Selon une récente expertise collective de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), l’activité physique doit, désormais, être considérée comme un véritable médicament de prévention et de soin des maladies chroniques.
C’est aussi un changement de paradigme : haro sur la règle qui imposait le repos aux personnes souffrant de pathologies au long cours !
Les conclusions du groupe d’experts se fondent sur des données issues de la littérature scientifique spécialisée, soit près de 1 800 documents rassemblés en interrogeant Medline, PsycINFO, BDSP, Cochrane, Cairn, Saphir, Web of Sciences, Scopus... « Les études scientifiques montrent que, lorsqu’elle tient compte des recommandations de pratique et des complications liées à la pathologie, non seulement l’activité physique ne l’aggrave pas mais ses effets bénéfiques sont d’autant plus importants qu’elle est introduite tôt après le diagnostic », résume l’Inserm.
Traduction, l’activité physique doit faire partie intégrante du traitement des maladies chroniques. Sa prescription doit être systématique et aussi précoce que possible dans le parcours de soins. Il est également conseillé que l’activité physique « soit prescrite avant tout traitement médicamenteux pour la dépression légère à modérée, le diabète de type 2, l’obésité et l’artériopathie oblitérante des membres inférieurs ».
En pratique, les experts ont élaboré des recommandations spécifiques par pathologie.Ainsi pour l’obésité, l’accent est mis sur la diminution du tour de taille comme paramètre de suivi plutôt que sur la perte de poids. Chez le diabétique de type 2, l’objectif est d’associer renforcement musculaire et activités d’endurance. Dans les pathologies coronaires sont promus des exercices réguliers d’endurance à optimiser en jouant sur leur intensité. L’artériopathe, lui, devra marcher !
Après un AVC, il s’agit d’améliorer les capacités cardiorespiratoires et la force musculaire
Dans la BPCO, on s’attache à la qualité de vie et on réduit les limitations fonctionnelles par des moyens variés (endurance, renforcement musculaire, natation, tai chi…). Enfin, face à la dépression, le but est de prévenir les récidives et de soulager les symptômes « par des programmes combinant endurance et renforcement musculaire ».
Ainsi donc « Bouger plus ! »ne suffit pas. Il s’agit bel et bien, pour le médecin, de proposer des programmes personnalisés et bien dosés aux patients atteints de pathologies métaboliques, cardiovasculaires, pulmonaires, ostéoarticulaires, mentales ou cancéreuses. Prescrire une activité physique comme on le fait pour des médicaments ? C’est peut-être là que le bât blessera.
Certes l’article 114 de la loi du 26 janvier 2016, suivi d’un décret d’application (le 30 décembre 2016) et d’une instruction adressée aux agences régionales de santé précise les conditions de dispensation de l’activité physique par le médecin traitant, dispositif officiellement entré en vigueur le 1
mars 2017. Pour autant, deux ans plus tard, il est resté lettre morte.
Pourquoi ? On évoque le manque de formation des médecins et les coûts induits par cette activité, aucune prise en charge n’étant prévue par l’Assurance maladie. Bien loin du « médicament », c’est donc là (sauf en cas de financement par des collectivités territoriales, des mutuelles ou des associations) un reste à charge pour le malade. Jusqu’à quand ?
1. Activité physique. Prévention et traitement des maladies chroniques. Collection Expertise collective. EDP Sciences, 2019, 824 p, 70 euros.