Face à la Covid-19, à sa sournoise contagiosité et sa dangerosité potentielle, tous les espoirs reposent aujourd’hui sur le nouveau vaccin. Dans l’attente d’un traitement spécifique, il pourrait être le moyen de stopper la pandémie. Les industriels du médicament ont parfaitement compris son intérêt potentiel, aussi bien scientifique qu’économique.
Si la campagne vaccinale a débuté en Angleterre et aux États-Unis, en France, nous attendons le feu vert de l’Agence européenne des médicaments (prévu pour le 21 décembre) et de son homologue français, l’ANSM. Le gouvernement a tissé un canevas préalable (gratuité de la vaccination, caractère non obligatoire, priorisation des populations à risque) mais qui pâtit d’un manque de vision stratégique. Faisant fi des erreurs passées, il persiste dans sa gestion autocratique et surcentralisée de la santé. Pourtant, les acteurs de terrain, élus locaux et professionnels de santé ambulatoire, ont toute légitimité pour participer plus activement à la définition d’une politique d’immunisation réussie, en particulier face à la montée de l’hésitation vaccinale.
La transparence des autorités sanitaires, que tous réclament à cor et à cri, et une véritable pharmacovigilance au jour le jour sont indispensables pour éviter de donner du grain à moudre aux vaccino-septiques et autres « antivax ». Car il y aura certainement quelques surprises lorsque le vaccin sera déployé à grande échelle. Une telle population cible, beaucoup plus large que les effectifs des essais de phase III (tout de même 20 000 vaccinés dans l'étude de Pfizer), rend statistiquement probable la mise en évidence d’effets secondaires, comme il en existe pour tout médicament. Un comité citoyen a été annoncé par Jean Castex ; gageons qu’il tentera d’éviter la panique et de lutter contre la défiance de la population pour permettre une couverture vaccinale significative.
Pour mener à bien notre mission, les informations scientifiques officielles nous manquent. Comment répondre aux interrogations de nos patients afin de leur garantir un « consentement libre et éclairé » ? Quelles seront les contre-indications, précautions d’emploi, schémas vaccinaux et durées de protection ? Leurs protocoles logistiques d’acheminement et d’injections ?
D’autres questions essentielles vont certainement rester sans réponses pendant un moment ; en particulier la capacité des vaccins à agir sur l’immunité individuelle en fonction des classes d’âge ou des comorbidités, leur impact en termes d’immunité collective et leur aptitude à réduire les portages viraux.
Aussi, dans ce contexte d’incertitude, le dépistage et les mesures barrières gardent toute leur importance. Et cela, l’État l’a bien compris. Aujourd’hui, les capacités de dépistage atteignent les 3 millions de tests par semaine. En outre, le Premier ministre déclarait il y a peu que les moyens alloués au traçage des cas seraient renforcés, notamment par un recrutement supplémentaire de 4 000 emplois temps plein pour l’Assurance maladie et par la mobilisation de 1 500 infirmiers libéraux et 3 000 accompagnateurs sociaux pour rendre visite aux personnes malades qui seraient confinées.
Mais quelles mesures logistiques – entre autres – pour réellement isoler les malades ? La question demeure.