La HAS vient de rendre un avis favorable au remboursement d’une nouvelle forme pharmaceutique de vitamine D3 (cholécalciférol) à la dose de 1 000 UI (Uvecaps, capsule molle) : la prise quotidienne, optimale, devient ainsi possible ! Rappel sur les bonnes pratiques de supplémentation selon les patients.

 

Les recommandations actuelles pour la supplémentation de vitamine D3 chez l’adulte utilisent principalement les spécialités dosées à 50 000 UI (solution buvable en ampoule) administrées de manière intermittente, à des intervalles variant selon les situations (mensuel en population générale, v. ci-dessous). Les autres dosages disponibles sont : 10 000 UI en solutions buvables en gouttes ; 80 000 UI, 100 000 UI et 200 000 UI en solutions buvables en ampoule ou capsules molles.

Toutefois, des données récentes suggèrent que l’administration de doses journalières modérées de vitamine D3 plutôt que de fortes doses administrées de manière intermittente devrait être privilégiée, en particulier chez les patients âgés chuteurs.

Quel serait l’avantage d’une supplémentation à petites doses ?

Des travaux comparant les supplémentations à forte doses à intervalles longs (80 000 ou 100 000 UI tous les 2-3 mois) à celles à plus faible dose à intervalles plus courts (50 000 UI tous les mois) montraient déjà un bénéfice de cette dernière méthode en termes de stabilité de la concentration sanguine de 25-hydroxyvitamine D [25(OH)D] – des résultats qui ont motivé les changements récents (2019) des recos du Groupe de recherche et d’information sur les ostéoporoses (GRIO). En effet, plus on élève la concentration sérique de 25(OH)D rapidement, plus elle baisse rapidement ensuite, et les intervalles longs de prise sont associés à d’importantes fluctuations de la concentration de 25(OH)D. Or ces fluctuations s’accompagnent de variations, dans le sens inverse, des concentrations sériques de l’hormone parathyroïdienne (PTH) et de Cross-laps (CTX) (qui augmentent lorsque la 25(OH)D baisse), témoignant d’une élévation de la résorption, probablement indésirable pour l’os.

Enfin, si l’équivalence (ou non) de la supplémentation journalière à petites doses par rapport à des prises mensuelles est encore débattue (absence d’étude comparant directement l’effet des deux méthodes sur des événements cliniques tels que fractures ou chutes), le GRIO observait déjà en 2019 que la première méthode devrait probablement être privilégiée. Mais jusqu’à présent, la prescription d’une prise quotidienne était difficile en France,avec un risque de mauvaise observance – la seule galénique permettant ce type de supplémentation étant la solution buvable en gouttes à 10 000 UI (1 goutte = 300 ou 400 UI de vitamine D) qui est destinée principalement à la supplémentation des bébés.

La nouvelle forme pharmaceutique ayant récemment obtenu une AMM et remboursée à 65 % (Uvecaps 1 000 UI : cholécalciférol, capsule molle) se prêterait mieux à ce type de supplémentation chez l’adulte. Des recommandations plus détaillées sont donc attendues à ce propos.

En pratique : quelle supplémentation, pour qui ?

Le statut vitaminique optimal est défini par un taux sanguin de 25(OH)D compris entre 20 et 60 ng/mL (50-150 nmol/L) en population générale. Chez les patients ostéoporotiques (ou à risque d’ostéoporose), insuffisants rénaux chroniques (DFG < 45 mL/min), ayant une malabsorption (maladie cœliaque, Crohn, rectocolite hémorragique, mucoviscidose, chirurgie bariatrique type bypass…) ou âgés à fort risque de chute : entre 30 et 60 ng/mL.

En attendant la mise à jour des recommandations intégrant la nouvelle spécialité disponible, les préconisations actuelles pour atteindre ces cibles sont :

• En prévention du déficit en vitamine D : 50 000 UI/mois de vitamine D3 entre novembre et avril pour l’ensemble de la population générale, ettoute l’année chez les sujets les plus à risque d’hypovitaminose (très âgés, dépendants, personnes qui ne s’exposent pas au soleil ou qui portent des vêtements couvrants ou qui ont une peau très pigmentée ; avec une dose doublée pour les sujets obèses). Cette posologie pourrait donc être remplacée par 1 capsule de 1 000 UI/jour (sur les mêmes périodes). En effet, les apports nécessaires pour que 97,5 % de la population ait un statut vitaminique optimal sont de 1 100-1 200 UI/jour.

• Chez certains patients (en situation de « fragilité osseuse », insuffisants rénaux chroniques avec DFG < 45 mL/min/1,73 m², patients ayant une malabsorption ou en post-chirurgie bariatrique malabsortive de type bypass, patients âgés chuteurs), dont la cible doit être entre 30 et 60 ng/mL, il faut suivre, après dosage de la 25(OH)D, les modalités de supplémentation recommandées par le GRIO. Si à l’heure actuelle celles-ci reposent sur les formes pharmaceutiques à 50 000 UI, le GRIO envisageait déjà une mise à disposition des formes adaptées à la prise quotidienne, avec les préconisations suivantes, chez les patients observants et en fonction de la concentration initiale de 25(OH)D :

– Dose de charge : 3 000 à 5 000 UI/jour pendant environ 3 mois chez ceux ayant une concentration < 20 ng/mL ;

– Suivie d’un traitement au long cours : 1 000 à 3 000 UI/jour avec réajustement de la posologie en fonction d’un dosage de contrôle à 3-6 mois.

Des préconisations plus détaillées sont attendues.

Laura Martin Agudelo, La Revue du Praticien

Pour aller plus loin :

HAS. UVECAPS 1 000 UI (colécalciférol). 10 février 2022.

Nobile C, Martin Agudelo L. Vitamine D : pour tous cet hiver ?Rev Prat (en ligne) 8 octobre 2021.

Souberbielle JC. Vitamine D : quelle supplémentation chez la femme enceinte ?Rev Prat (en ligne) 6 décembre 2021.

Souberbielle JC, Cormier C, Cavalier E, et al. La supplémentation en vitamine D en France chez les patients ostéoporotiques ou à risque d’ostéoporose : données récentes et nouvelles pratiques. Rev Rhum Ed Fr 2019;86(5):448-452.

Fardellone P, Lim P. Calcium et vitamine D : quelle supplémentation ?Rev Prat Med Gen 2020;34(1047);667-8.