La sénescence cellulaire des tissus est un processus clé du vieillissement et des maladies chroniques liées à l’âge, qui cible de nombreux organes, dont le poumon, où il joue un rôle important dans la bronchopneumopathie chronique obstructive, la fibrose pulmonaire ou le cancer pulmonaire. Elle survient par deux mécanismes : l’érosion des télomères, que l’on appelle sénescence réplicative, et la sénescence prématurée par dommage direct de l’ADN, par exemple induite par le tabac ou la pollution. Ces deux mécanismes aboutissent à l’activation des gènes P53, P21, P16 avec entrée en sénescence de la cellule. Les cellules sénescentes s’accumulent avec l’âge. La sénescence induit une inflammation chronique cytokinique de l’environnement.L’idée qu’une infection virale respiratoire puisse provoquer la sénescence des cellules pulmonaires, et que celle-ci puisse être aggravée par des facteurs de comorbidité de l’hôte, émerge aujourd’hui comme un nouveau concept. Elle s’applique au virus de la grippe A, aux Lentivirus, à l’adeno-associated virus (AAV), au virus de la stomatite vésiculeuse (VSV) mais aussi, bien sûr, au SARS-CoV-2. La persistance de cellules pulmonaires sénescentes, longtemps après la disparition apparente de l’infection initiale par le SARS-CoV-2, pourrait entraîner une inflammation stérile chronique et favoriser ainsi le développement d’altérations pulmonaires chroniques à type de fibrose et d’emphysème pulmonaire. Les études les plus récentes montrent que si les cellules sénescentes sont initialement les cellules infectées par le SARS-CoV-2, des mécanismes paracrines semblent intervenir pour propager la sénescence et affecter la plupart des cellules constitutives du poumon. Les cellules endothéliales et les macrophages sont aussi touchés (rôle dans les phénomènes de thrombose vasculaire).Cette découverte récente ouvre la voie de nouvelles approches thérapeutiques par les sénolytiques dans un but de prévention des effets aigus ou à plus long terme des séquelles pulmonaires. D’autres approches font appel à l’immunothérapie, dirigées contre des protéines membranaires exprimées par les cellules sénescentes. Les premiers résultats suggèrent que l’élimination des cellules sénescentes réduit la destruction pulmonaire post-virale et l’installation de séquelles.
Serge Adnot, Inserm U955 et département de physiologie, hôpital Henri-Mondor, AP-HP, fédération hospitalo-universitaire Senec, Créteil ; université Paris-Est Créteil (Upec), France
8 novembre 2022