Effet indésirable des neuroleptiques (mais aussi d’autres médicaments), il est d’installation rapide mais parfois difficile à distinguer d’une maladie de Parkinson avec laquelle il peut parfois coexister. Il disparaît à l’arrêt du traitement entre 6 et 12 mois.
Avec le développement des antipsychotiques dans les années 1950, le syndrome parkinsonien est apparu comme une complication fréquente de ce type de traitement, définissant le syndrome parkinsonien. Il est très vite constaté qu’un syndrome parkinsonien iatrogène pouvait être induit par d’autres médicaments tels que les antiémétiques, certains inhibiteurs calciques ou antidépresseurs…
Il existe quelques différences cliniques entre le syndrome parkinsonien iatrogène et la maladie de Parkinson, mais son diagnostic est difficile. Identifier le syndrome parkinsonien est important du fait de sa réversibilité après l’arrêt du médicament incriminé, et de l’inefficacité des traitements antiparkinsoniens. Certains examens d’imagerie nucléaire sont nécessaires pour différencier la maladie de Parkinson du syndrome parkinsonien iatrogène.

Épidémiologie du syndrome parkinsonien iatrogène

Le syndrome parkinsonien iatrogène est la cause la plus fréquente de syndrome parkinsonien, après la maladie de Parkinson.1 Sa prévalence varie entre 8 et 33 % car ce syndrome est souvent attribué à tort à une maladie de Parkinson. De plus, le syndrome parkinsonien iatrogène n’est pas systématiquement dissocié des autres complications neurologiques de ces traitements (avec une confusion dans le calcul de sa prévalence entre le syndrome parkinsonien iatrogène et les dyskinésies tardives induites par les neuroleptiques).
Plusieurs facteurs de risque à la survenue d’un syndrome parkinsonien ont été identifiés :2 l’âge, qui serait le facteur de risque le plus important ; le genre (les femmes seraient plus à risque) ; ainsi que probablement des facteurs génétiques.

Médicaments en cause

Les neuroleptiques classiques sont la cause la plus fréquente de syndrome parkinsonien iatrogène, mais il existe de nombreux autres traitements pouvant également être impliqués (v.tableau).

Neuroleptiques

Tous les antipsychotiques typiques ont été décrits comme pouvant entraîner un syndrome parkinsonien iatrogène, en bloquant les récepteurs dopaminergiques du striatum.
Pour les neuroleptiques atypiques, le risque n’est pas nul, même s’il est plus faible qu’avec les neuroleptiques classiques. Cette différence est liée à la plus grande affinité des neuroleptiques atypiques pour les récepteurs de la sérotonine que pour les récepteurs de la dopamine. Si la clozapine a été rarement incriminée dans la survenue d’un syndrome parkinsonien iatrogène, il n’en pas été de même pour les autres neuro­leptiques atypiques. La rispéridone a bien une affinité élevée pour des récepteurs de sérotonine, mais elle se lie aux récepteurs D2 de façon dépendante de la dose, induisant de ce fait un syndrome parkinsonien pour des posologies élevées.

« neuroleptiques cachés »

Ils possèdent une propriété antagoniste des récepteurs dopaminergiques, mais ne sont pas des traitements antipsychotiques.
Les prokinétiques à visée gastro-intestinale sont également associés au risque de syndrome parkinsonien. Ces médicaments sont utilisés pour traiter les troubles moteurs du tractus gastro-intestinal supérieur (en particulier la dyspepsie fonctionnelle et les vomissements). Leur effet prokinétique est médié par le blocage de récepteurs entériques D2. Leur effet antiémétique est lié également au blocage des récepteurs dopa­minergiques D2 dans l’area postrema du IVe ventricule où la barrière hémato-encéphalique est perméable. À l’exception de la dompéridone, ils peuvent tous passer la barrière hémato-­encéphalique et aller bloquer les récepteurs D2 au niveau du striatum.

