Sécheresse vaginale, brûlures vulvaires et douleurs génitales touchent de nombreuses femmes après la ménopause. Les dernières recos du CNGOF et du GEMVi ont fait le point sur l’efficacité et les risques des différents traitements disponibles en France, et sur la conduite à tenir chez les femmes ayant un antécédent de cancer du sein, traitées ou non par hormonothérapie.

Le syndrome génito-urinaire de la ménopause (SGUM) correspond à la nouvelle terminologie de l’atrophie vulvovaginale. Il comprend trois groupes de troubles, liés au vieillissement et à l’insuffisance œstrogénique : des symptômes vulvovaginaux : sécheresse (78 %), brûlures et irritation (30 %) ; des symptômes sexuels : dyspareunie (31 %) ; des signes urinaires : douleurs à la miction, infections à répétition (5 à 17 %), pollakiurie, nycturie, incontinence par urgenturie (15 à 35 % des femmes de plus de 60 ans). Un seul type de symptôme permet de poser le diagnostic.

La prévalence du SGUM serait de 27 % voire plus (50-70 %) selon certaines études. Des facteurs de risque du SGUM ont été identifiés : peu de rapports sexuels, nulliparité vaginale, chirurgie vaginale, tabagisme, abus d’alcool, consommation de drogues, obésité, diabète.

Mesures hygiénodiététiques : indispensables

Il faut recommander une hygiène simple (toilette vulvaire au savon moussant [savon de Marseille, gel douche]), en évitant les douches vaginales qui altèrent le microbiote ; l’arrêt du tabac ; l’entraînement de la musculature périnéale (exercices de Kegel).

L’activité sexuelle régulière augmente la vascularisation du vagin, donc l’apport de prostaglandines et d’acides gras, et entretient la souplesse des tissus. L’usage de dilatateurs vaginaux, avec lubrifiants, est également bénéfique.

Traitements non hormonaux : en 1re intention

Les lubrifiants sont utilisés pour soulager la sécheresse et l’inconfort vaginal au cours de l’activité sexuelle, en réduisant la friction contre les tissus génitaux amincis. Plusieurs variétés sont disponibles dans le commerce, à base d’eau, de silicone, de glycérine, d’huile minérale ou végétale. Les données ne démontrent pas de supériorité d’un des lubrifiants sur les autres. Mais attention : à utiliser à la demande lors des rapports sexuels, ils ont une action uniquement temporaire et n’apportent pas d’amélioration de la trophicité vaginale à long terme. Le pH de ces produits doit être < 4,5 et l’osmolarité < 380 mOsm/kg.

Les hydratants vaginaux sont utilisés pour traiter la sécheresse vaginale au quotidien ou pendant l’activité sexuelle. Ils ont pour objectif une amélioration des symptômes à long terme. Ils abaissent le pH vaginal et adhèrent à la muqueuse imitant ainsi les sécrétions vaginales naturelles. Ils sont disponibles sous forme de polymères synthétiques ou à base de plantes. En particulier, l’acide hyaluronique, du fait de ses propriétés hydratantes et cicatrisantes, a montré des effets significatifs dans plusieurs études cliniques, à raison d’une application 2-3 fois par semaine.

Ainsi, le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) et le Groupe d’étude sur la ménopause et le vieillissement (GEMVi) recommandent les lubrifiants et hydratants chez les femmes ayant des symptômes modérés du SGUM. Les produits disponibles en France sont cités dans le tableau 1.

Traitements hormonaux locaux

En cas d’effet insuffisant, les œstrogènes vaginaux à faible dose sont efficaces, tant pour les troubles vulvovaginaux que pour les signes urinaires.

Plusieurs produits sont disponibles (avec des formes galéniques multiples : ovule, anneau, crème, v. tableau 2), à base de :

– estradiol, diffusé à partir d’un anneau vaginal laissé 3 mois en place (Estring) ;

– estriol (Blissel, Physiogine, Gydrelle, Trophicrème), appliqué 2 fois par semaine ;

La DHEA (prastérone), commercialisée en France sous le nom d’Intrarosa, peut être prescrite quotidiennement pendant 3 mois.

Dans certains produits (Florgynal, Trophigil), les probiotiques sont adjoints à l’estriol dans le même ovule : leur action bénéfique repose sur la restauration de la flore vaginale et la diminution du pH.

Y a-t-il des risques associés à leur utilisation ?

En France, la concentration en œstrogènes dans ces produits est réduite. Le passage systémique est donc extrêmement faible : les taux sériques d’estradiol ne dépassent pas la zone normale (< 20 μg/mL) chez les femmes ménopausées.

Le risque de développer un cancer du sein lors d’un traitement par œstrogènes locaux au long cours a été longuement étudié lors de deux grandes cohortes prospectives observationnelles concernant 18 314 femmes suivies de 6 mois à 5 ans et 45 663 femmes suivies durant 7,2 ans (WHI). Aucune de ces études ne retrouvait de sur-risque de développer un cancer du sein.

