Le reflux vésico-urétéral (RVU) est habituellement diagnostiqué chez l’enfant après une infection urinaire (IU). Il peut aussi être suspecté en période anténatale devant une dilatation rénale ou des voies urinaires. Il est plus rarement identifié chez l’adulte dans un contexte infectieux ou de dysfonction vésico-sphinctérienne.1
Deux types :2 le reflux congénital ou malformatif, résultant d’une vraie anomalie de la jonction urétéro-vésicale ; et le reflux symptôme, secondaire à des troubles fonctionnels vésico-sphinctériens.
But de la prise en charge : empêcher les infections rénales et préserver la fonction de l’organe. Cependant, la conduite à tenir est très controversée. En effet, le traitement vise à éviter les pyélonéphrites mais ne semble pas modifier le pronostic rénal ;2, 3 avec la croissance, les taux de guérison spontanée sont élevés ;2 la chirurgie vésicale devrait être évitée dans la première année de vie ;4 enfin, la circoncision diminue le risque d’IU chez les garçons ayant une uropathie malformative.2

Deux grands types

L’infection urinaire reste le principal mode de révélation ; 15 % des dilatations anténatales se révèlent être dues à des reflux.2 Le RVU touche 8 filles pour 1 garçon ; 30 à 50 % des enfants ayant une IU ont un RVU, dont 30 % ont déjà des lésions rénales.3 La résolution spontanée des reflux de découverte anténatale est de 62 %.1 Deux types :1-3
– le RVU dit primitif ou congénital, conséquence d’une vraie malformation congénitale de la jonction urétéro-vésicale (béance du méat). Il est souvent identifié en anténatal et concerne le jeune nourrisson de sexe masculin. Il s’accompagne volontiers de lésions parenchymateuses rénales avec un risque de dysplasie. Sa résolution spontanée est assez rare ;
– le RVU dit fonctionnel, secondaire à une dysfonction vésicale passagère ou persistante (troubles de la vidange vésicale, tendance à la rétention urinaire, troubles de la continence et/ou constipation associés…). Plus fréquent chez la fillette, il est révélé par l’IU. Habituellement de bas grade, il ne s’accompagne pas de lésions parenchymateuses rénales.1-4 Les possibilités de résolution spontanée sont importantes dès que le trouble mictionnel est identifié et traité. Corriger la dysfonction vésicale est donc crucial.

Comment l’évaluer ?

Le diagnostic radiologique est affirmé par la cystographie radiologique conventionnelle, examen de référence (figure).1-4 Les RVU sont dits de bas grade, intéressant une partie ou la totalité de l’uretère mais sans dilatation majeure des voies urinaires (grade 1, 2 et 3) et de haut grade (4 et 5), s’étendant à la totalité de l’uretère avec dilatation marquée et/ou reflux intrarénal.
En raison du risque de RVU transitoire lors de l’inflammation locale de la jonction urétéro-vésicale, il est conseillé d’attendre 3 à 4 semaines après une IU fébrile avant de faire une cystographie. Si une pyélonéphrite chez le garçon est une indication ; chez la fille, l’attitude est moins tranchée (fréquence des petites infections). Une pyélonéphrite récidivante et des signes de gravité (cliniques, écho, scintigraphiques) justifient cet examen.
L’échographie précise la taille des reins et leur échostructure. Un RVU est suspecté si dilatation intermittente ou permanente des bas uretères. Mais c’est un mauvais examen pour le diagnostic positif.
L’évaluation de la fonction rénale est indispensable, en particulier en cas d’anomalies échographiques du parenchyme hors période infectieuse. La scintigraphie DMSA apprécie le retentissement. Elle doit être réalisée à distance d’un épisode infectieux : au minimum 4 à 6 mois. Lorsqu’elle est strictement normale, la probabilité de guérison spontanée du reflux est proche de 100 % .2

