C’est un écoulement antérieur ou postérieur au niveau des cavités nasales évoluant depuis plus de 3 mois, lié à une production excessive de mucus et/ou à un mauvais drainage nasal ou sinusien. Ce symptôme, banal chez l’enfant, doit cependant conduire à une recherche étiologique.
L’interrogatoire est essentiel pour identifier un éventuel facteur déclenchant, préciser sa périodicité (saisonnière ou per- annuelle), son siège (uni- ou bilatéral) et son aspect (clair ou purulent).
Comme pour toute pathologie nasale, on recherche systématiquement d’autres signes fonctionnels rhinologiques – obstruction, hyperréactivité nasale (éternuements, prurit), troubles olfactifs, douleurs sinusiennes, épistaxis – ainsi que des antécédents personnels (terrain atopique, pathologie pulmonaire, traumatisme, chirurgie) et familiaux (terrain atopique).
Le bilan clinique de première intention oriente le praticien : inspection morphologique de la face, vérification de la perméabilité des fosses nasales, étude de celles-ci par rhinoscopie antérieure, examen endobuccal et otoscopie.
Il est éventuellement complété par une consultation ORL avec nasofibroscopie, qui permet de visualiser l’état de la muqueuse, l’aspect de la rhinorrhée, du cornet inférieur et du méat moyen, la cloison nasale, la perméabilité des choanes et du cavum, et de rechercher des polypes, une lésion ou un corps étranger.
Un bilan complémentaire est parfois nécessaire : tests allergologiques, scanner ou IRM du massif facial. Il est important de noter que la radiographie des sinus et celle du cavum (pour identifier une hypertrophie des végétations adénoïdes) ne sont plus indiquées.
Afin de simplifier la démarche étiologique, on peut distinguer la rhinorrhée claire de la purulente, même si cette classification est imparfaite (fig. 1).

Rhinorrhée claire

La rhinite allergique est une affection très fréquente qui toucherait de 10 à 40 % des enfants selon les études.1 Il s’agit d’une réaction locale d’hypersensibilité médiée par des anticorps de type IgE, qui entraîne classiquement une rhinorrhée claire bilatérale associée à des éternuements, un prurit nasal, oropharyngé et oculaire, et une obstruction nasale.
à l’interrogatoire, on doit s’enquérir des antécédents personnels ou familiaux évoquant un terrain atopique et de l’exposition de l’individu aux allergènes. Deux formes sont décrites : périodique (rhinite pollinique) ou perannuelle (aux acariens, par exemple).
L’examen clinique retrouve une inflammation de la muqueuse nasale, une hyper- trophie des cornets inférieurs et une rhinorrhée claire. Un bilan allergologique est alors indiqué : il permet de faire le lien entre les manifestations nasales et une allergie prouvée.
Cependant, s’il est négatif, il ne suffit pas à éliminer le diagnostic.
Le traitement de première intention repose sur l’éviction de l’allergène si celui-ci est identifié et sur des mesures symptomatiques : antihistaminique de seconde génération oral ou nasal et lavages de nez. Les corticoïdes nasaux ont une place en seconde intention.2
Des rhinites non allergiques sont également décrites :
– vasomotrices : liées à un engorgement vasculaire intermittent de la muqueuse nasale, elles sont aggravées par une atmosphère sèche ;
– à éosinophiles (Non Allergic Rhinitis with Eosiniphilia Syndrome, NARES) : syndrome d’hyperréactivité nasale non spécifique associé à une éosinophilie des sécrétions ; potentiel évolutif vers une polypose nasosinusienne, un asthme ou une intolérance à l’aspirine ;
– médicamenteuses (en cause : antihyper- tenseurs, inhibiteurs de la phosphodiestérase de type 5, hormones de synthèse, anti-inflammatoires, psychotropes…).
Bien que rare, il faut suspecter une rhinorrhée cérébrospinale devant un écoulement « eau de roche » apparaissant lorsque la tête est penchée en avant. Le dosage de la ß-2-transferrine (positif s’il s’agit de LCR) aide au diagnostic. Une imagerie de la base du crâne (scanner et/ou IRM) est alors réalisée pour déterminer l’origine (fig. 2) : post-traumatique (le plus souvent), post-chirurgicale ou secondaire à une malformation congénitale.

