec FOGD de contrôle à l’arrêt. Traitement d’entretien systématique proposé au long cours à dose minimale efficace.