Une des plus célèbres fistules anales de l’histoire de France est bien celle du Roi-Soleil. Elle est alors qualifiée par ses médecins de « plus fâcheuse et plus pernicieuse de toutes les incommodités ». Après des mois d’atermoiements et d’essais sur des indigents, son chirurgien Charles-François Félix opère le monarque en 1686 à l’aide d’un nouvel instrument de son invention : le bistouri recourbé à la royale, actuellement conservé au musée d’Histoire de la médecine (Paris, 6e arrondissement). Une grande réussite chirurgicale, puisque, après trois interventions à quelques mois d’intervalle, Louis XIV guérit.
C’est de cette anecdote historique qu’est née l’idée de réaliser la bande dessinée Le royal fondement. La face cachée du Roi-Soleil. « Mon objectif était d’évoquer les débuts de la médecine de façon amusante et instructive », confie son scénariste Philippe Charlot. Et cette première collaboration avec le dessinateur Éric Hübsch est très réussie. Les dessins de style semi-réaliste brossent un portrait de l’époque, de la cour royale et d’un certain nombre de personnages sympathiques et truculents bien campés. Les tribulations du jeune Geoffroy, apprenti barbier-chirurgien qui seconde le chirurgien royal et qui se trouve mêlé à des complots dans les coulisses de Versailles, apportent une certaine légèreté au récit. « Le sujet est un peu scabreux, et je me voyais mal l’aborder d’une autre façon que par l’humour », souligne le scénariste.
Un récit palpitant et riche en rebondissements digne des Trois Mousquetaires, un ton humoristique et ironique, un dessin attrayant et réaliste au service d’une description documentée de l’opération et de ses préparatifs : tous les ingrédients sont là pour dérouler une bande dessinée conçue comme une pièce de théâtre à la Molière.
Et les auteurs ne comptent pas s’arrêter là : ils travaillent sur un album basé sur le même principe, « à savoir les problèmes médicaux d’un grand de ce monde, soigné d’une manière qui peut laisser perplexe et qui prête donc naturellement à la dérision ». Ils se pencheront cette fois sur les problèmes uro-génitaux d’un autre monarque emblématique : le royal Zoziau d’Henri IV. Juliette Schenckery

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