Selon les recommandations européennes (EPOS)1 et françaises,2 les thérapies locales en rhinologie (tableau) peuvent être utilisées dans les rhinosinusites aiguës (symptomatiques depuis moins de 3 mois) ou chroniques (depuis plus de 3 mois ; sans ou avec polypes) et/ou allergiques (RA). Selon l’importance des symptômes, on parle d’atteinte  :
– légère (EVA 0 ➞ 3) ;
– modérée (> 3 ➞ 7) ;
– sévère (> 7 ➞ 10).
Parmi les formes aiguës, on distingue les rhinosinusites simples (durant moins de 10 jours) des « post-virales », dont les symptômes s’aggravent après 5 jours d’évolution ou persistent 10 jours après le début (mais moins de 3 mois)...

Rhinosinusite aiguë

C’est une affection le plus souvent virale, courante en médecine générale, dont la guérison est généralement spontanée.
Chez l’adulte et l’enfant, les glucocorticoïdes nasaux (en particulier la mométasone) en monothérapie (forme modérée) ou en association à des antibiotiques per os (forme sévère) améliorent significativement les symptômes (administrés pendant 10 à 15 jours ; tableau).1 Aucun effet secondaire significatif n’a été rapporté. Ils ont même montré chez l’adulte et le grand enfant une supériorité en monothérapie par rapport à une antibiothérapie per os, lorsqu’elle est indiquée (à confirmer par des études contrôlées et randomisées).
Leur utilisation prophylactique lors d’une rhinopharyngite n’est pas recommandée.
Chez l’adulte, l’irrigation nasale (eau, sérum isotonique ou hypertonique) n’a qu’un intérêt limité.
Les vasoconstricteurs (au maximum 5 jours de traitement), largement prescrits, ont une efficacité modérée sur l’obstruction nasale d’une rhinosinusite virale mais ne sont pas indiqués en cas de surinfection bactérienne. Les effets sur les symptômes sinusiens (obstruction nasale, rhinorrhée postérieure, douleurs faciales, hyposmie, éternuements) ne sont pas démontrés, imposant de considérer la balance bénéfices/risques lors de leur prescription, en particulier chez l’enfant (contre-indiqués avant 15 ans).
L’ipratropium, évalué dans la rhinopharyngite, semble diminuer la rhinorrhée sans améliorer l’obstruction nasale au prix d’effets secondaires bien tolérés (irritation rhinopharyngée et sécheresse nasale).
Le cromoglicate n’a qu’une efficacité partielle (50 %) sur les symptômes de la sinusite post-rhinopharyngite et n’est donc pas recommandé.
Chez l’enfant, seule l’irrigation nasale tend à limiter les symptômes et permet la prévention des récidives, en parallèle d’une antibiothérapie lorsqu’elle est indiquée.

Rhinosinusite chronique

L’irrigation nasale (sérum isotonique) a un effet sur les symptômes en monothérapie ou en association, surtout si elle est pratiquée en grand volume (250 cc chez l’adulte, 150 cc chez l’enfant), sous pression et sur des cavités sinusiennes opérées.
Ainsi, elle est recommandée dans le traitement quotidien des formes avec ou sans polypes de l’adulte et de l’enfant ainsi qu’en postopératoire (6 semaines, 3 x/jour). Elle est cependant moins efficace que les corticoïdes nasaux. L’adjonction d’hypochlorite de sodium (Dakin stabilisé) est possible pour une activité antiseptique supplémentaire.

Sans polypes

Chez un patient non opéré, les glucocorticoïdes nasaux améliorent significativement les symptômes nasosinusiens.
Ils peuvent être prescrits au long cours après identification d’une dose minimale efficace.
Les nouveaux corticoïdes inhalés – mométasone, fluticasone –semblent plus efficaces que ceux de première génération – budénoside, béclométasone, triamcinolone (mais différence non significative).
Les antibiotiques locaux ne sont pas recommandés (pas de supériorité par rapport à une simple irrigation nasale).
Les antimycotiques locaux (amphotéricine B ; effets indésirables : irritation nasale, cacosmie), la phytothérapie, et les traitements homéopathiques n’ont pas montré d’effet au long cours sur les symptômes.

Avec polypes (figure)

Les glucocorticoïdes nasaux, par rapport au placebo, diminuent significativement les symptômes, la taille des polypes, le risque de récidive, et augmentent le débit inspiratoire nasal maximal, qu’ils soient de nouvelle (mométasone, fluticasone) ou de première génération (budénoside, béclométasone, triamcinolone). La réduction de volume des polypes est d’autant plus importante s’ils siègent dans une cavité nasale opérée.
Aucune étude n’a évalué le bénéfice d’une antibiothérapie locale. Les antimycotiques locaux (amphotéricine B) n’ont pas montré d’effet au long cours.
Chez l’enfant, malgré l’absence d’études pédiatriques, les glucocorticoïdes nasaux sont recommandés en première intention, compte tenu de leur efficacité significative chez l’adulte et de leur bonne tolérance dans la RA de l’enfant.

