Quels risques ?
Dès mai 2022, à la suite de la publication d’une étude dans le JAMA, l’ANSM avait émis une alerte rappelant les règles d’utilisation de cet antiépileptique pour les femmes concernées (v. encadré ci-dessous).
Cette étude a évalué le risque de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants exposés aux antiépileptiques pendant la grossesse. En s’appuyant sur plusieurs registres nordiques (Suède, Norvège, Finlande, Danemark, et Islande) à partir de données colligées entre 1996 et 2017, l’analyse a inclus un total de près de 4,5 millions de mères-enfants dont 24 825 enfants exposés in utero à au moins un médicament antiépileptique et suivis en moyenne jusqu'à leur 8e année.
Les résultats de cette large étude épidémiologique mettent en évidence un risque de survenue de troubles du spectre autistique multiplié par un facteur 2,77 et de déficience intellectuelle multiplié par 3,47, chez les enfants dont la mère atteinte d’épilepsie a été exposée au topiramate en monothérapie durant sa grossesse, par rapport à ceux dont la mère atteinte d’épilepsie n’a pas été exposée à un traitement antiépileptique.
L’extrapolation des résultats de cette étude à la population française permet d’estimer :
- Un risque de survenue de troubles du spectre autistique qui se situe entre 2 et 6 %.
- Un risque de survenue d’une déficience intellectuelle qui se situe entre 1 et 8 %.
De plus, le topiramate est un médicament tératogène exposant, en cas de grossesse, à un risque élevé de malformations majeures multiplié par 3, dont des fentes labiales et palatines, des hypospadias et des microcéphalies. Selon les dernières études, le risque observé de malformations majeures s’élève jusqu’à 8,2 %.
Il est associé également un risque augmenté de petit poids à la naissance du nouveau-né.
Nouvelles règles de prescription et délivrance
La prescription initiale annuelle et le renouvellement sont désormais réservés aux spécialistes en neurologie ou en pédiatrie (la prescription depuis le 2 novembre 2022, et le renouvellement depuis le 2 mai 2023).
Une première prescription devra s’accompagner du recueil de l’accord de soins de la patiente (ou de son représentant légal) par le médecin, après information complète de la patiente.
La dispensation sera conditionnée à la présentation de ce formulaire annuel d’accord de soins, cosigné par la patiente et le médecin spécialiste, et de l’ordonnance annuelle établie par ce dernier.
Topiramate : contre-indications et règles d’utilisation
Chez la femme enceinte ou en âge d’avoir des enfants et n’utilisant pas de méthode de contraception hautement efficace, le topiramate :
- ne doit pas être utilisé dans l’épilepsie sauf en cas de nécessité absolue (inefficacité des autres traitements ou intolérance aux autres traitements) ;
- ne doit pas être utilisé dans la migraine ;
- ne doit pas être utilisé dans toute autre situation hors de l’autorisation de mise sur le marché.
En pratique :
- Ne pas prescrire de topiramate chez une patiente enceinte atteinte de migraine.
- Ne pas prescrire de topiramate chez une patiente enceinte atteinte d’épilepsie sauf si le bénéfice pour la mère l’emporte clairement sur les risques pour l’enfant à naître ; dans ce cas, informer pleinement la patiente sur les risques de malformation et le risque de troubles neurodéveloppementaux pour son futur enfant en cas de grossesse, de même que sur les risques d’une épilepsie incontrôlée pendant la grossesse ; une surveillance prénatale étroite devra être mise en œuvre. Chez les patientes enceintes déjà sous traitement par topiramate, un arrêt brutal doit être évité car il peut conduire à la recrudescence des crises, ce qui pourrait avoir de graves conséquences pour la femme et l’enfant à naître.
- Chez les femmes en âge de procréer, envisager des alternatives thérapeutiques en 1re intention ;
- Si le topiramate doit être prescrit à une femme en âge de procréer :
– l’informer pleinement sur les risques de malformation et de troubles neurodéveloppementaux pour son futur enfant en cas de grossesse, de même que sur les risques d’une épilepsie incontrôlée pendant la grossesse ;
– l’informer des risques d’un arrêt brutal du traitement et rappeler la nécessité de contacter rapidement un médecin en cas de projet de grossesse ou de survenue d’une grossesse ;
– s’assurer qu’elle utilise une méthode de contraception méthode de contraception hautement efficace. Pour rappel, le topiramate diminue l’efficacité des contraceptifs oestro-progestatifs.
ANSM. Topiramate et risques chez les enfants exposés pendant la grossesse : modification des conditions de prescription et de délivrance aux femmes concernées. 6 octobre 2022 (mis à jour le 2 mai 2023).
ANSM. Topiramate : risque de troubles neurodéveloppementaux chez les enfants exposés in utero et rappel des règles d’utilisation chez les femmes. 29 juin 2022.
Lettre aux professionnels de santé : https://ansm.sante.fr/uploads/2022/10/06/20221006-dhpc-topiramate-et-grossesse-28-09-2022.pdf
Formulaire annuel d’accord de soins : https://ansm.sante.fr/uploads/2022/10/06/topiramate-formulaire-daccord-de-soin.pdf