Les troubles musculosquelettiques (TMS) sont la première cause de morbidité liée au travail et de maladies professionnelles indemnisées. Santé publique France a publié l’état des lieux en France : prévalence, profils des patients, secteurs d’activité à risque, interventions chirurgicales…

De premières estimations de la prévalence des TMS au niveau national en population générale, en fonction de caractéristiques démographiques et socioprofessionnelles, avaient été publiées en 2016. L’étude avait puisé dans les données de la cohorte Constances, constituée de volontaires tirés au sort et âgés de 18 à 69 ans à l’inclusion. L’échantillon avait inclus 28 914 personnes âgées de 30 à 69 ans, incluses entre 2012 et 2014, dont 8 998 hommes et 10 218 femmes se déclarant en activité professionnelle. Dans cette cohorte, la prévalence des douleurs persistantes au niveau du dos (les plus fréquentes des TMS) était, dans la population active, de 24 % pour les hommes et 29 % pour les femmes ; et, dans la population inactive, de 32 % pour les hommes et 35 % pour les femmes.

Aujourd’hui, Santé publique France publiepour la première fois des résultats nationaux de prévalence des TMS, dans la population générale, dans la population active occupée et selon le secteur d’activité et la profession. Ces données sont issues du Baromètre Santé 2021 (enquête téléphonique réalisée par sondage aléatoire). De nouveaux résultats concernant les indicateurs annuels de surveillance du syndrome du canal carpien et de la hernie discale lombaire ont aussi été dévoilés (v. encadré).

Le Baromètre a inclus 24 514 personnes âgées de 18 à 64 ans, interrogées entre le 11 février et le 15 décembre 2021 sur la souffrance pour TMS auto-déclarée au cours des 12 mois précédents. Deux sous-échantillons ont été utilisés pour l’étude :

  • 18 298 personnes constituant un échantillon représentatif de la population générale résidant en France métropolitaine ;
  • 13 093 personnes exerçant une activité professionnelle.

Les prévalences ont été calculées pour deux grandes catégories de TMS : ceux du dos et ceux du membre supérieur et cinq sous-catégories (lombalgie hors sciatique, douleurs sciatiques, TMS de l’épaule, TMS du coude et syndrome du canal carpien), séparément pour chaque sexe.

Les TMS du dos touchent la moitié de la population générale après 30 ans

Dans l’ensemble de la population française de 18 à 64 ans, la prévalence globale des TMS du dos et des membres supérieurs était de 58 % chez les femmes et 51 % chez les hommes.

Les TMS du dos étaient les plus fréquents, avec une prévalence de 47 % chez les femmes et 40 % chez les hommes, contre 30 % (F) et 27 % (H) pour les TMS du membre supérieur.

Parmi les TMS du dos, les lombalgies hors sciatiques étaient les plus souvent déclarées : 39 % et 35 % respectivement, versus 23 % et 15 % pour les douleurs sciatiques. Quant aux TMS du membre supérieur, la prévalence des TMS de l’épaule était supérieure à celles du coude et du syndrome du canal carpien : 19 % (F) et 16 % (H), contre une prévalence de l’ordre de 10 % pour chacune de ces deux dernières catégories.

Ces chiffres augmentaient avec l’âge pour les deux sexes : par exemple, les TMS du dos touchaient près de la moitié de la population générale après 30 ans, contre un quart à un tiers avant cet âge. Plus précisément : 46 % des hommes entre 45 et 64 ans en souffraient, 43 % des 30 - 44 ans et 25 % des 18 - 29 ans ; chez les femmes, ces chiffres étaient respectivement de 50 %, 51 % et 34 %.

En revanche, ils ne semblaient pas beaucoup plus élevés chez les actifs occupés, en général : 48 % (F) et 42 % (H) pour les TMS du dos, 31 % (F) et 28 % (H) pour les TMS du membre supérieur. Chez les retraités et autres inactifs (personne au foyer, congé longue durée, personne handicapée), les prévalences étaient un peu plus élevées que chez les actifs occupés pour les deux catégories de TMS et les deux sexes. Ces hiérarchies selon la situation professionnelle étaient globalement retrouvées pour les différentes sous-catégories de TMS étudiées.

Quelles différences selon la catégorie socioprofessionnelle et le secteur d’activité ?

Les TMS du dos étaient moins fréquents chez les cadres et professions intellectuelles supérieures, que ce soit chez les hommes (38 %) ou chez les femmes (43 %).

À l’inverse ils étaient plus courants chez les agriculteurs-exploitants – 55 % (F) et 43 % (H) –, les ouvriers – 51 % (F) et 45 % (H) – et les artisans, commerçants et chefs d’entreprise hommes (46 %). Enfin, chez les employés, ils étaient plus fréquents chez les femmes (50 %) que chez les hommes (38 %). Ces hiérarchies selon la catégorie professionnelle étaient aussi retrouvées pour les TMS du membre supérieur.

Les prévalences selon le secteur d’activité étaient difficilement interprétables, compte tenu de la largeur et du chevauchement des intervalles de confiance des catégories analysées. Néanmoins, les résultats du calcul des indices de prévention a permis de déterminer les secteurs d’activité prioritaires pour réaliser des actions de prévention. Il est ainsi apparu que :

  • pour les hommes, l’industrie manufacturière et la construction devraient être les deux secteurs prioritaires ;
  • pour les femmes, ce sont le secteur de la santé humaine et celui de l’action sociale.

Quelles mesures de prévention ?

Santé publique France a donc recommandé des mesures de prévention et d’action face à ces risques liés au travail :

  • Informer les personnes cernées par le biais de campagnes de prévention.
  • Adapter les postes de travail.
  • Aménager l’organisation du travail afin d’éviter l’apparition des symptômes chez les travailleurs.
  • Limiter les risques psychosociaux au travail.
  • Au quotidien, il est par ailleurs recommandé de limiter la sédentarité pour favoriser la bonne santé musculosquelettique.

Encadre

Interventions du syndrome du canal carpien et pour hernie discale lombaire entre 2018 et 2022

  • Les taux d’incidence de ces deux affections ont globalement baissé entre 2018 et 2022 : pour la hernie discale lombaire (HDL), la baisse annuelle moyenne a été de 3,3 % chez les femmes et de 4,2 % chez les hommes ; pour le syndrome du canal carpien (SCC), elle a été de 2,1 % chez les femmes, mais elle a, au contraire, augmenté chez les hommes (hausse annuelle moyenne de 0,6 %). L’incidence était plus élevée dans la population en âge de travailler (20 - 64 ans) que dans la population générale, pour les deux pathologies.
  • En revanche, le nombre d’interventions pour HDL et SCC est resté relativement stable : en 2022, l’intervention du SCC a concerné 124 011 personnes (versus 125 430 en 2018), les femmes étaient majoritaires ; celle pour HDL, 20 971 personnes (versus 29 627 en 2018), les hommes étaient majoritaires.

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