Autres traitements

D’autres médicaments n’appartenant pas à la classe des antipsychotiques peuvent entraîner un syndrome parkinsonien.
Le lithium ou certains antiépileptiques (acide valproïque, phénytoïne) peuvent induire des syndromes parkinsoniens. Certains inhibiteurs calciques peuvent réduire la transmission de la dopamine ou agir directement sur des récepteurs de la dopamine.
Les bloqueurs de la libération de dopamine (tétrabénazine), médicaments utilisés pour traiter les mouvements choréiques iatrogènes (dyskinésies tardives des neuroleptiques) ou liés à la maladie de Huntington, peuvent entraîner un syndrome parkinsonien. Leur mode d’action est différent des précédents car ils agissent au niveau des neurones dopaminergiques présynaptiques en empêchant la libération de la dopamine (qui ne peut donc plus se fixer sur le neurone post-synaptique) et de la sérotonine (pouvant entraîner des syndromes dépressifs iatrogènes).

Caractéristiques cliniques

Cliniquement, il semble exister quelques différences entre le syndrome parkinsonien iatrogène et celui de la maladie de Parkinson.
Le syndrome parkinsonien iatrogène apparaît en général très rapidement après l’introduction du médicament, survenant parfois de façon aiguë ou subaiguë.
Le plus souvent, le syndrome parkinsonien iatrogène est bilatéral et symétrique (alors que dans la maladie de Parkinson, le syndrome est unilatéral au début et reste par la suite très asymétrique) ; la bradykinésie et la rigidité sont souvent plus marquées que dans la maladie de Parkinson débutante ;3 et il peut exister un tremblement de repos, mais souvent associé à un tremblement postural.
Cependant, chez 30 à 50 % des patients atteints, le syndrome parkinsonien est asymétrique et associé à un tremblement au repos.2, 3
Il existe également d’autres différences entre syndrome parkinsonien iatrogène et maladie de Parkinson : l’âge moyen au début des symptômes est plus élevé pour le syndrome parkinsonien iatrogène que pour les patients atteints de maladie de Parkinson (la médiane de survenue de la maladie étant de 58 ans) ; le syndrome parkinsonien iatrogène est plus fréquent chez les femmes, tandis que les hommes sont souvent atteints dans la maladie de Parkinson ; les dyskinésies bucco-linguo-faciales sont rares chez les patients naïfs de la prise de neuro­leptiques mais sont souvent associées au syndrome parkinsonien d’origine iatrogène ; le syndrome parkinsonien iatrogène n’est pas amélioré par les traitements dopaminergiques, contrairement aux symptômes de la maladie de Parkinson.
La confusion entre syndrome parkinsonien iatrogène et maladie de Parkinson est parfois réelle, car certains patients traités par neuroleptiques sont au stade préclinique de maladie de Parkinson (7 % des patients suivis dans des études longitudinales). Ils sont donc particulièrement exposés au risque de développer un syndrome parkinsonien sous ce type de traitement. Dans ce cas, la maladie de Parkinson est révélée par la prise du traitement. Deux cas de figure ont été observés : le syndrome parkinsonien persiste ou progresse même après l’arrêt du médicament ; le syndrome parkinsonien réapparaît plusieurs mois après la résolution complète du syndrome parkinsonien iatrogène à l’arrêt du traitement incriminé.

