Les trampolines pour les enfants, que ce soit à domicile ou dans des parcs dédiés, sont en plein essor. Si les accidents font régulièrement l’objet d’une prise en charge aux urgences, surtout pendant l’été, leur fréquence et leur gravité sont peu décrites. Quel bilan aujourd’hui ? Quels sont les facteurs de risque ? Quels sont les traumatismes les plus courants ? Quels conseils de prévention ?

De plus en plus de trampolines… et d’accidents

Des données provenant notamment des États-Unis font état d’une augmentation de l’incidence des fractures liées aux accidents de trampoline. Ainsi, une étude publiée dans Pediatrics en 2020, s’appuyant sur la base de données du National Electronic Injury Surveillance System (NEISS), a estimé que l’incidence de ces lésions chez les enfants et adolescents (jusqu’à 17 ans) avait significativement augmenté entre 2008 et 2017, passant de 35,5 pour 100 000 personnes-années à 53,0 pour 100 000 personnes-années. Cela correspondait à une augmentation moyenne annuelle de 3,85 % au cours de la période. Les auteurs ont estimé que les fractures liées aux accidents de trampoline représentaient 6,16 % des fractures pédiatriques vues aux urgences en 2017, contre 3,59 % en 2008. De plus, la part des accidents survenant dans les aires de jeux a augmentée de 5 fois entre 2008 et 2017, ce qui reflète l’essor des « parcs à trampolines » (multipliés par 30 entre 2011 et 2018 dans le monde), même si les accidents liés aux trampolines à domicile restent majoritaires.

Une autre étude, se fondant également sur la base de données NEISS, a révélé une multiplication par 12 des visites aux urgences liées à des accidents de trampoline survenus dans les aires de jeux entre 2010 et 2014 – alors que, sur la même période, le nombre de celles liées aux accidents de trampoline survenus à domicile est resté stable.

En France, les dernières données d’envergure nationale concernent la période 2004 - 2014. Recueillies grâce à l’Enquête permanente sur les accidents de la vie courante (EPAC), qui enregistre les recours aux urgences pour accident de la vie courante dans treize hôpitaux de métropole et un à La Réunion, elles montrent déjà pour cette période une augmentation de la fréquence des accidents de trampoline nécessitant un recours aux urgences

Entre 2004 et 2014, l’EPAC a enregistré un total de 4 154 accidents liés à l’usage de trampolines (soit 714 pour 100 000 accidents de la vie courante) ; le taux d’hospitalisation était de 8 % chez les garçons contre 6 % chez les filles. L’augmentation des accidents a surtout concerné les trampolines à usage domestique et les enfants de 5 - 9 ans (les accidents étaient 18 fois plus fréquents en 2014 qu’en 2004 dans cette tranche d’âge). Ils sont survenus majoritairement entre avril et août (64 %).

Cette saisonnalité a également été retrouvée dans une étude prospective récente qui a évalué les blessures graves liées aux accidents de trampoline ayant fait l’objet d’une visite aux urgences au CHU de Besançon en 2019 - 2020 (58 % entre mai et août). Elle est cohérente avec les données de la littérature concernant d’autres pays.

Quels facteurs de risque ?

L’âge entre 5 et 9 ans et le sexe féminin sont souvent cités comme les principaux facteurs de risque. Dans l’enquête EPAC en France, ces accidents touchaient en effet plus souvent les enfants de cette classe d’âge, avec un sex ratio garçons/filles = 0,84. Selon les données américaines du NIESS, les fractures survenues dans ce contexte étaient aussi plus fréquentes chez les 5 - 9 ans. Des études plus anciennes étayent également ces données.

La présence simultanée de plusieurs enfants sur le trampoline est un important facteur de risque d’accidents et traumatismes. Dans une étude conduite au CHU de Rennes, par exemple, 73 % des accidents étaient liés à la présence de plusieurs enfants sur le trampoline, et, dans ces cas, l’enfant lésé était toujours le plus jeune et de petite taille. Des modélisations biomécaniques ont en effet montré que lorsque deux personnes de masses différentes utilisent en même temps un trampoline, il y a un transfert d’énergie cinétique de la masse la plus importante vers la plus petite, en particulier lorsque le rebond des deux n’est pas en phase. Cela augmente la charge sur les os et les articulations de la personne ayant la plus faible masse, générant un plus grand risque de traumatismes.

L’absence de supervision parentale est également un facteur de risque d’accidents.

Quels types de lésions ?

