Isolement, lésions affichantes, retard de diagnostic, manque de dialogue... les difficultés engendrées par le psoriasis peuvent être décourageantes. Pourtant, apprendre à connaître la maladie aide à trouver des solutions. La révolution thérapeutique en cours, avec l’arrivée des biothérapies, permet d’améliorer le parcours de prise en charge des patients.

Témoignage de Catherine, 62 ans

Que de sinuosités sur le chemin parcouru avec « mon pso », longtemps caché et maintenant « revendiqué » ! Pratiquement vingt-cinq ans de vie commune avec cette pathologie cutanée qui m’a été diagnos­tiquée en 1999… et j’avais déjà subi des poussées quelques années auparavant.
Les premiers traitements, tels que des crèmes et pommades corticoïdes ou des shampoings au goudron, ont été inefficaces et les plaques revenaient régulièrement ; j’ai donc tout abandonné durant plusieurs années.
L’arrivée des nouveaux traitements a changé mon regard sur la maladie et mon confort de vie.
Le corps médical n’ayant pas toujours le temps ni le réflexe de s’intéresser au quotidien des malades, il est important pour les patients de pouvoir échanger entre eux car il est compliqué de décrire les difficultés journalières rencontrées. Celles-ci peuvent sembler insignifiantes aux yeux d’une personne qui n’est pas atteinte : grattage, douleurs, astuces pour camoufler les plaques, ruses afin de contourner les questions gênantes, faire face aux remarques et conseils inappropriés : « Arrête de te gratter, sois moins stressée, essaie ceci… »
Toutes ces situations d’apparence anodine peuvent pourtant conduire à l’isolement face à l’incompréhension des autres ; c’est en tout cas ce qui m’a poussée à passer sous silence tous ces à-côtés de la maladie.
Les médecins que j’ai rencontrés au début avaient peu de temps pour écouter, car les consultations étaient courtes. Je n’osais pas parler de mes difficultés. Je me sentais seule face à ce psoriasis, et découragée. Je suis sortie de tout parcours de soins pendant dix ans.
Jusqu’au jour où j’ai rencontré un dermatologue à l’écoute, à qui j’ai pu expliquer mon désarroi. Il m’a pro­posé de nouveaux traitements, dont des biomédicaments : un anti-TNF puis un anti-interleukine (anti-IL-17).
En dehors des traitements, apprendre à connaître ma maladie a changé ma façon de l’appréhender. Cela m’a permis de l’expliquer à mon entourage et de pouvoir dialoguer plus facilement avec le dermatologue.
J’ai également découvert l’association France Psoriasis au sein de laquelle j’ai rencontré des personnes atteintes de la maladie avec qui je pouvais parler librement de « mon pso ».
De nos jours, avec internet, tout le monde a accès à une masse d’informations ; mais il est difficile de faire le tri dans ce flot de données, les bonnes et les mauvaises. L’association m’y a bien aidée.
Et, grâce aux informations sur la maladie, j’ai appris l’existence d’une forme rhumatismale, si bien que, lorsque les douleurs sont arrivées, j’ai fait le lien avec mon psoriasis cutané. J’ai alors demandé sans tarder l’avis du dermatologue, qui m’a dirigée vers un confrère rhumatologue. Celui-ci a posé le diagnostic de rhumatisme psoriasique et, en concertation avec mon dermatologue, le traitement a été adapté (anti-IL-23 et méthotrexate).
Sans ces connaissances, je n’aurais certainement pas fait le lien entre les deux types de symptômes si différents ; j’aurais mis les douleurs sur le compte de l’âge.
Depuis, les deux formes sont stabilisées, j’apprécie le confort de vie que cela m’apporte et je souhaiterais que tous les patients puissent trouver une solution adaptée à leur situation personnelle.

