Tests de mémoire pour évaluer l’apprentissage de nouvelles informations
Le principe des tests de mémoire est de fournir des informations à une personne et de lui demander de les restituer. Selon les tests, cette restitution peut être demandée aussitôt après la présentation du matériel, ce qui met en jeu la mémoire à court terme, ou bien après une activité interférente (ayant pour but d’empêcher la récapitulation des informations) ou un délai d’une vingtaine de minutes en général, au cours duquel d’autres activités que des tests de mémoire sont proposées, ce qui implique alors la mémoire à long terme.
Tests fondés sur du matériel visuel
Tests utilisant du matériel verbal
– l’absence d’effet de répétition des essais signale un déficit des capacités d’apprentissage ;
– l’absence d’effet d’un traitement plus approfondi sur le matériel (par exemple, faire une phrase avec le mot plutôt que dire s’il rime avec un autre) signale une atteinte du processus d’encodage ;
– l’amélioration d’un faible score de rappel libre par la présentation d’indices suggère une atteinte du processus de récupération ;
– une diminution trop marquée du nombre de mots restitués après un délai signale une atteinte du processus de stockage ;
– la baisse du nombre de mots restitués ou l’intrusion de mots consécutive à la présentation d’une liste de mots proches signale une augmentation de la sensibilité à l’interférence.
Le RL/RI 165 est le test de mémoire verbale le plus souvent employé dans le monde francophone. Ce test, qui consiste en l’apprentissage répété d’une liste de seize mots, vise à distinguer les troubles authentiques de l’apprentissage des troubles apparents consécutifs à des déficits stratégiques de récupération. Ainsi, l’absence d’amélioration du score par la fourniture d’indices, ou encore la présence de mots n’appartenant pas à la liste initiale (« intrusions ») est en faveur d’un authentique trouble de la mémoire. Trois listes de mots6 ont été élaborées, permettant de refaire le test chez un même sujet pour mesurer l’évolution des performances au cours du temps en éliminant tout effet d’apprentissage. Ce test n’est pas toujours très sensible, en particulier chez les personnes de haut niveau d’éducation. Des tests plus sensibles, reposant sur le même principe mais comprenant davantage de mots comme le RI-48,7 ont été mis au point.
Le California verbal learning test8, qui consiste également en un apprentissage répété d’une liste de mots, comprend en outre la mémorisation parallèle d’une deuxième liste de mots permettant d’évaluer les effets d’inférences particulièrement sensibles aux troubles précoces de la mémoire.
D’autres tests permettent d’évaluer séparément les différents processus mnésiques : encodage, stockage et récupération, comme le paradigme ESR9 et sa version réduite,10 ou bien de tester des effets de la valence émotionnelle positive ou négative du matériel sur sa mémorisation, comme la MEMO.11,12 La passation de ces épreuves est assez longue (25 minutes en moyenne) et leur interprétation nécessite une formation en neuropsychologie.
Certaines épreuves ont un format plus réduit et ne requièrent qu’une courte formation. C’est le cas des épreuves de rappel d’histoire comme celle du Lion13 qui permettent, en outre, d’évaluer la dimension logique de la mémoire. Elles consistent à lire une courte histoire au sujet, qui doit l’écouter attentivement avant de la restituer. En plus du nombre de propositions correctement rappelées, ce type de test permet de mettre en évidence la présence de digressions, voire de confabulations, et d’évaluer les capacités de la personne à organiser un matériel complexe au travers de l’architecture de la narration produite.
Enfin, il existe des tests de dépistage de la présence de troubles importants de la mémoire verbale. Ces tests comme le memory impairment screen, disponible en version française14, ou le test des cinq mots,15 même s’ils ne permettent pas de statuer sur la nature des troubles de mémoire, sont particulièrement simples et rapides (moins de 5 minutes) à réaliser et à interpréter (
Évaluation de la mémoire prospective
Évaluation de la mémoire rétrograde
Évaluation globale de la mémoire
Certains tests sont conçus pour le dépistage
Deux tests simples
Le test des cinq mots de Dubois15 consiste à faire apprendre une liste de cinq mots (limonade, passoire, camion, musée et sauterelle) écrits sur une feuille. Les mots sont lus à haute voix par la personne examinée puis associés chacun à un indice correspondant à leur catégorie sémantique (boisson, ustensile de cuisine, véhicule, bâtiment, insecte). Immédiatement après cet encodage, un rappel libre (i.e. sans indice) est demandé et, pour les mots non rappelés spontanément, l’indice est proposé afin d’essayer de compléter la liste. Ce rappel immédiat permet de contrôler l’encodage qui doit être renouvelé pour les mots non rappelés. Après une activité intercurrente attentionnelle de trois à cinq minutes, la mémorisation est évaluée par un rappel libre complété si besoin d’un rappel indicé. Le score total (correspondant à la somme des rappels immédiat et après délai) de 10 est normalement attendu.