Un diagnostic clinique

Le diagnostic est clinique et repose sur :
– la présence d’un syndrome parkinsonien ;
– l’absence de syndrome parkinsonien avant l’utilisation du médicament ;
– le début (parfois aigu ou subaigu) des symptômes parkinsoniens pendant l’utilisation du médicament ;
– une résolution complète dans les 6 mois suivant le retrait de l’agent en cause. Il existe des cas de syndrome parkinsonien iatrogène persistant jusqu’à 12 mois après l’arrêt du traitement.
Mais cette définition n’est pas suffisante au diagnostic étiologique du fait de la possibilité d’avoir à la fois un syndrome parkinsonien iatrogène et une maladie de Parkinson. Dans ces cas, des examens d’imagerie nucléaire peuvent constituer une aide au diagnostic.4 La scintigraphie cérébrale marquant les protéines DAT (Dat-scan) peut faire la différence. Les protéines DAT sont des protéines présynaptiques, situées dans la mem­brane de la terminaison des neurones dopaminergiques au niveau du striatum où elles contrôlent la transmission dopaminergique (fig. 1). Dans le cas des maladies affectant la voie dopaminergique nigro-striée (la maladie de Parkinson, par exemple), il existe un défaut de fixation du radio­traceur alors que pour le syndrome parkinsonien iatrogène la fixation est normale (puisque le médicament agit en bloquant le récepteur dopaminergique post-synaptique) [fig. 2]. L’autre examen est la tomodensitométrie à émission de positons (TEP) marquée à la fluoro-Dopa qui va traduire le niveau d’activité enzymatique de la Dopa-décarboxylase. En cas d’atteinte de la voie dopaminergique présynaptique, il existe un défect de fixation du traceur au niveau du striatum alors que dans le cas du syndrome parkinsonien iatrogène la fixation est normale.
Plus récemment, des études soulèvent l’intérêt des imageries par résonance magnétique (IRM) à haut champ pour différencier la maladie de Parkinson du syndrome parkin­sonien iatrogène.5 Dans le cas de la maladie de Parkinson, la mise en évidence d’une anomalie au niveau du nigrosome 1 de la substance noire (signe dit « de l’hirondelle ») serait un bon marqueur diagnostique de cette pathologie (sensibilité : 100 %, spécificité : 85 %). Ce signe est absent dans les syndromes parkinsoniens iatrogènes (fig. 3). Ces résultats doivent être cependant vérifiés sur de plus grandes cohortes prospectives.

Quels traitements ?

L’arrêt du médicament en cause si possible est la meilleure solution. Cependant, cet arrêt est difficile chez les patients prenant des médicaments antipsychotiques en raison de leur maladie psychiatrique ; quand l’arrêt est impossible, le recours à des antipsychotiques atypiques est recommandé.
Dans tous les autres cas, l’arrêt du médicament incriminé est nécessaire, dès que possible.
Les anticholinergiques (comme par exemple le trihexyphénidyle) sont fréquemment utilisés pour leur capacité à soulager le syndrome parkinsonien iatrogène, mais cela ne repose sur aucune donnée scientifique de bonne qualité.

Souvent grave, handicapant et non reconnu

Le syndrome parkinsonien iatrogène est une cause fréquente de parkinsonisme et est souvent non reconnu ou mal diagnostiqué. Il peut être suffisamment grave pour affecter les activités quotidiennes. L’imagerie moléculaire tel que le Dat-scan peut être utile pour différencier les patients ayant un syndrome parkinsonien iatrogène et ceux débutant une maladie de Parkinson. Son traitement est avant tout préventif, les traitements potentiellement responsables de syndrome parkinsonien ne doivent être utilisés que dans des indications précises, par exemple la psychose ou la mélancolie délirante. Leur recours pour les troubles gastro-intestinaux, l’anxiété, l’insomnie doit être évité, en particulier chez les personnes âgées. 
Références
1. Munhoz RP, Werneck LC, Teive HA. The differential diagnoses of parkinsonism: findings from a cohort of 1528 patients and a 10 years comparison in tertiary movement disorders clinics. Clin Neurol Neurosurg 2010;12:431-5.
2. Shin HW, Sun AJ. Chung. Drug-Induced Parkinsonism. J Clin Neurol 2012;8:15-21.
3. Burkhard PR. Acute and subacute drug-induced movement disorders. Parkinsonism Relat Disord 2014;20(Suppl 1):S108-12.
4. Kägi G, Bhatia KP, Tolosa E. The role of DAT-SPECT in movement disorders. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2010;81:5-12.
5. Sung YH, Noh Y, Lee J, Kim EY. Drug-induced parkinsonism versus idiopathic Parkinson disease: utility of nigrosome 1 with 3-t imaging. Radiology 2016;279:849-58.

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