L’arthrose de la base du pouce est fréquente après 50 ans. Les douleurs qu’elle cause et le retentissement fonctionnel peuvent être très invalidants. À l’heure actuelle, à part le port nocturne d’attelles thermomoulées, aucun traitement n’a démontré son efficacité avec un haut niveau de preuve. Une équipe française a évalué l’efficacité d’un nouveau traitement - l’injection intra-articulaire de Botox - avec de bons résultats.

L’arthrose digitale est une maladie fréquente, qui touche surtout les femmes après 45 ans. La rhizarthrose correspond à la dégradation de l’articulation de la base du pouce, le plus souvent au niveau de l’articulation trapézio-métacarpienne. 

Son expression clinique de la rhizarthrose est variable. La douleur siège à la base du pouce, au bord supéro-­externe de la main ; elle est habituellement mécanique, apparaissant à l’usage de la pince pollici-digitale, et très rarement inflammatoire, avec douleurs de repos et nocturnes. L’évolution est souvent marquée par l’alternance de crises douloureuses et de périodes d’accalmie. 

Les déformations sont tardives, le pouce en adduction et antéposition, qui accompagne souvent une déformation en console de la base du premier rayon. Douleur et gêne fonctionnelle limitent la préhension, ce qui peut se traduire par des lâchages d’objets. 

Le handicap peut être majeur est similaire, voire supérieur, à celui qu’entraîne une atteinte prédominante des IPD du 2e au 5e rayon.

Actuellement, à part le port nocturne d’attelles thermomoulée, aucun traitement, médicamenteux ou non pharmacologique, s’est montré efficace avec un haut niveau de preuvespour la douleur à court et moyen termes. En pratique, le traitement symptomatique des poussées douloureuses fait appel aux AINS, sous forme topique (ou par voie orale, après évaluation des bénéfies/risques) ; la pratique d’exercices d’assouplis­sement des doigts est également encouragée. Les injections de corticoïdes peuvent être proposées dans les phases aiguë et subaiguë, mais elles sont moins efficaces que dans la gonarthrose ; de plus, l’Eular (European Alliance of Associations for Rheumatology) ne recommande pas l’injection de corticoïdes dans l’arthrose de la main en général, sans trancher spécifiquement sur son usage dans les articulations interphalangiennes, compte tenu de l’absence de preuves.

Une équipe de l’hôpital Cochin (AP-HP) a étudié l’injection de toxine botulique de type A (Botox), qui est souvent utilisée pour ses effets parésiants mais dont les propriétés antinociceptives ont aussi été étudiées, ainsi que son effet inhibiteur sur certains neurotransmetteurs de la douleur. Leurs résultats viennent d’être publiés dans The Lancet Rheumatology.

Dans cet essai de phase III randomisé, contrôlé, en double aveugle, 60 patients ayant une arthrose douloureuse de la base du pouce ont été recrutés (âge moyen : 64,9 ans ; 78 % de femmes). À l’inclusion, leur douleur, mesurée sur une échelle numérique (de 0, pas de douleur à 100, douleur maximale), était en moyenne de 60 ; la durée des symptômes avait été en moyenne de 64 mois.

Les participants ont été assignés aléatoirement (1:1) pour recevoir une injection guidée par échographie soit de toxine botulique A (50 unités Allergan dans 1 mL de solution saline) soit de solution saline seule. Tous les patients devaient aussi porter une orthèse rigide sur mesure, de façon continue pendant les 48 heures suivant l’injection, puis toutes les nuits pendant 6 mois (traitement standard). 

Résultats : à 3 mois, la réduction de la douleur était significativement plus importante dans le groupe traité que dans le groupe contrôle : -25,7 points contre -9,7 points, par rapport à celle mesurée à l’inclusion (critère principal d’évaluation). Toutefois, aucune différence n’a été détectée sur des critères d’évaluation secondaires tels que des changements dans les limitations d’activités manuelles ou la prise d’antalgiques ou anti-inflammatoires, ni sur la réduction de la douleur à 6 mois (l’effet biologique de la toxine botulique s’estompe en effet classiquement après 3 mois).

Enfin, aucun événement indésirable grave n’a été observé.

Pour conclure, l’injection intra-articulaire de 50 unités de toxine botulique A, lorsqu’elle est associée au port d’une orthèse de repos rigide sur mesure, permettrait de réduire la douleur chez des patients souffrant de rhizarthrose. D’autres recherches sont nécessaires pour évaluer, par exemple, l’effet d’injections répétées sur la douleur et sur d’autres critères d’efficacité clinique.