La vitamine D joue un rôle essentiel dans la régulation du métabolisme phosphocalcique et est également associée à la santé musculosquelettique. En effet, elle stimule l’absorption digestive du calcium et du phosphate. Avec la parathormone (PTH), elle régule la réabsorption rénale du calcium et le remodelage osseux tout en exerçant un rétrocontrôle négatif sur la sécrétion de PTH. Enfin, la vitamine D stimule la production par les ostéocytes du fibroblast growth factor 23 (FGF23), hormone puissamment phosphaturiante. D’un autre côté, la vitamine D exerce un effet positif sur la force musculaire, et ce particulièrement chez les sujets de plus de 65 ans ayant un déficit. Enfin, de multiples effets « non phosphocalciques » de la vitamine D ont largement été démontrés (mais cela est en dehors du sujet de cet article).
Le rachitisme (chez l’enfant) et l’ostéomalacie (chez l’adulte) sont des pathologies connues de longue date qui sont associées à une carence profonde en vitamine D. Dans ces pathologies, on assiste ainsi à un important défaut de minéralisation osseuse et à des douleurs musculaires diffuses. Un traitement par vitamine D chez les patients souffrant de telles pathologies (dont la prévalence augmente ces dernières années en France) produit des résultats spectaculaires. À côté de ces pathologies assez rares du squelette, la vitamine D joue un rôle anti­fracturaire très important. En effet, plusieurs études randomisées contre placebo ont montré qu’une supplémentation en vitamine D, en règle générale associée à du calcium, réduisait le risque de fracture non vertébrale chez les personnes de plus de 65 ans1 et réduisait le risque de chute chez celles de plus de 70 ans,2 mais à la condition qu’une dose quotidienne d’au moins 800 UI soit administrée et que la concentration plasmatique en 25-hydro­xyvitamine D (25[OH] vitamine D), le marqueur biologique utilisé pour évaluer le statut vitaminique D du patient, atteigne au moins 30 ng/mL. En outre, chez les patients souffrant d’ostéoporose traités par bisphosphonates, une concentration en 25(OH) vitamine D d’au moins 30 ng/mL (ainsi qu’une supplémentation calcique) sont nécessaires pour observer une bonne efficacité antifracturaire.3
Au-delà des patients souffrant d’ostéoporose primaire, il existe de nombreux patients qui ont – ou sont à risque – d’ostéoporose dite « secondaire » liée à de nombreuses et multiples causes : médicaments (corticoïdes à forte dose, anti- aromatase, analogues de l’hormone de libération des gonadotrophines hypophysaires [GnRH]…), pathologies endocriniennes (hyperparathyroïdie primaire…), malabsorptions (maladie cœliaque, mucoviscidose, chirurgie bariatrique malabsorptive), insuffisance rénale chronique, sujets âgés à risque de chutes, chez qui de nombreux groupes d’experts considèrent que la concentration minimale de 25(OH) vitamine D permettant d’optimiser la santé musculosquelettique est de 30 ng/mL (soit 75 nmol/L).4
La vitamine D n’est pas une substance particulièrement toxique car il faut prendre des doses vraiment très fortes (plusieurs millions d’unités internationales) pour observer des signes d’intoxication aiguë (dont une atteinte rénale, qui peut être importante). En tout état de cause, aucune atteinte aiguë n’a jamais été observée en dessous d’une concentration de 150 ng/mL. Cependant, il faut rester prudent et ne pas dépasser une concentration maximale de 60 ng/mL.
La 25(OH) vitamine D a une longue demi-vie, et il n’est pas nécessaire d’en prendre quotidiennement, contrairement au calcium. La pharmacologie nous laisse donc le choix de petites doses à usage quotidien, soit en gouttes (principalement pour les bébés et les petits enfants), soit en sachets ou en comprimés (avec ou sans un apport concomitant de calcium) ou de plus fortes doses dont la prise doit se faire de façon intermittente. Ainsi, en France, des doses de 50 000, 80 000, 100 000 et 200 000 UI de vitamine D3 et 600 000 UI de vitamine D2 sont disponibles. L’ostéoporose est une pathologie chronique pour laquelle la persistance au traitement pharmacologique (que ce soit les bisphosphonates, le calcium ou la vitamine D) est très faible. Lors de l’instauration d’un traitement, le médecin doit évaluer avec le patient la meilleure façon de prendre la vitamine D (quotidienne ou espacée), tout en sachant que l’adhésion à la prise journalière, surtout lorsqu’elle est associée à celle du calcium, est souvent faible. Ainsi, les médecins préfèrent souvent prescrire des doses administrées de manière intermittente.
Il faut toutefois être attentif à deux points importants lors de la prescription de doses « espacées ». Le premier concerne la forme de vitamine D. En effet, pour les prises espacées, il faut absolument éviter la vitamine D2 et privilégier la vitamine D3. Le deuxième point, et il est fort important, est qu’il faut exclure les doses très fortes et très espacées, en particulier chez les patientes les plus âgées. En effet, les dernières recommandations du Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses (GRIO) préconisent d’utiliser les doses intermittentes les plus faibles possibles et des intervalles de prise plus courts par rapport à de fortes doses espacées dans le temps.5 Cette nouvelle recommandation se fonde sur plusieurs éléments, dont la cinétique de la 25(OH) vitamine D, qui s’élève très rapidement, mais baisse très rapidement également lors de la prise d’une forte dose, ainsi que sur la plus grande fluctuation des taux au cours du temps qui est loin d’être physiologique. Enfin, la prise de très fortes doses a même été associée à un risque accru de chutes chez les personnes âgées, ce qui va à l’encontre de l’objectif premier du traitement. 
Références
1. Bischoff-Ferrari HA, Willett WC, Orav EJ, et al. A pooled analysis of vitamin d dose requirements for fracture prevention. N Engl J Med 2012;367:40-9.
2. Bischoff-Ferrari HA, Dawson-Hughes B, Staehelin HB, et al. Fall prevention with supplemental and active forms of vitamin D: a meta-analysis of randomised controlled trials. BMJ 2009;339:843.
3. Carmel AS, Shieh A, Bang H, Bockman RS. The 25(OH)D level needed to maintain a favorable bisphosphonate response is ≥ 33 ng/mL. Osteoporos Int 2012;23:2479-87.
4. Benhamou C, Souberbielle J, Cortet B. La vitamine D chez l'adulte : recommandations du GRIO. Presse Med 2011;40:673-82.
5. Souberbielle JC, Cormier C, Cavalier E, et al. La supplémentation en vitamine D en France chez les patients ostéoporotiques ou à risque d'ostéoporose ? Données récentes et nouvelles pratiques. Rev du Rhum 2019;86:448-52.