Contrairement au test des cinq mots, la procédure proposée dans le memory impairment screen14 ne contrôle pas l’encodage et accorde plus de points aux mots restitués en rappel libre (2 points) qu’à ceux en rappel indicé (1 point). Quatre mots présentés à l’écrit aux quatre coins d’une feuille doivent être appris. Comme dans le test des cinq mots, la personne examinée doit les lire et, à la demande de l’examinateur, les associer l’un après l’autre à une catégorie sémantique proposée. Après une tâche interférente de comptage à rebours de vingt secondes, un rappel immédiat suivi, si besoin, d’un rappel indicé sont demandés. Le score varie entre 0 et 8, et un score supérieur ou égal à 6 est attendu. Pour les personnes se plaignant de leur mémoire et un score au-dessous de ce seuil, un complément simple consistant à proposer de nouveau la procédure de rappel après dix minutes est recommandé. Aussi, est-il important de ne pas donner la réponse attendue et ne pas signaler la présence de mots n’appartenant pas à la liste lors du premier rappel. Pour le second rappel, un score inférieur ou égal à 6 constitue de la même façon un seuil d’alerte de troubles de la mémoire.
2. Signoret JL. Batterie d’efficience mnésique, BEM 144. Paris: Elsevier,1991.
3. Wallon P, Mesmin C. Test de la figure complexe de Rey. Paris: ECPA, 2009.
4. Barbeau E, Tramoni E, Joubert S, et al. Évaluation de la mémoire de reconnaissance visuelle : normalisation d’une nouvelle épreuve en choix forcé et utilité en neuropsychologie clinique. In: Van der Liden M, Adam S, Agniel A, et al. (eds.). L’évaluation des troubles de la mémoire. Présentation de quatre tests de mémoire épisodique (avec leur étalonnage). Marseille: Solal, 2008.
5. Van der Linden M, Coyette F, Poitrenaud J, et al. (2004). L’épreuve de rappel libre/rappel indicé à 16 items (RL/RI-16). In: Van der Liden M, Adam S, Agniel A et al. (eds.), L’évaluation des troubles de la mémoire. Présentation de quatre tests de mémoire épisodique (avec leur étalonnage). Marseille: Solal, 2008.
6. Stoykova R, Matharan F, Raoux N, Amieva H. Validation d’une troisième liste de mots pour l’épreuve rappel libre-rappel indicé à 16 items (RL-RI-16) : présentation de la liste C et étude de fidélité. Geriatr Psychol Neuropsychiatr Vieil 2013;11:317-22.
7. Adam S, Van der Linden M, Poitrenaud J, et al. L’épreuve de rappel indicé à 48 items (RI-48). In : Van der Liden M, Adam S, Agniel A et al. (eds.). L’évaluation des troubles de la mémoire. Présentation de quatre tests de mémoire épisodique (avec leur étalonnage). Marseille: Solal, 2008.
8. Poitrenaud J, Deweer B, Kalafat M, Van der Linden M. Adaptation en langue française du California Verbal Learning Test. Paris: ECPA, 2008.
9. Eustache F, Desgranges B, Lalevée C. L’évaluation clinique de la mémoire. Rev Neurol 1998;154:S18-32.
10. Eustache F, Laisney M, Lalevée C, Pelerin A, Perrotin A, Egret S, et al. Une nouvelle épreuve de mémoire épisodique : l’épreuve ESR-forme réduite (ESR-r), adaptée du paradigme ESR (encodage, stockage, récupération). Rev Neuropsychol 2015;7(3):217-25.
11. Desgranges B, Faraut E, Mondou A, Eustache F, Laisney M. La MEMO : évaluation de l’impact de l’émotion sur la mémorisation d’informations verbales en mémoire épisodique. Rev Neuropsychol 2018;10:257-63.
12. Laisney M, Pelerin A, Eustache F. Deux nouveaux indices évaluant l’effet de l’émotion sur la mémoire dans la MEMO : illustrations cliniques. Rev Neuropsychol 2023;15:39-44.
13. Croisile B. Histoire du Lion. In Hugonot-Diener L, Barbeau E, Michel BF, Thomas-Antérion C, Robert P (eds.). Tests et échelles de la maladie d’Alzheimer et des syndromes apparentés. Marseille: Solal, 2008.
14. de Rotrou J, Seux ML, Hanon O. Memory Impairment Screen (MIS et MIS D). In: Hugonot-Diener L, Barbeau E, Michel BF, Thomas-Antérion C, Roberty P (eds.). Tests et échelles de la maladie d’Alzheimer et des syndromes apparentés. Marseille : Solal, 2008.
15. Dubois B, Touchon J, Portet F, Ousset PJ, Vellas B, Michel B. « Les 5 mots », une épreuve simple et sensible pour le diagnostic de la maladie d’Alzheimer. La Presse Medicale 2002;31:1696-9.
16. Wechsler D. MEM-IV : échelle clinique de mémoire de Wechsler. Paris: ECPA, 2012.
17. Wilson BA, Greenfield E, Clare L et al. Rivermead behavioral memory test - Troisième édition. Paris: ECPA, 2010.
18. Lecouvey G, Morand A, Poissonnier A, Pelerin A, Ferreira da Silva L, de la Sayette V, et al. Une nouvelle épreuve de mémoire prospective : Mem-Pro clinic. Rev Neuropsychol 2021;13:43-58.
19. Becquet C, Quinette P, Eustache F, Desgranges B. Évaluation neuropsychologique de la mémoire épisodique. Rev Neuropsychol 2017;9:253-60.
20. Kopelman MD, Wilson BA, Baddeley AD. The autobiographical memory interview: A new assessment of autobiographical and personal semantic memory in amnesic patients. J Clin Exp Neuropsychol 1989;11(5):724-44.
21. Piolino P, Desgranges B, Eustache F. La mémoire autobiographique : théorie et pratique. Marseille: Solal, 2000.