Un cancer de la prostate. Au premier rang des cancers chez l’homme, le cancer de la prostate survient dans environ deux tiers des cas à l’âge de 65 ans et plus. Il est perçu comme lentement évolutif et curable. Pourtant, un dépistage à partir de la cinquantaine, personnalisé, permet de le prendre en charge à un stade précoce. L’inquiétude provoquée par le diagnostic, et les séquelles des traitements ne sont pas suffisamment prises en compte dans le parcours médical.

Témoignage de Denis, 64 ans

Je suis sensibilisé depuis longtemps au cancer de la prostate et je sais que la plupart des hommes en auront un. Je sais aussi qu’aujourd’hui ce cancer peut se guérir dans certains cas, et a minima être pris en charge de telle sorte qu’on n’en meure plus. C’est pourquoi j’ai fait une surveillance régulière de mon PSA (Prostate Specific Antigen), à partir de 45 ans.
En 2021, mon taux de PSA a augmenté progressivement, et pour me rassurer j’ai consulté un urologue, qui a réalisé une biopsie de la prostate. Le diagnostic de cancer est tombé. Même si je m’y étais préparé, le coup a été dur et l’incertitude sur l’avenir pesante. Heureusement, j’étais à la retraite depuis six mois, car j’aurais sans doute eu psychologiquement du mal à gérer de front la maladie et mon activité professionnelle.
Le diagnostic a été posé très tôt dans la maladie, et l’urologue m’a proposé de ne pas intervenir, mais de surveiller activement le cancer en dosant régulièrement le PSA, et en réévaluant par une imagerie par résonance magnétique (IRM) et des biopsies tous les ans.
À une période de réassurance – au cours de laquelle je me disais que c’était un coup dur mais que j’avais bien fait de me surveiller, et que finalement j’étais bien pris en charge – a succédé une anxiété grandissante dans l’attente de la biopsie suivante : quel en serait le résultat ?
La seconde biopsie réalisée l’année suivante a montré une aggravation des lésions, et l’urologue m’a alors proposé le choix entre la chirurgie ou la radiothérapie. C’était une mauvaise nouvelle pour moi, mais d’un autre côté, cela a diminué mon anxiété, car auparavant je vivais dans une incertitude permanente, avec un espoir raisonnable de guérison.
J’ai choisi l’option de la chirurgie par cœlioscopie, qui a été extraordinaire car peu douloureuse et m’a permis de marcher en vingt-quatre heures. En revanche, la prévention des throm­boses est une réelle contrainte et, pour moi, ce ne sont pas les anticoagulants qui m’ont le plus gêné, mais le port des bas de contention, jour et nuit, qui sont insupportables après quelques jours (cela a duré quatre semaines).
À l’issue de l’intervention, le taux de PSA était indétectable et jusqu’à présent l’évolution est favorable. Je me considère donc comme guéri et j’en suis bien évidemment heureux.
L’intervention m’a cependant laissé quelques séquelles dont on m’avait informé ; je les avais occultées car j’étais préoccupé par le diagnostic et centré sur l’espoir de guérison. A posteriori, je me dis qu’une prise en charge psychologique spécifique m’aurait été utile pour mieux aborder cette phase de la maladie. J’ai mis plusieurs mois pour récupérer une continence urinaire acceptable et au début c’était très déroutant. Il en est de même pour les troubles de l’érection, pour lesquels je me suis senti bien seul. Je suis sorti avec succès de ce cancer et je peux en féliciter tous les acteurs du parcours de soin, mais, pour être complet, il faudrait également une prise en charge aussi efficace des conséquences du traitement.