Elles sont variées et dépendent de plusieurs facteurs : âge, type de chute, voire localisation du trampoline (domicile ou parc)… Les données recueillies en France par l’EPAC montraient, par exemple, que les membres inférieurs étaient atteints dans 53 % des cas, les membres supérieurs dans 26 % des cas, le tronc dans 12 % et la tête dans 9 % des cas.

Les fractures se situaient surtout au niveau des membres supérieurs (55 % dans l’EPAC, 56 % selon les données du NIESS, 67 % selon l’étude de l’hôpital de Besançon...), alors que les membres inférieurs étaient plus volontiers touchés par entorses et contusions (respectivement 46 % et 29 % des cas selon les données de l’EPAC) et la tête et le tronc par contusions et plaies. Selon une autre étude américaine, les lésions musculosquelettiques et les contusions sont plus fréquentes chez les adolescents que chez les plus jeunes enfants, alors que les enfants en bas âge sont plus sujets aux lésions des tissus mous.

Par ailleurs, selon une méta-analyse récente incluant 11 études internationales (plus de 1 million de lésions documentées), les accidents de trampoline survenus dans les aires de sport et de jeux donneraient lieu à des lésions plus sévères que celles survenues à domicile : risque augmenté de traumatismes musculosquelettiques et/ou orthopédiques (OR = 2,45 ; IC95 % : 1,66 - 3,61), d’atteintes des membres inférieurs (OR = 2,81 ; IC95 % : 1,99 - 3,97), d’entorses (OR = 1,64 ; IC95 % : 1,36 - 1,97) et de recours à la chirurgie (OR = 1,89 ; IC95 % : 1,37 - 2,60). Cette augmentation de la gravité serait due au fait que les trampolines des aires de jeux, plus « tendus », entraînent un rebond plus fort qui amplifie la charge sur les os et les ligaments. En revanche, les lésions des membres supérieurs, les contusions et les lacérations sont plus fréquentes à domicile, les chutes du trampoline étant plus fréquentes dans ce contexte. Dans cette étude, l’âge plus avancé (préadolescence et adolescence) était associé à un risque accru de lésions dans les aires de sports et de jeux, ce qui pourrait être dû à une plus grande tendance à la prise de risque (sauts périlleux...).

Quels conseils de prévention ?

Des recommandations de prévention concernant l’usage des trampolines ont été émises notamment aux États-Unis par l’American Academy of Pediatrics (AAP), en 1999, mises à jour en 2012 à la suite de la hausse du nombre d’accidents, et en France par la Commission de sécurité du consommateur :

  • s’assurer que les trampolines sont équipés de protections adéquates, en bon état et placées de manière appropriée, que le trampoline est placé sur une surface plane et dans une zone dégagée de tout danger environnant ;
  • la supervision d’un adulte est obligatoire ;
  • les enfants < 6 ans ne doivent pas utiliser les trampolines ;
  • un seul enfant à la fois sur le trampoline ;
  • ne pas sauter pour monter ou descendre du trampoline ;
  • ne pas faire de salto ou de saut périlleux (particulièrement à risque de lésions cervicales graves) ;
  • limiter le temps de jeu sur le trampoline.

Enfin, l’utilisation de trampolines à domicile est déconseillée par l’AAP.

Pour en savoir plus
Santé publique France. Accidents liés aux trampolines en France métropolitaine : 2004-2014. Données de l’Enquête permanente sur les accidents de la vie courante. 14 juin 2019.
Briskin S, LaBotz M. Trampoline Safety in Childhood and Adolescence.  Pediatrics 2012;130(4):774-9.
Menelaws S, Bogacz AR, Drew T, et al. Trampoline-related injuries in children: a preliminary biomechanical model of multiple users. Emergency Medecine Journal 2011;28:594-8.
Hadley-Miller N, Carry PM, Brazell CJ, et al. Trends in Trampoline Fractures: 2008–2017.  Pediatrics 2020;145(1):e20190889.
Runtz A, Nallet J, Font V, et al. Trampoline injuries in children: A prospective study.  Orthop Traumatol-Surg Res 2022;108(6):103289.
Meyerber M, Fraisse B, Dhalluin T, et al. Trampoline injuries compared with other child activities.  Archives de Pédiatrie 2019;26(5):282-4.
Nunez C, Eslick GD, Elliott EJ. Trampoline centre injuries in children and adolescents: a systematic review and meta-analysis.  Inj Prev 2022;28(5):440-5.
Hussein MH, Toreih AA, Attia AS, et al. Trampoline Injuries in Children and Adolescents.  Pediatric Emergency Care 2022;38(2);e894-9.

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