Usages de plus en plus diversifiés, étayés par les données scientifiques et l’expérience médicale, au-delà des indications de l’AMM.*
En première ligne dans certains troubles du mouvement dont les dystonies (blépharospasme*, torticolis*), le spasme hémifacial*.
Largement prescrite, associée à la rééducation et aux thérapies médicamenteuses, en cas d’hypertonie musculaire, de spasticité* des membres supérieurs ou inférieurs, chez l’adulte et l’enfant.
Mais aussi : dystonies laryngées, oromandibulaires, des membres supérieurs… ; hypersalivation, hyperactivité vésicale.*
Elle requiert une solide expérience clinique : bien identifier les indications, reconnaître les muscles concernés, déterminer doses et intervalles d’injections, surveiller les effets secondaires.
Principe thérapeutique
– abobotulinum toxine A (Dysport) ;
– onabotulinum toxine A (Botox) ;
– incobotulinum toxine A (Xeomin).
Les anticorps antitoxine étant rarement retrouvés (< 1 à 5 %).
Pas d’équivalences de doses « officielles » mais, forts de leur expérience et des consensus, les médecins injecteurs les utilisent dans de très bonnes conditions de sécurité et d’efficacité.
Mode d’action :bloque la jonction neuromusculaire et crée de manière temporaire et réversible une « dénervation chimique » qui diminue la puissance de contraction du muscle ciblé. Résultat : motricité plus harmonieuse et plus fonctionnelle, correction des mouvements et postures anormaux.
Délai d’action :
–de quelques jours à 1 semaine ; durée : environ 3 mois, avec un pic d’efficacité autour de 1 mois ;
– puis l’effet s’estompe (récupération de la force musculaire) et le muscle retrouve sa trophicité et son activité excessive ;
– des intervalles d’injection courts (< 12 semaines), permettent de pérenniser l’effet d’une injection à la suivante.
Bénéfices :
– dépendent de l’indication, du bon choix des muscles selon le trouble ;
– il est recommandé de faire un repérage EMG (électromyogramme) lors de l’injection couplé ou non à l’échographie (repérage des vaisseaux/nerfs, précision du ciblage des muscles).
Résultats à long terme prouvés dans le blépharospasme, le spasme hémifacial, le torticolis spasmodique.
Prise en charge globale
Traitement médicamenteux (dystonie : anticholinergiques, benzodiazépine ; spasticité : baclofène) et prise en charge psychologique (retentissement des troubles) et sociale (demande de prise en charge à 100 % pour la pathologie, adaptation du poste de travail si nécessaire).
Effets secondaires
Adapter les doses ou l’intervalle entre les injections.
Résistance
Parfois, diminution de l’effet liée à une modification du pattern de la dystonie (plus de muscles impliqués que de points d’injections possibles) => on propose un traitement de 2e ligne (stimulation cérébrale profonde) ou une approche plus « ciblée » couplant EMG et échographie, et une réévaluation du choix des muscles injectés ou de la dose utilisée.
Autres applications
Salivations/bavages excessifs (injections dans les glandes salivaires parotides, sous-mandibulaires) dans la maladie de Parkinson ou apparentée.
Spasmes des muscles lisses : en gastroentérologie (œsophage) ou en urologie (hyperactivité vésicale associée ou non à une vessie neurogène).
Certaines céphalées de tension musculaire (potentialité antalgique : la TB agit sur les fibres C de sensibilité/douleurs).
Contractures musculaires localisées : par exemple pour faciliter l’habillage et l’ouverture du bras (dans les adducteurs du membre supérieur, grand pectoral ; AVC, SEP) ou des membres inférieurs lors de la toilette (SEP) ; permettre le positionnement d’un membre (fléchisseurs des doigts) ; limiter la rétraction tendineuse après un AVC ; en cas de pied équin… (post-AVC, SEP, paraparésie spastique).
Modalités pratiques
Forfaits de soins prévus par l’État pour les injections : une partie peut être prise en charge par la Sécurité sociale, une part revient à la mutuelle ou est à la charge du patient.
Certaines indications sont prises en charge à 100 % comme la spasticité post-AVC ; la demande de 100 % à titre d’exception (dystonies) est possible mais n’est pas toujours obtenue, dépend de facteurs multiples dont la gravité du trouble.
Contre-indications : rares
Troubles de la coagulation (thrombopénie ou thrombopathie grave) et prise d’anticoagulants (risque d’hématome ou saignement lors des injections).
Grossesse ; toutefois des injections à faibles doses, pour des formes très graves et douloureuses de dystonies, peuvent être discutées au 3e trimestre (dans des centres expérimentés).
Toxine botulique : que dire aux patients ?
Expliquer la pathologie, les avantages et les limites de l’utilisation de la toxine botulique.
éclairer sur les produits disponibles, le recul acquis et les données de la littérature ; bien définir les objectifs (communs au soignant et au patient) et informer sur le délai et la durée d’action et la nécessité de répéter et d’adapter les injections, les méthodes (EMG, échographie), les approches complémentaires (kinésithérapie, auto-exercices).
Démystifier le mot « toxine » qui a une connotation péjorative et réexpliquer, rassurer et dédramatiser un éventuel effet secondaire (réversible) ou une réponse incomplète.
Communiquer les coordonnées des associations : AMADYS pour la dystonie, France Parkinson, France AVC (liste non exhaustive).
L’essentiel
Bien connaître les indications, les bénéfices et les limites de l’usage de la toxine botulique permet de mieux orienter certains patients, en particulier en cas de maladies rares (dystonies) encore trop souvent méconnues et pour lesquelles les centres de référence nationaux maladies rares ont été créés.
Ce traitement local et réversible facilite le quotidien de nombreux patients (post-AVC, etc.), et permet une amélioration fonctionnelle.
– Castelão M, Marques RE, Duarte GS, et al. Botulinum toxin type A therapy for cervical dystonia. Cochrane Database Syst Rev 2017;12(12):CD003633.
– Simpson DM, Hallett M, Ashman EJ, et al. Practice guideline update summary: Botulinum neurotoxin for the treatment of blepharospasm, cervical dystonia, adult spasticity, and headache: Report of the Guideline Development Subcommittee of the American Academy of Neurology. Neurology 2016;86:1818-26.
– Contarino MF, Van Den Dool J, Balash Y, et al. Clinical Practice: Evidence-Based Recommendations for the Treatment of Cervical Dystonia with Botulinum Toxin. Front Neurol 2017;8:35.