Les progestatifs sont des médicaments utilisés dans diverses pathologies gynécologiques (endométriose, fibromes, règles particulièrement longues et/ou abondantes, troubles du cycle), dans le traitement hormonal substitutif (y compris ménopause), mais aussi en obstétrique (stérilité par insuffisance lutéale, avortements à répétition).
Trois progestatifs (Androcur, Lutenyl, Lutéran et génériques) ont déjà fait l’objet d’un changement des règles de prescription et renouvellement, après que des études épidémiologiques successives ont démontré un risque de méningiome associé à leur prise, qui augmente avec la dose reçue.
D’autres progestatifsont récemment été mis en cause dans la survenue de cas de méningiome, comme l’a montré la surveillance renforcée menée par l’ANSM sur l’ensemble de cette classe pharmacologique. Un comité scientifique temporaire (CST), composé de représentants de personnes traitées et de professionnels de santé, s’est donc réuni en janvier 2023. Il a estimé qu’un effet « classe » des progestatifs sur le risque de méningiomes ne peut être exclu et a donc établi des recommandations préliminaires sur les conditions d’utilisation des progestatifs autres que ceux à base d’acétate de cyprotérone, nomégestrol et chlormadinone, afin de limiter ce risque dans l’attente des résultats des études épidémiologiques menées par Épi-Phare qui permettront de confirmer ou d’infirmer ce risque (ces résultats devraient être disponibles prochainement).
Les recommandations préliminaires de l’ANSM concernent l’utilisation de la médrogestone (Colprone 5 mg), la progestérone 100 ou 200 mg (Utrogestan et génériques), la dydrogestérone (Duphaston 10 mg) et le diénogest (génériques de Visanne 2 mg) :
- en cas d’antécédent de méningiome ou de méningiome existant, l’introduction d’un traitement progestatif est contre-indiquée, sauf exception à évaluer en réunion de concertation pluridisciplinaire (constituée de gynécologue et/ou endocrinologue et neurochirurgien) sur la base du rapport bénéfice/risque individuel pour les personnes traitées et de la présence ou non d’alternatives thérapeutiques ;
- la prescription d’un nouveau progestatif en relais d’un traitement antérieur par acétate de cyprotérone, de chlormadinone ou de nomégestrol (Androcur, Lutenyl, Lutéran et génériques) n’exclut pas le risque de méningiome, sans que l’on puisse pour le moment le déterminer. Il est nécessaire, avant toute nouvelle prescription ou switch entre progestatifs, de vérifier l’ensemble des progestatifs déjà utilisés et leur durée d’utilisation ;
- le traitement doit être prescrit à la dose minimale efficace avec une durée d’utilisation la plus courte possible ;
- l’intérêt à poursuivre le traitement doit être réévalué régulièrement (tous les ans), notamment aux alentours de la ménopause, le risque de méningiome augmentant fortement avec l’âge ;
- une IRM cérébrale devra être réalisée en cas de signes cliniques neurologiques évocateurs d’un méningiome (maux de tête, troubles de la vision, du langage, de la mémoire et de l’audition, nausées, vertiges, convulsions, perte de l’odorat, faiblesse ou paralysie).
Enfin, le RCP et la notice de Colprone viennent d’être mis à jour afin d’y faire figurer le risque de méningiome. La progestérone à 100 mg et 200 mg étant également utilisée dans les autres pays de la communauté européenne, l’ANSM a aussi demandé que ce sujet fasse l’objet d’une discussion au comité européen de pharmacovigilance (PRAC). En effet, parmi les cas de méningiomes déclarés sous traitement progestatif, ceux rapportés avec la médrogestone (Colprone) et la progestérone à 100 mg et 200 mg (Utrogestan et génériques) sont particulièrement suggestifs d’un rôle de ces médicaments compte tenu de la stabilisation ou la régression tumorale à l’arrêt du traitement.