Commentaire de Roland Muntz, président de l’Anamacap

Le témoignage de Denis est très éloquent et représentatif de ce que les hommes vivent à l’annonce du diag­nostic de cancer de prostate et pendant leur parcours de soin. À des périodes de pessimisme (le mot cancer fait peur) succèdent des périodes d’optimisme (c’est un cancer qui se soigne bien s’il est détecté précocement).
Cette expérience, je la connais bien puisque je l’ai vécue durant des ­années. Détecté à l’âge de 55 ans, porteur d’un cancer de la prostate agressif, j’ai déploré à l’annonce de cette angoissante nouvelle la déficience de soutien et d’informations sur la maladie, pourtant premier cancer masculin en France. Aucune association de patients n’existait pour accompagner les malades, à la fois sur le plan psychologique et médical, dans leur difficile combat.
À ce constat s’est ajouté mon étonnement face à la détection tardive de mon cancer. J’ai été choqué, comme mon médecin, de découvrir un PSA au-delà de 40 ng/mL.
Ces deux raisons m’ont poussé à créer l’ANAMACaP. Vingt ans plus tard, je suis très fier du travail accompli par notre association qui lutte contre tous les tabous entourant cette maladie dont on parle peu.
Pourtant chaque année, près de 60 000 nouveaux cas sont diagnostiqués, et le cancer de la prostate fait plus de 8 000 morts par an. Le stade du cancer au moment du diagnostic est un facteur pronostique essentiel. Plus le cancer est détecté précocement, plus les chances de guérison sont grandes. Malgré cela, le cancer de la prostate ne bénéficie pas d’une politique de dépistage active de la part des autorités de santé. On sait pourtant que la mesure du PSA lors d’un simple bilan sanguin constitue une indication pour le dépistage du cancer de la prostate. De plus, aujourd’hui, les progrès de l’imagerie de la prostate (l’IRM multiparamétrique) et la possibilité de lecture experte centralisée permettent non seulement de détecter la présence et la localisation de la tumeur mais aussi son agressivité afin de justifier et orienter les biopsies. Ces outils permettent de réduire autant le surdiagnostic (trop de biopsies négatives par faux positif du PSA) que le surtraitement (traitement inopiné de cancers indolents, incidentaux).
Mon expérience personnelle, à laquelle s’ajoutent les cas de trop nombreux camarades d’infortune, ne peut que me conforter dans ma croisade pour un dépistage précoce, intelligent et systématique. J’espère que ce sera la voie qu’emprunteront demain les médecins et les autorités de santé. 
Encadre

Liens utiles

Association nationale des malades du cancer de la prostate : https://www.anamacap.fr/

Institut national du cancer (InCa) : https://www.e-cancer.fr/

Association française d’urologie : https://www.urofrance.org/

Association francophone des soins oncologiques de support (AFSOS) : https://www.afsos.org/

Association Cami sport et cancer : https://sportetcancer.com/

Encadre

Soutien des patients et de la recherche

L’Association nationale des malades du cancer de la prostate (ANAMACaP) a été créée en 2002 par un patient atteint d’un cancer de la prostate sur la base d’un constat simple : il n’existait à l’époque aucune association dédiée au premier cancer masculin en France. C’est ainsi que, sous l’impulsion de Roland Muntz, est née l’ANAMACaP avec l’aide des Prs Andrieu, Cussenot, Mangin et Vallancien. Aujourd’hui, l’association rayonne sur le plan national et compte plus de 1 200 adhérents. Sa mission d’information et de soutien auprès des malades du cancer de la prostate a été reconnue d’utilité publique en 2010.

L’ANAMACaP défend le droit à l’information sur le cancer de la prostate. Elle sensibilise le public aux dangers de ce cancer et à l’importance de son dépistage.

Elle aide les hommes victimes d’un cancer de la prostate à comprendre et mieux vivre leur maladie et les traitements.

Elle relaye les innovations et l’état de la recherche en organisant chaque année une journée scientifique animée par des spécialistes.

Elle apporte écoute, soutien et recommandations vers de l’information via sa permanence téléphonique (05 56 65 13 25, du lundi au jeudi de 9 h à 13 h et de 14 h à 16 h).

Elle donne aux malades la possibilité d’échanger avec d’autres patients et de rompre ainsi leur isolement.

Elle défend la cause des malades auprès des pouvoirs publics.

L’association a organisé des conférences sur les actualités et innovations dans la prise en charge du cancer de la prostate le 28 novembre 2023 à Bordeaux, le 30 novembre à Paris (https://www.youtube.com/watch?v=mr3hDwhFmfQ) et une autre sera proposée au premier trimestre 2024 à La Rochelle.

En parallèle, Roland Muntz et quelques fondateurs ont créé le FDCP, Fonds de dotation pour l’innovation dans la prise en charge du cancer de la prostate. Ce fonds est destiné à soutenir la recherche pour permettre aux patients français d’accéder à l’innovation et à des thérapies plus performantes.

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