Commentaire du Dr Nathalie Quiles Tsimaratos, chef du service de dermatologie, hôpital Saint-Joseph, Marseille

Dans le témoignage de Catherine, on retrouve toute l’actualité du psoriasis de 2024. Des traitements et des connaissances qui permettent de proposer le meilleur à la majorité des patients, avec des objectifs ambitieux. Mais également toutes les difficultés de prise en charge des maladies chroniques. L’isolement, le manque de dialogue, les troubles anxiodépressifs, le retard diagnostique des comorbidités…
L’importance des associations de patients et de l’éducation thérapeutique qui permettent aux patients d’approfondir leurs connaissances, de dialoguer, de trouver des réponses à des questions du quotidien est également mise en avant.
Maladie inflammatoire chronique de la peau, le psoriasis touche environ 2,5 millions de personnes en France et 60 000 nouveaux cas sont diagnostiqués chaque année.
Les plaques cutanées érythémateuses, épaisses, recouvertes de squames blanchâtres sont dues à un renouvellement trop rapide des kératinocytes.
Le psoriasis évolue par poussées, avec des périodes de rémission. Son origine est génétique, mais les poussées sont souvent déclenchées par des facteurs environnementaux (médicaments, frottements, stress, maladies infectieuses...).
Près de 80 % des personnes développent une forme légère sur moins de 10 % de la surface corporelle. Cette pathologie touche également le cuir chevelu de 50 à 80 % des patients et peut atteindre les articulations dans 20 % des cas, en provoquant des rhumatismes inflammatoires (80 % apparaissent après l’atteinte cutanée), comme c’est le cas pour Catherine.
Le traitement est adapté en fonction de l’âge, de la localisation du psoriasis et de la sévérité de la pathologie. Pour les formes légères, des applications locales de dermocorticoïdes ou d’associations dermocorticoïde et vitamine D suffisent. Dans les formes sévères, des traitements systémiques sont proposés : rétinoïdes, méthotrexate, ciclosporine, photothérapie et, plus récemment, anticorps monoclonaux et petites molécules. Avec le développement des anti-TNF, des anti IL-12/23 et maintenant anti-IL-17, les biothérapies améliorent significativement la vie des patients, mais elles imposent une surveillance simple et comportent un risque infectieux.
Des améliorations restent nécessaires, mais la révolution thérapeutique en cours va permettre aux médecins de se concentrer sur d’autres problèmes que le médical et d’améliorer le parcours de prise en charge des patients. 
Encadre

« Être utile aux patients en les écoutant et les accompagnant »

Comme beaucoup, nous nous demandons parfois si nous sommes vraiment utiles en tant qu’association de patients. Le témoignage de Catherine est une réponse.

Oui, nous sommes utiles et fidèles à nos valeurs de départ : écouter, informer et sensibiliser. France Psoriasis, association qui a fêté ses 40 ans en 2023, a été créée dans ce but.

L’association offre une écoute, des témoignages sur la maladie et ses traitements, un accompagnement, des moments d’échanges, des possibilités de mieux-être. En cette période de crise de la démographie médicale, elle est d’autant plus utile qu’elle est un relais entre deux rendez-vous.

Une autre des missions essentielles de France Psoriasis est la sensibilisation des professionnels de santé et des pouvoirs publics sur le fort impact de la maladie sur la qualité de vie, actuellement sous-estimé malgré la résolution de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) du 24 mai 2014, lors de la 67e Assemblée mondiale de la santé qui, après examen du rapport sur le psoriasis, a reconnu cette pathologie comme une « maladie non contagieuse, chronique, douloureuse, inesthétique, invalidante et pour laquelle il n’existe pas de traitement curatif ».

France Psoriasis s’implique également aux côtés des sociétés savantes et des chercheurs afin d’améliorer la connaissance du psoriasis et du rhumatisme psoriasique en participant à des enquêtes socio-médico-économiques.

L’association travaille main dans la main avec les professionnels de santé pour une meilleure prise en charge et une reconnaissance de la maladie psoriasique.

Elle organise différents événements lors de la Journée mondiale du psoriasis ; la prochaine se déroulera le 24 octobre 2024.

Il faudrait que les médecins pensent à orienter les patients vers une association de patients souffrant de la pathologie, quelle qu’elle soit, et d’autant plus quand cette association est établie depuis des décennies et reconnue d’utilité publique. Les patients leur en seront reconnaissants.

Bénédicte Charles, présidente de France Psoriasis

https://francepsoriasis.org/Numéro d’écoute : 01 42 39 02 55.
Pour les patients
Association de patients France Psoriasis : https://francepsoriasis.org/
Dermato-info, le site grand public de la Société française de dermatologie (SFD) : https://dermato-info.fr/
La rhumatologie pour tous, le site grand public de la Société française de rhumatologie (SFR) : https://public.larhumatologie.fr/

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