Quant à l’effet sur l’endomètre, lorsque le traitement est prescrit à faible dose il n’y a pas d’hyperplasie endométriale ni de carcinome de l’endomètre décrits à 1 an (il n’y a donc pas d’indication de protection de l’endomètre par adjonction de progestérone lors de la prescription d’œstrogènes vaginaux à faible dose). Par ailleurs, la revue Cochrane de 2006 ne rapporte pas d’augmentation du risque thromboembolique en cas d’utilisation locale de ces produits. Cependant, les données disponibles actuellement ne permettent pas de conclure sur la sécurité d’utilisation à long terme (après 1 ou 2 ans).

Traitements oraux

Bien que pouvant être efficace sur les symptômes du SGUM, le traitement hormonal de la ménopause (THM) a un effet partiel et inconstant. En cas de persistance des symptômes malgré le traitement, un traitement local pourra être associé. Par ailleurs, ce dernier est à préférer au THM oral lorsque l’atrophie vulvovaginale est le seul symptôme.

La tibolone 2,5 mg a l’AMM depuis 2000 pour la prise en charge des symptômes liés à la carence œstrogénique chez les femmes ménopausées. Elle n’est pas recommandée car les données concernant son intérêt pour la prise en charge du SGUM sont limitées et de faible niveau de preuve.

Que prescrire en cas d’antécédents de cancer du sein ?

Le cancer du sein est le cancer le plus fréquent chez la femme. Grâce aux progrès thérapeutiques, son pronostic s’est nettement amélioré. Cependant, pour les cancers du sein dits « hormonodépendants » – traités par agonistes de la GnRH, tamoxifène, anti-aromatases, chimiothérapie –, les symptômes secondaires à la privation œstrogénique (dont le SGUM) ont des répercussions, à long terme, sur la qualité de vie des patientes. Les anti-aromatases, responsables d’une chute majeure des œstrogènes circulants (3 pmol/L), entraînent plus d’effets secondaires que le tamoxifène (16,3 % vs 8,4 %). Il faut donc mettre en balance les risques liés au cancer et la sévérité du SGUM.

En pratique, chez les femmes avec antécédent de cancer du sein, les schémas non hormonaux sont à privilégier. Les hydratants vaginaux (en raison de leur innocuité supposée) sont proposés en 1re ligne chez toutes les patientes atteintes de SGUM.

Mais que faire en cas d’échec ? Par principe de précaution, ces patientes se voient souvent refuser (ou refusent) une hormonothérapie locale. L’utilisation d’œstrogènes locaux est en effet sujette à caution même si les données actuelles à court terme ne semblent pas montrer de risque de récidive de cancer du sein lors de l’administration d’œstrogènes locaux à faible dose. Les sociétés américaines de ménopause (NAMS/ISSWSH) restent donc en faveur de ces traitements si les symptômes sont importants et les traitements non hormonaux inefficaces : des faibles doses de topiques œstrogéniques vaginaux (œstradiol, estriol ou promestriène), afin que les taux sanguins d’œstrogènes ne soient que pas ou peu modifiés. Ces traitements devront être prescrits pour la durée la plus courte possible après accord et information de la patiente.

En pratique, les sociétés savantes proposent de tenir compte du risque de récidive, de la sévérité des symptômes, de l’impact sur la qualité de vie et du choix de la patiente, selon les recommandations ci-dessous (encadré).

Encadre

Recos internationales de la prise en charge du SGUM après cancer du sein.

Recommandations générales : les lubrifiants et hydratants locaux, les vibromasseurs et les dilatateurs vaginaux sont des traitements de 1re ligne. L’accord de l’oncologue doit être demandé avant d’initier une hormonothérapie locale. L’ospémifène et les SERM (modulateurs sélectifs des récepteurs aux œstrogènes) n’ont pas été étudiés chez la femme à haut risque de cancer du sein et ne sont pas recommandés dans ce contexte.  Le laser doit être proposé aux femmes qui préfèrent une approche non hormonale.

Femmes à haut risque de cancer du sein. L’hormonothérapie locale est une option raisonnable chez les femmes pour qui le traitement non hormonal est un échec. Les études ne semblent pas montrer un risque augmenté de cancer du sein.

Femmes ayant une tumeur hormonodépendante traitée par tamoxifène. Les patientes ayant une symptomatologie sévère persistante malgré l’utilisation de traitement non hormonal et ayant un faible risque de récidive sont éligibles au traitement hormonal local.

Femmes avec une tumeur hormonodépendante traitée par anti-aromatases. Les patientes ayant une symptomatologie sévère non améliorée par les traitements non hormonaux peuvent tout de même bénéficier d’un traitement hormonal local après avis et accord de l’oncologue, et après avoir discuté d’un éventuel changement d’hormonothérapie pour le tamoxifène.

Femme avec une tumeur dite « triple négative ». En théorie, l’utilisation d’un traitement hormonal local semble raisonnable et donc possible chez ces patientes mais la littérature manque de données à ce sujet.

Femme ayant une atteinte métastatique de la pathologie. La qualité de vie et le confort doivent rester des priorités chez ces patientes L’utilisation d’une hormonothérapie locale dans ce cas et de son impact sur la survie doit être appréhendée différemment quand la qualité de vie est la priorité.

D'après : Faubion SS, Larkin LC, Stuenkel CA, Bachmann GA, et al. Management of genitourinary syndrome of menopause in women with or at high risk for breast cancer: consensus recommendations from The North American Menopause Society and The International Society for the Study of Women’s Sexual Health.  Menopause 2018;25(6):596-608.

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