Le trouble obsessionnel-compulsif est l’une des pathologies psychiatriques les plus répandues et handicapantes. Aujourd’hui, son traitement en France repose sur la thérapie cognitive et comportementale en association aux antidépresseurs, mais tous les patients ne sont pas répondeurs. Une nouvelle technique de neurostimulation est prometteuse dans ce domaine…

Le trouble obsessionnel-compulsif (TOC) est l’un des troubles psychiatriques les plus invalidants et répandus, selon l’OMS. Débutant tôt dans la vie, il tend à une évolution chronique, souvent handicapante ; il est pourtant sous-diagnostiqué et insuffisamment traité.

Ce trouble se caractérise par la présence d’obsessions – pensées ou images intrusives déplaisantes et persistantes, entraînant une détresse importante – associées souvent à des compulsions – comportements ou actes mentaux répétitifs que le patient se sent contraint de faire pour diminuer une angoisse liée à ces obsessions. Ce sont les deux critères clés du diagnostic de TOC, mais l’anxiété est aussi une plainte importante. Enfin, les comorbidités psychiatriques sont constatées chez 84 à 90 % de ces patients, les plus fréquentes étant les troubles dépressifs (30 %).

Quels traitements aujourd’hui ?

Le traitement des TOC peut faire appel soit à une thérapie comportementale et cognitive (TCC), soit à un traitement médicamenteux par antidépresseurs (inhibiteurs sélectifs de la recapture de la sérotonine en première intention ; tous ceux qui sont commercialisés en France ont une AMM dans cette indication), soit à l’association des deux.

Le choix de ces stratégies est fondé sur des caractéristiques individuelles (souhait du patient, sévérité du trouble, antécédents de réponse aux traitements, contre-indications aux antidépresseurs…).

Un traitement médicamenteux est souvent proposé quand les symptômes sont très intenses et handicapants, et nécessitent un soulagement à court ou moyen terme – le délai d’action des psychothérapies étant en général plus long (mois) –, mais ils aboutissent rarement à une réduction définitive des symptômes.

La TCC, quant à elle, a une efficacité démontrée dans de très nombreuses études, en comparaison avec des groupes contrôle ou aux médicaments de référence : 10 à 20 % de guérison et 50 à 60 % d’amélioration, avec des résultats stables à 1 an, 2 ans et 6 ans.

En pratique, la majorité des patients reçoivent à terme l’association médicaments-TCC ; la stabilité/amélioration des patients qui ont bénéficié de la TCC est meilleure que celle des patients sous médicaments seuls.

Stimulation cérébrale profonde : pour quels patients ? quelle efficacité ?

Une partie importante des patients souffrant de TOC ne répond cependant pas à ces thérapeutiques conventionnelles. Pour ces personnes, de nouvelles techniques de neuromodulation ont récemment vu le jour, dont la stimulation cérébrale profonde (SCP).

Cette dernière consiste en l’implantation chirurgicale d’électrodes cérébrales de manière précise dans une zone cible du cerveau. Ces électrodes sont connectées, via un câble sous la peau, à un neurostimulateur, placé en général au niveau pectoral, qui envoie des impulsions électriques dans la région déterminée du cerveau. Les paramètres sont réglés par un dispositif externe de manière non invasive, par électromagnétisme. Cette technique est utilisée en neurologie pour des pathologies comme la maladie de Parkinson, le tremblement essentiel et les dystonies.

Des progrès récents dans la compréhension de la physiopathologie du TOC ont permis d’envisager le traitement de ce trouble par une stimulation cérébrale focalisée (un rôle central a été attribué à la boucle orbito-fronto-striatale et ses connections aux structures limbiques).

En France, la SCP en psychiatrie relève encore de la recherche, alors que dans certains pays d’Europe (Allemagne, Pays-Bas) son intérêt thérapeutique dans les TOC est reconnu par les autorités de santé. Aux États-Unis, son application dans les TOC résistants a été acceptée dès 2009 par les autorités (FDA) à titre exceptionnel (usage compassionnel). Mais quelles sont aujourd’hui les preuves de son efficacité dans cette indication ?

Une revue systématique et méta-analyse récemment parue dans le BMJ tente de répondre à cette question. Elle a inclus 34 études (de 2005 à 2021), dont 9 randomisées, évaluant l’efficacité de la SCP sur la réduction de la sévérité des symptômes du TOC mesurée à l’aide de l’échelle d’évaluation Yale-Brown Obsessive-Compulsive Scale (Y-BOCS). Une bonne réponse à la thérapie était définie comme une réduction supérieure à 35 % à l’Y-BOCS ; la réduction des symptômes dépressifs associés était également mesurée avec des échelles standardisées. Ces études concernaient un total de 352 patients (âge moyen 41 ans ± 11 ans) ayant un TOC sévère (Y-BOCS moyen 34 ± 4) sans amélioration clinique significative en dépit de plusieurs traitements pharmacologiques et plusieurs heures de TCC.

La méta-analyse a montré une réduction moyenne de 14 points à l’Y-BOCS (équivalant à une réduction de 47 %). La durée médiane du suivi était de 24 mois ; au dernier suivi, 66 % des patients étaient considérés répondeurs complets au traitement par SCP. Les auteurs concluent ainsi qu’il existe des preuves solides pour l’utilisation de la SCP dans les TOC résistants, chez des patients sélectionnés de manière appropriée.

Les effets indésirables graves étaient : un tiers des patients en a reporté au moins un, dont : complications liées au dispositif (dommages ou mauvais placement : 8 %), infections post-opératoires (4 %), convulsions post-opératoires (3,6 %), hémorragies intracrâniennes post-opératoires (1,6 %), tentatives de suicide (2,4 %).

Reste à savoir s’il existe des cibles cérébrales plus prometteuses que d’autres – plusieurs sont à l’étude (bras antérieur de la capsule interne, partie ventrale de la capsule interne et du striatum (VC/VS), noyau accumbens (NAc), strie terminale, noyau subthalamique (NST), pédoncule thalamique inférieur) –, ou si la stimulation de telle ou telle cible agit plus précisément sur un symptôme particulier du trouble (vérification, lavage, etc.).

Pour en savoir plus
Gadot R, Najera R, Hirani S, et al. Efficacy of deep brain stimulation for treatment-resistant obsessive-compulsive disorder: systematic review and meta-analysis.  J Neurol Neurosurg Psychiatr 7 octobre 2022.
À lire aussi :
Élaboré selon les conseils du Pr Luc Mallet. Dossier : trouble obsessionnel-compulsif.  Rev Prat 2020;70(7);773.
Polosan M. Stimulation cérébrale profonde en psychiatrie : quelles indications ?  Rev Prat Med Gen 2019;33(1018);256-7.

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