Traitement : non consensuel

Tout reflux pathogène doit être traité. Le choix des modalités dépend du contexte clinique et des habitudes de l’équipe prenant en charge l’enfant.1
L’antibioprophylaxie est couramment prescrite car elle réduirait l’incidence des cicatrices rénales après pyélonéphrite.2 On a peu de recommandations sur la durée ou les médicaments à utiliser. Il est conseillé de lui associer des mesures diététiques ainsi qu’une éducation de l’enfant et de l’entourage : boissons en quantité suffisante, mictions efficaces régulières et fréquentes…
La circoncision, réputée diminuer les risques d’IU, facilite les prélèvements et la fiabilité des examens d’urines chez le garçon. Elle est souvent proposée dans le même temps opératoire qu’un geste endoscopique.1, 2 L’alternative est un dermocorticoïde local chez le garçon ayant un RVU pathogène et un phimosis sténosant.
Chez l’enfant ayant un RVU fonctionnel, hygiène et éducation mictionnelle visent à corriger le trouble (dyssynergie vésico-sphinctérienne, rétention, troubles mictionnels…). Une rééducation spécialisée, avec ou sans biofeedback, par un kiné formé peut être indiquée.
Par voie endoscopique, plusieurs biomatériaux peuvent être injectés dans la muqueuse vésicale pour rétablir le mécanisme anti-reflux (Teflon, macro- plastique, coaptite, Deflux, collagène, graisse, etc.). Le Deflux, largement utilisé, se résorbe en 5 à 10 ans. Chez l’enfant, c’est un gage de qualité et de sécurité car le reflux de bas ou moyen grade guérit avec la croissance.1
Ce geste peu invasif est une option de première intention. Il doit être fait à distance de toute IU (ECBU systématique en préopératoire). L’intervention, brève, est envisageable en ambulatoire. Chez l’enfant, une anesthésie générale est requise (la circoncision est souvent proposée). Une antibioprophylaxie injectable est administrée de façon concomitante. Il est recommandé de la poursuivre 1 à 3 mois après le geste (Bactrim ou Alfatil).1
L’efficacité avoisine les 60-70 % selon la sévérité.1 En cas d’échec, une deuxième cure peut être proposée (même taux d’efficacité) ou une chirurgie ouverte avec un succès avoisinant les 95 %.
Inconvénient : l’obstruction complète de l’uretère. Cette complication parfois précoce (dans les jours suivant tous types de geste) impose la montée d’une sonde de drainage de type urétérale ou double J. Parfois, elle survient tardivement (mois ou années), requérant une dilatation endoscopique ou une réimplantation en chirurgie ouverte.
Une échographie postopératoire est demandée en cas de symptômes et/ou de difficultés lors de l’intervention, afin de vérifier l’absence d’impact sur le haut appareil. À long terme, cet examen est indispensable pour surveiller la croissance des reins et détecter l’apparition d’une dilatation tardive des voies urinaires.
Le principe du traitement chirurgical est d’allonger le trajet sous-muqueux de l’uretère par voie intra- ou extravésicale (éventuellement laparoscopique). Selon d’innombrables techniques et variantes, le taux d’efficacité est très élevé (> 95 %).2
Les suites opératoires sont parfois longues et difficiles. Les conséquences sur la fonction du trigone vésical chez le jeune nourrisson ne sont pas toujours prévisibles. Chez l’adulte, le taux de succès est excellent, mais l’intervention est difficile et la pénibilité postopératoire bien supérieure.1 De nos jours, la chirurgie est réservée aux formes très sévères du RVU et aux échecs du geste endoscopique.
Encadre

Reflux : à quoi est-il dû ?

L’uretère terminal traverse le muscle vésical de haut en bas et de dehors en dedans sur une longueur de 8 à 10 mm environ. Il a ensuite un trajet sous-muqueux sur quelques millimètres et se termine par l’orifice méatique urétéral. La fonction anti-reflux est assurée par cette disposition sous-muqueuse. L’amarrage solide de l’orifice urétéral au trigone superficiel ainsi que le long trajet sous muqueux expliqueraient son occlusion lorsque la pression vésicale augmente.

Le RVU, uropathie la plus fréquente de l’enfant, est l’intrusion d’urines vésicales au niveau des uretères et du haut appareil. Le caractère nocif de l’association RVU et IU est bien connu.1, 2, 4 Ce processus ne peut expliquer seul les lésions rénales. Seraient impliqués : bactéries et leur réservoir, parenchyme rénal et comportement vésical.2

Encadre

Une démarche différente selon le sexe, au CHU de Grenoble

Chez le garçon, le reflux est suspecté dès le 1er épisode de pyélonéphrite authentique. Une échographie est réalisée durant cet événement puis à distance. La cystographie est demandée 3 à 4 semaines après la fin de l’infection et la scintigraphie DMSA recherche, 4 à 6 mois après, un retentissement rénal.

Chez la fille, un premier épisode d’IU peu sévère peut être toléré, surtout s’il y a des signes fonctionnels (comportement mictionnel inadéquat, acquisition propreté, etc.). L’échographie pendant l’infection oriente la conduite ultérieure. En cas de récidive de pyélonéphrite authentique : même démarche que chez le garçon.

Références
1. Boillot B, Teklali Y, Rabattu PY. Traitement endoscopique du reflux vésico-urétéral chez l’enfant. EMC (Elsevier SAS, Paris), Techniques chirurgicales-Urologie 2013;6:1-6.
2. Demède D, Cheikhelard A, Hoch M, Mouriquand P. Médecine factuelle et reflux vésico-urétéral. EMC (Elsevier SAS, Paris), Urologie, 18-207-E-50, 2006.
3. Khoury A, Bägli A. Vesicoureteral Reflux. In: Campbell-Walsh Urology, 10th ed. Saunders Elsevier; 2012.
4. Tekgül S, Riedmiller H, Gerharz E, et al. Guidelines on paediatric urology. European society for paediatric urology. European Association of Urology 2011. https://bit.ly/2EOUag1

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essentiel

Le RVU, fréquent chez l’enfant, est cause d’infections urinaires.

Distinguer le malformatif du fonctionnel car la prise en charge diffère.

Principal risque : impact négatif sur la fonction rénale.

Le traitement endoscopique a transformé la prise en charge.