Rhinorrhée purulente

Unilatérale

Il faut toujours évoquer un corps étranger intranasal et ce d’autant que l’enfant est âgé de 2 à 5 ans ou qu’il a des troubles du comportement (autisme, trisomie 21…) Attention, l’objet peut être sous-muqueux s’il a été introduit depuis quelques jours. Un scanner, voire un examen endoscopique sous anesthésie générale, peut alors être justifié.
S’il s’agit d’une pile bouton, son extraction est une urgence absolue ; en effet, une fois enclavée, elle peut, en 2 heures, provoquer des lésions de nécrose (de cloison notamment) graves et irréversibles3 (difficiles à corriger chirurgicalement).
L’atrésie choanale est une malformation congénitale caractérisée par une imperforation uni- ou bilatérale de la partie postérieure de la cavité nasale.
Elle se traduit par une obstruction nasale et une rhinorrhée. Bien que le diagnostic soit habituellement fait au moment du cathétérisme nasal à la naissance, il peut être plus tardif en cas de forme unilatérale.
Scanner du massif facial (fig. 3) et bilan général pluridisciplinaire sont essentiels car cette affection s’intègre fréquemment dans un syndrome polymalformatif (rare, appelé CHARGE). Le traitement est chirurgical.
En cas de sinusite chronique unilatérale, la rhinorrhée s’accompagne de douleurs intermittentes. La recherche d’un facteur favorisant est systématique : déviation de cloison, tumeur bénigne (polype de Killian) ou, plus rarement, maligne. Une cause odontogène doit être écartée par un bilan dentaire.

Bilatérale

La rhinosinusite chronique touche les enfants de plus de 6 mois, en raison du développement postnatal des sinus. Les critères diagnostiques sont :4
– au moins 2 symptômes parmi : rhinorrhée purulente, obstruction nasale, douleurs faciales, toux ;
– durant depuis au moins 90 jours ;
– associés soit à des signes endoscopiques d’œdème muqueux, de sécrétions purulentes endonasales ou de polypose, soit à des images scanographiques d’œdème muqueux des sinus ou du complexe ostio- méatal.
Bien qu’elle soit le plus souvent idiopathique, il faut rechercher des polypes et des signes évoquant une pathologie générale (mucoviscidose, déficit immunitaire, dyskinésie ciliaire primitive, maladie de Widal).
L’hypertrophie des végétations adénoïdes est la cause la plus fréquente d’obstruction nasale chronique avec rhinorrhée purulente liée à une lésion du rhino- pharynx. à l’interrogatoire, on recherche des symptômes d’apnées du sommeil et des arguments en faveur d’une hypoacousie (retard de langage notamment). L’examen endobuccal peut mettre en évidence une hypertrophie amygdalienne associée. L’otoscopie peut révéler une otite séromuqueuse. Elle est éventuellement associée à un bilan audiométrique.
Les autres lésions du cavum sont plus rares : tumeur maligne du rhinopharynx, fibrome nasopharyngien, kyste de la bourse de Tornwaldt.

Références

1. Mims JW. Epidemiology of allergic rhinitis. Int Forum Allergy Rhinol 2014;4(Suppl 2):S18-20.
2. Roberts G, Xatzipsalti M, Borrego LM, et al. Paediatric rhinitis: position paper of the European Academy of Allergy and Clinical Immunology. Allergy 2013;68:1102-16.
3. Bakshi SS, Coumare VN, Priya M, Kumar S. Long-Term Complications of Button Batteries in the Nose. J Emerg Med 2016;50:485-7.
4. Brietzke SE, Shin JJ, Choi S, et al. Clinical consensus statement: pediatric chronic rhinosinusitis. Otolaryngol Head Neck Surg 2014;151:542-53.

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essentiel

La rhinorrhée chronique, symptôme banal chez l’enfant, impose une recherche étiologique.

En cas d’écoulements clairs, une rhinite allergique est retrouvée le plus souvent.

Si purulents et unilatéraux, évoquer un corps étranger ou une cause organique (atrésie choanale, déviation de cloison, tumeur