Rhinosinusite allergique

En dehors de l’éviction de l’allergène (si identifié), plusieurs thérapeutiques locales peuvent être utilisées.2
Les glucorticoïdes nasaux sont les anti-inflammatoires de référence chez l’adulte et l’enfant (à partir de 3 ans).
Ils sont significativement plus efficaces que les antihistaminiques et améliorent sensiblement la qualité de vie des patients.
Aucune différence entre les molécules n’a été mise en évidence.
L’association azélastine + corticoïde nasal (Dymista) serait supérieure au placebo et à l’administration d’un glucocorticoïde nasal et d’un antihistaminique local. C’est cependant une option de deuxième intention étant donné l’absence d’étude comparative versus le traitement de référence – glucocorticoïdes oraux et/ou antihistaminiques – (Commission de la transparence, HAS février 2014).
Cette formulation unique permet probablement une meilleure observance. Les effets secondaires (épistaxis, dysgueusie, céphalées) sont rares.
Les antihistaminiques nasaux (azélastine) agissent rapidement, mais doivent être administrés 2 fois par jour et n’ont pas ou peu d’effets sur les symptômes oculaires (fréquemment associés).
Les vasoconstricteurs n’ont pas d’AMM dans la RA. Une prescription de 3 à 5 jours est possible lorsque persiste une obstruction nasale invalidante malgré un traitement adapté. Ils peuvent être administrés seuls (oxymétazoline) ou associés à d’autres thérapeutiques telles qu’un corticoïde (oxymétazoline + prednisolone, naphazoline + prednisolone) ou un mucolytique (tuaminoheptane + N-acétylcystéine).
L’ipratropium, réservé à l’adulte, est uniquement indiqué dans le traitement d’appoint d’une rhinorrhée séromuqueuse d’une RA non infectée. Son utilisation expose, chez un sujet prédisposé, à un glaucome aigu par fermeture de l’angle en cas de projection accidentelle oculaire (effet parasympatholytique) ou à des effets atropiniques par absorption systémique.
Le cromoglicate de sodium (Alairgix, Cromorhinol, pas de limite inférieure d’âge) a une efficacité moindre que celle des glucocorticoïdes nasaux ou des antihistaminiques (irritation nasale en début de traitement).
L’action bénéfique de l’irrigation nasale (sérum physiologique ou solution saline) a été suggérée dans cette indication.
Encadre

Glucocorticoïdes nasaux : lutter contre les idées reçues

La corticophobie de certains patients n’est pas justifiée. En effet, les perturbations de l’axe hypothalamo-hypophysaire sont anecdotiques. Par ailleurs, ces traitements n’induisent pas d’atrophie nasale mais plutôt une régression des lésions épithéliales. Pas de risque d’élévation de la pression intra-oculaire et d’évolution ou d’aggravation d’un glaucome ou d’une cataracte. Aux posologies usuelles, en prise isolée, le risque de ralentissement de la croissance de l’enfant est faible. Une utilisation prolongée aurait un impact sur ce paramètre dans un essai, qui n’a pas été confirmé dans les grandes études prospectives.1, 2

Toute prescription chez l’enfant, surtout s’il a un asthme traité par glucocorticoïde inhalé, doit cependant rester prudente et tenir compte de la balance bénéfices/risques. Les seuls effets secondaires spécifiques (épistaxis, sécheresse, brûlure et irritation nasale) sont négligeables par rapport aux bénéfices cliniques, toutes indications confondues. Le risque de fracture iatrogène est nul.

à noter que les glucocorticoïdes sont contre-indiqués en cas d’infection locale, virale herpétique ou d’épistaxis récidivantes. Chez les sportifs, ils peuvent, comme les vasoconstricteurs sympathomimétiques, induire une réaction positive aux contrôles antidopage.

Références
1. Fokkens W, Lund V, Mullol J, et al. European Position Paper on Rhinosinusitis and Nasal Polyps. Rhinology 2012;45(suppl 20):1-139. https://bit.ly/2L5mhu1
2. Braun JJ, Devillier P, Wallaert B, et al. Recommandations pour le diagnostic et la prise en charge de la rhinite allergique (épidémiologie et physiopathologie exclues) – Texte long. Rev Mal Respir 2010;27:S79-S105. https://bit.ly/2TVAVrO
3. Ahmadi N, Snidvongs K, Kalish L, et al. Intranasal corticosteroids do not affect intraocular pressure or lens opacity: a systematic review of controlled trials. Rhinology 2015;53:290–302.
1. Fokkens W, Lund V, Mullol J, et al. European Position Paper on Rhinosinusitis and Nasal Polyps. Rhinology 2012;45(suppl 20):1-139. https://bit.ly/2L5mhu1
2. Braun JJ, Devillier P, Wallaert B, et al. Recommandations pour le diagnostic et la prise en charge de la rhinite allergique (épidémiologie et physiopathologie exclues) – Texte long. Rev Mal Respir 2010;27:S79-S105. https://bit.ly/2TVAVrO
3. Ahmadi N, Snidvongs K, Kalish L, et al. Intranasal corticosteroids do not affect intraocular pressure or lens opacity: a systematic review of controlled trials. Rhinology 2015;53:290–302.

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essentiel

Toute pathologie nasale chronique doit bénéficier d’une irrigation nasale quotidienne au sérum physiologique.

Les glucocorticoïdes locaux sont le traitement de référence.

Leur tolérance est bonne si les doses sont respectées.