Cette maladie est responsable de douleurs aiguës très fortes qui doivent être impérativement soulagées pour éviter leur chronicisation.

Témoignage de LAURENT, 54 ANS

Pendant plusieurs mois, j’ai eu de grosses fatigues, que je n’ai pas écoutées. La première douleur est apparue dans la cage thoracique. Je suis allé aussitôt aux urgences. Les médecins ont pensé à un problème cardiaque, mais les examens n’ont rien révélé. La douleur a ensuite disparu quelques jours, puis j’ai fait une chute, j’ai eu extrêmement mal, sans pouvoir définir précisément l’origine de la douleur. Je suis allé consulter mon ostéopathe, qui m’a très peu manipulé, ne voyant pas d’où venait la douleur. Quelques jours plus tard, une douleur foudroyante est apparue alors que j’étais au travail. Elle était tellement vive que je me suis écroulé par terre. J’ai eu durant tout le week-end des alertes douloureuses fulgurantes comme si j’avais des côtes cassées. Dès que je bougeais j’avais mal, c’était insupportable. J’ai passé des radiographies de la cage thoracique qui n’ont rien révélé. Le radiologue m’a alors envoyé aux urgences passer une tomodensitométrie qui a décelé un trou dans une vertèbre dorsale. Je suis ensuite rentré aux urgences du CHU pour établir un diagnostic. C’est au bout de 15 jours que le diagnostic du myélome multiple a été posé, à la suite de la réalisation d’une imagerie par résonance magnétique (IRM).
Durant cette période, j’étais sous antalgique. Pendant les premiers jours j’avais l’interdiction de bouger, il fallait attendre l’avis du neurochirurgien pour savoir si la vertèbre était cassée. J’ai ensuite eu rendez-vous avec une hématologue qui m’a expliqué ce qu’était le myélome et les traitements prévus. J’ai eu ensuite une arthrodèse. C’est à partir de ce moment-là que les douleurs se sont atténuées. Il n’y avait pas d’urgence à commencer la chimiothérapie, mais entre-temps j’ai eu de nouveau des douleurs insoutenables. J’étais incapable de bouger, j’étais complètement paralysé par la douleur, malgré les médicaments.
J’ai dû me faire hospitaliser en urgence et démarrer aussitôt la chimiothérapie (Velcade, thalidomide et dexaméthasone). Malgré l’arthrodèse, j’ai eu un tassement de la vertèbre qui a provoqué ces douleurs violentes. Dès les premiers cycles de chimiothérapie, et grâce à la cortisone, cela a été miraculeux, les douleurs se sont beaucoup atténuées et sont devenues supportables. J’ai pu retrouver une certaine autonomie assez rapidement et arriver à marcher.
J’ai fait ensuite une autogreffe avec une chimiothérapie intensive. Le pic monoclonal est devenu rapidement indécelable et j’ai bien réagi au traitement. J’ai terminé mes traitements en août 2016. Aujourd’hui, je suis toujours sous tramadol pour lutter contre les neuropathies et les démangeaisons. C’est seulement au moment où l’on m’a diagnostiqué un zona que j’ai rencontré l’équipe antidouleur de l’hôpital. Auparavant, la douleur était prise en charge par mon hématologue et mon médecin généraliste. C’est un grand changement d’être suivi par un médecin spécialiste de la douleur, qui ne s’occupe pas de la maladie mais qui se concentre sur la douleur. Aujourd’hui, je gère plutôt bien ma douleur, mieux que ma fatigue.

COMMENTAIRES DU DR CYRIL GUILLAUME

Les douleurs chez les patients atteints de myélome multiple sont très courantes et peuvent jalonner toute l’histoire de la maladie. La prolifération de cellules malignes au niveau de la moelle osseuse crée une inflammation et une destruction de l’os, provoquant des symptômes douloureux. Les traitements de la maladie sont aussi source de douleur. Ce témoignage révèle l’importance de bien prendre en charge la douleur qui peut être soulagée par des traitements médicamenteux mais aussi par d’autres techniques à chaque étape de la maladie dès son diagnostic.

L’importance du diagnostic

Déterminer l’origine de la douleur peut s’avérer complexe. La prise en charge médicale de Laurent s’est orientée vers des problématiques beaucoup plus larges que le myélome, qui est une maladie rare, les douleurs thoraciques faisant penser à un problème cardiovasculaire. L’interrogatoire et l’examen clinique sont des étapes indispensables pour évaluer et identifier la douleur. Il est important de réévaluer à distance de l’épisode aigu. Les atteintes osseuses ne sont pas toujours visibles à la radiographie. En cas de doute, il faut s’orienter vers des examens plus précis, tels la tomodensitométrie ou l’IRM.

