Dans la maladie d’Alzheimer, il n’existe pour le moment aucun traitement permettant de modifier l’évolution du déclin cognitif des patients. Dans ce contexte, les traitements non pharmacologiques ont été étudiés, et ils incluent l’exercice physique, la stimulation cognitive, les modifications nutritives et la stimulation cérébrale non invasive transcrânienne. Ces thérapeutiques ont été souvent associées au traitement strict des comorbidités comme l’hypertension artérielle, le diabète, l’obésité ou l’hypercholestérolémie. Parmi ces techniques de stimulation transcrânienne, deux techniques ont fait l’objet d’études et d’essais cliniques avancés : la stimulation ­magnétique transcrânienne et la ­stimulation électrique transcrânienne directe par courant.1

Description et bases physiologiques

Stimulation magnétique transcrânienne

Cette technique de stimulation répétitive induit des impulsions brèves de courant électrique produit par un aimant puissant à fluctuation rapide. Les impulsions sont capables de ­dépolariser les membranes neuronales et de produire des potentiels d’action se propageant le long des axones. Si une région corticale motrice est stimulée, la stimulation magnétique transcrânienne induit des contractions musculaires dans les muscles correspondants. L’application à la cognition utilise des trains d’impulsions répétés qui peuvent produire des modifications de longue durée de l’excitabilité cérébrale. Des sessions quotidiennes de stimulation magnétique transcrânienne ont été préconisées par la Food and Drug Administration dans le traitement des dépressions résistantes ou dans les désordres compulsifs.

Stimulation électrique transcrânienne directe par courant

Elle produit un courant électrique passif faible entre deux électrodes, anode et cathode, placées sur la peau du crâne chez le patient. Souvent, on utilise un courant continu de faible intensité (de 1 à 2 mA) qui est capable de créer des gradients électriques induisant une modification de l’excitabilité corticale. L’anode produit une dépolarisation du potentiel de membrane neuronal alors que la cathode entraîne une hyperpolarisation de ce potentiel.
Deux revues récentes ont analysé les essais cliniques randomisés de ­ces deux techniques dans la maladie d’Alzheimer.1, 2

Résultats de la stimulation magnétique

Huit essais cliniques randomisés ont utilisé la stimulation magnétique transcrânienne dans la maladie ­d’Alzheimer ou les troubles cognitifs légers (mild cognitive impairment [MCI]). Les études ont regroupé quelques dizaines de patients au maximum. Elles ont comparé, chez les patients stimulés et les patients contrôles (stimulation simulée), les effets de la stimulation magnétique à des stades différents de la maladie d’Alzheimer sur l’évaluation cognitive. Elles ont souvent mis en évidence un effet bénéfique de la stimulation magnétique sur la cognition évaluée avant et quelque temps après les sessions. Une étude incluant 54 patients avec des formes modérées à sévères de maladie d’Alzheimer a stimulé le cortex préfrontal dorso-latéral gauche 5 jours par semaine pendant 4 semaines. Les résultats montrent une amélioration du score cognitif de l’Adas-Cog dans le groupe stimulé par rapport au groupe non stimulé. Une autre étude qui a inclus 45 patients a évalué les effets de la stimulation bilatérale à long terme (3 mois). Il existe dans le groupe stimulé une tendance à l’amélioration du mini mental state examination (MMSE) par rapport au groupe contrôle. Un essai clinique a évalué les effets de la stimulation magnétique transcrânienne associée à la stimulation cognitive chez 30 patients. Après six semaines, il a été noté une amélioration de l’Adas-Cog et du MMSE dans le groupe traité par rapport au groupe n’ayant reçu ni stimulation magnétique ni stimulation cognitive. Au total, même si on peut penser que certains résultats sont bénéfiques, des essais avec un plus grand nombre de patients et des protocoles précis de stimulation magnétique transcrânienne semblent nécessaires.

Résultats de la stimulation électrique

Quatre essais cliniques randomisés ont été publiés, utilisant la stimulation électrique transcrânienne directe par courant dans la maladie d’Alzheimer et une dans les troubles cognitifs ­légers, assez souvent avec quelques résultats encourageants mais un nombre limité de patients. Une étude comportant 34 patients atteints de maladie d’Alzheimer modérée à ­sévère a montré une amélioration du MMSE chez les patients stimulés avec l’anode ou la cathode, 25 minutes par jour pendant 10 jours, par rapport aux sujets ayant reçu une stimulation simulée. Une autre étude chez des patients atteints de troubles cognitifs légers a révélé une amé­lioration de la mémoire et de la tomographie cérébrale par émission de positons au fluorodésoxyglucose (TEP FDG). Enfin, un essai combinant stimulation électrique et stimulation cognitive est en cours.3

Nécessité d’essais plus importants

Des améliorations cognitives partielles ont été retrouvées avec les deux techniques de stimulation non invasive cérébrale. Malgré tout, des essais cliniques comportant un plus grand nombre de patients et des ­paramètres précis de stimulation sont à envisager afin de mieux connaître la place de ces techniques dans la prise en charge des patients atteints de maladie d’Alzheimer ou de troubles cognitifs légers, et pour définir le moment opportun dans l’évolution de la maladie. De même, les effets bénéfiques sur la cognition à très long terme sont à étudier ainsi que la place de ces méthodes lorsque des traitements pharmacologiques agissant sur l’évolution de la maladie seront approuvés. 
Références
1. Rajji TK. Transcranial magnetic and electrical stimulation in Alzheimer’s disease and mild cognitive impairment: a review of randomized controlled trials. Clin Pharmacol Ther 2019;106:776-80.
2. Buss SS, Fried PJ, Pascual-Leone A. Therapeutic noninvasive brain stimulation in Alzheimer’s disease and related dementias. Curr Opin Neurol 2019;32:292-304.
3. Andrade SM, de Oliveira EA, Alves NT, et al. Neurostimulation combined with cognitive intervention in Alzheimer’s disease (NeuroAD): study protocol of double-blind, randomized, factorial clinical trial. Front Aging Neurosci 2018;10:334.

Dans cet article

Ce contenu est exclusivement réservé aux abonnés