L’enjeu actuel de prise en charge globale des victimes de violences fait écho à une dynamique mondiale engagée dès 1996 par l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Ainsi, lors de la 49e Assemblée mondiale de la santé, l’OMS notait que la violence, notamment celle faite aux femmes, constituait « l’un des principaux problèmes de santé publique dans le monde ». Elle indiquait la nécessité d’améliorer les connaissances sur les phénomènes de violences et leurs conséquences mais aussi de favoriser les mesures mises en place dans les États membres en matière de prévention et de prise en charge intersectorielle. À la suite de cette assemblée, le rapport mondial sur la violence et la santé de l’OMS, paru en 2002, a permis un éclairage sur les différentes facettes de la violence ainsi que sur les réponses que différents secteurs de la société pouvaient y apporter. La nécessité d’une prise en charge globale des violences a été réaffirmée en 2016 avec l’approbation par l’OMS d’un plan d’action mondial visant à renforcer le rôle du système de santé dans une riposte nationale multisectorielle à la violence interpersonnelle.  

La réforme de la médecine légale de 2011 en appui

En cohérence avec les directives de l’OMS, la nécessité d’une prise en charge coordonnée et globale (médico-judiciaire, sociale et sanitaire) des victimes en un lieu unique a également été au cœur de la réforme de la médecine légale française en 2011. Cette réforme a permis notamment la dotation de postes d’infirmières diplômées d’État, de psychologues, de juristes ou d’assistantes sociales au sein des unités médico-judiciaires.

Des structures spécifiques pour les enfants et les femmes

Deux modèles de prise en charge ont ensuite été proposés pour les enfants et les femmes victimes de violences : les unités d’accueil pédiatrique des enfants en danger (Uaped) et les maisons des femmes.

Dans les services de pédiatrie

Concernant les Uaped, leur déploiement sur l’ensemble du territoire a été prévu lors du 2e Plan de lutte contre les violences faites aux enfants en 2019 ; les modalités ont été précisées dans une instruction de 2021. Ces structures s’appuient sur les offres de soins préexistantes et sont organisées dans les services de pédiatrie des centres hospitaliers. Elles visent à réunir en un lieu unique à la fois les professionnels de santé et la police/gendarmerie en dotant notamment ces services de salle d’audition filmée. Ces unités permettent d’accueillir un mineur victime dans des conditions sécurisantes, d’apporter des soins et une prise en charge globale. Elles jouent également un rôle de coordination du parcours de soins de l’enfant et constituent une ressource pour les professionnels de premier recours confrontés à des mineurs victimes.

Accueil dans les maisons des femmes

Concernant les maisons des femmes, leur création dans différentes villes françaises est le fruit de l’implication conjointe d’acteurs hospitaliers, institutionnels et associatifs. Ces structures, dont les modalités d’organisation ont été décrites dans le rapport de l’Inspection générale des affaires sociales de 2017, ont vocation à accueillir et à proposer une prise en charge pluridisciplinaire aux femmes victimes. L’orientation vers la structure peut se faire par des partenaires extérieurs (hôpital, médecin de ville, police...) ou sur présentation spontanée. Plusieurs parcours de soins y sont en général identifiés (violences conjugales, violences sexuelles...). Ils mobilisent les compétences de différents acteurs, au sein de la structure ou partenaires de celle-ci : médecin, sage-femme, psychologue, assistante sociale, conseillère conjugale, sexologue... Certaines maisons des femmes sont également dotées d’une permanence judiciaire (police ou gendarmerie) afin de proposer des dépôts de plainte in situ.

Des initiatives locales à favoriser et structurer

En dehors de ces modèles formalisés, de nombreuses initiatives locales permettent également d’améliorer la prise en charge globale et notamment la coordination médicale et judiciaire. Ainsi, depuis 2020, un dépôt de plainte in situ est possible aux urgences de l’hôpital Saint-­Antoine à Paris, pour des patients victimes de violences conjugales. Afin de structurer et favoriser ces initiatives, les ministères de l’Intérieur, de la Justice et des Solidarités et de la Santé ont transmis à leurs services en novembre 2021 une circulaire visant au déploiement des dispositifs d’accueil et d’accompagnement des victimes de violences conjugales, intrafamiliales et/ou sexuelles au sein des établissements de santé. Celle-ci propose notamment des modèles de protocoles d’accueil et d’accompagnement de ces victimes au sein des établissements de santé ainsi que des fiches action visant, par exemple, au recueil de preuves sans plainte.

Des mesures bienvenues dont l'efficacité reste à évaluer

Si la France manque encore de recul par rapport à la mise en place de ces différentes mesures, celles-ci laissent espérer une meilleure prise en charge globale des victimes de violences, ainsi qu’une réduction des impacts des violences sur la santé.

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