Prendre en charge la douleur à chaque étape de la maladie

Les techniques chirurgicales comme l’arthrodèse peuvent être indiquées pour stabiliser les atteintes vertébrales et soulager les patients. Dans ce cas précis, se pose la question des douleurs postopératoires qui n’ont peut-être pas été suffisamment soulagées. Cela peut clairement limiter la reprise d’autonomie précoce qui est importante, et retentir sur l’humeur, le vécu de la maladie, la qualité de vie… Quand on ne soulage pas bien la douleur aiguë, on augmente le risque de sa chronicisation. Aussi, chimiothérapie et corticothérapie jouent un rôle important dans le soulagement de la douleur, en association avec un traitement antalgique si nécessaire, allant du paracétamol à la morphine selon l’intensité de la douleur. Enfin, il ne faut pas négliger l’apparition de douleurs neuropathiques liées aux traitements et aux atteintes osseuses persistantes qui justifient une antalgie spécifique.

Orienter le patient vers une structure spécialisée

Une consultation spécialisée de la douleur* a pour objectif d’évaluer la douleur dans toutes ses composantes et de rechercher son retentissement psychologique, socio-familial, sur la qualité de vie... Au décours de cette évaluation, des techniques complémentaires non médicamenteuses autres que de nouveaux traitements médicamenteux peuvent être proposées comme l’hypnose, l’acupuncture, le soutien psychologique… L’hypnose, par exemple, aide le patient à mieux gérer sa douleur en étant acteur de son soulagement et permet d’éviter une escalade médicamenteuse inutile, voire de diminuer les antalgiques.
* Les consultations et les centres d’évaluation et de traitement de la douleur (CETD) sont présents partout en France et répertoriés sur le site de la Société française d’étude et de traitement de la douleur (SFETD), sfetd-douleur.org
Encadre

Myélome multiple : un fort impact sur la qualité de vie

Fatigue et douleurs peuvent se manifester pendant les traitements mais aussi dans l’après-cancer. Différentes études ont montré que la qualité de vie des malades atteints de myélome multiple en rémission reste dégradée. Les patients rapportent en moyenne davantage de symptômes et de plaintes fonctionnelles que ceux atteints d’autres hémopathies malignes ou d’autres types de cancers.1, 2 Plusieurs études ont mis en évidence qu’ils ont une qualité de vie particulièrement altérée.2, 3 Ainsi, une étude a évalué la qualité de vie de patients âgés de 65 ans et plus, survivants d’un cancer. Il a été démontré qu’en fonction du type de cancer et par comparaison à celle de sujets témoins sans antécédent de cancer, les malades ayant survécu à un myélome multiple avaient, de façon analogue à ceux ayant survécu à un cancer du pancréas, les scores de qualité de vie physique et mentale les plus diminués.3

Les plaintes somatiques les plus fréquemment rapportées pour les patients atteints d’un myélome multiple sont la fatigue et les douleurs.2, 4-6

Références
1. Fouquet G, Leleu X. La rémission dans le myélome multiple. Corresp Onco-Hématol 2014;9:70-7.

2. Molassiotis A, Wilson B, Blair S, et al. Unmet supportive care needs, psychological well-being and quality of life in patients living with multiple myeloma and their partners. Psycho-Oncology 2011;20:88-97.

3. Kent EE, Ambs A, Mitchell SA, et al. Health-related quality of life in order adult survivors of selected cancers: data from the SEER-MHOS linkage. Cancer 2015;121:758-65.

4. Mols F, Oerlemans S, Vos AH, et al. Health-related quality of life and disease-specific complaints among multiple myeloma patients up to 10 years after diagnosis: results from a population-based study using the PROFILES registry. Eur J Haematol 2012;89:311-9.

5. Boland E, Eiser C, Ezaydi Y, et al. Living with advanced but stable multiple myeloma: a study of the symptom burden and cumulative effects of disease and intensive (hematopoietic stern cell transplant-based) treatment on health-related quality of life..J Pain Symptom Manage 2013;46:671-80.

6. Boland EG, Boland JW, Ezaydi Y, et al. Holistic needs assessment in advanced, intensively treated multiple myelom patients. Support Care Cancer 2014;22:2615-20.
Références
1. Fouquet G, Leleu X. La rémission dans le myélome multiple. Corresp Onco-Hématol 2014;9:70-7.

2. Molassiotis A, Wilson B, Blair S, et al. Unmet supportive care needs, psychological well-being and quality of life in patients living with multiple myeloma and their partners. Psycho-Oncology 2011;20:88-97.

3. Kent EE, Ambs A, Mitchell SA, et al. Health-related quality of life in order adult survivors of selected cancers: data from the SEER-MHOS linkage. Cancer 2015;121:758-65.

4. Mols F, Oerlemans S, Vos AH, et al. Health-related quality of life and disease-specific complaints among multiple myeloma patients up to 10 years after diagnosis: results from a population-based study using the PROFILES registry. Eur J Haematol 2012;89:311-9.

5. Boland E, Eiser C, Ezaydi Y, et al. Living with advanced but stable multiple myeloma: a study of the symptom burden and cumulative effects of disease and intensive (hematopoietic stern cell transplant-based) treatment on health-related quality of life..J Pain Symptom Manage 2013;46:671-80.

6. Boland EG, Boland JW, Ezaydi Y, et al. Holistic needs assessment in advanced, intensively treated multiple myelom patients. Support Care Cancer 2014;22:2615-20.

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