Témoignage d’Aude, 32 ans
Aujourd’hui j’ai 32 ans, et mon plus grand souhait, c’est que, lorsque je me rendrai à des rendez-vous médicaux dans dix ans, les médecins me disent tous : « On connaît très bien votre syndrome et on va pouvoir vous aider », et ne plus jamais entendre : « Je ne connais pas, je ne peux rien faire pour vous... » que j’ai tant subi.
En effet, vivre avec un syndrome comme celui-ci est difficile. On se sent incompris par son entourage car il reste invisible, mais prend tellement de place. C’est parfois dur de l’apprivoiser et de l’oublier, ne serait-ce qu’un instant.
Ce syndrome a changé toute ma vie ! Après mes études, j’ai voulu travailler mais impossible de concilier fatigue, douleurs et emploi. Plus de dix ans après, je ne travaille toujours pas, mais je ne suis pas assez malade pour pouvoir demander de l’aide pour les tâches quotidiennes, financièrement... Je dois aussi m’occuper de notre fille. Je me dois de faire au mieux pour lui apporter les meilleurs soins possibles. C’est mon devoir, c’est moi qui lui ai transmis [la maladie] ! Et le papa dans tout ça ? Il subit totalement cette maladie, et personne n’est là pour l’entendre. Personne d’autre que moi pour lui demander, simplement : « Comment allez-vous ? comment vivez-vous les syndromes des personnes de votre entourage ? avez-vous besoin d’aide, de soutien ? »
J’aimerais finir mon témoignage sur une note positive, qui paraît anodine mais qui est tellement importante. Depuis quatre ans, annonce de notre atteinte, j’ai enfin compris mes « bizarreries » : mon pied bot, ma fatigue excessive, ma forte myopie, mon décollement de rétine, mes multiples fractures et entorses, mes nombreuses caries, l’émail mou de ma dentition, ma scoliose, mes pieds plats, mes pouces particuliers, ma dilatation rapide de l’aorte en lien avec ma grossesse, mon asthme, mes allergies, mes maux de tête, mes tortuosités artérielles, mes ecchymoses quotidiennes, mes cicatrices… Ainsi que celles de ma fille pour lesquelles il a été difficile d’être crus avant d’avoir pu montrer un document de la consultation de génétique certifiant son état : hyperlaxité, strabisme, allergies alimentaires, eczéma, ecchymoses, scoliose, asthme, œsophagites, faiblesse des muscles, notamment oculaires…
Au vu de cette énumération, où se trouve la note positive ? Savoir pourquoi on cumule tant de problèmes est primordial : j’ai su comment me battre, utiliser mon énergie et ma volonté en m’investissant notamment dans l’association Marfan et apparentés.
Commentaire du Dr Sophie Skopinski, centre de compétence Marfan et syndromes apparentés
C’est à partir de 2005 que le syndrome de Loeys-Dietz a été individualisé du syndrome de Marfan grâce à certaines atteintes particulières et la découverte des mutations TGFBR1 et TGFBR2. C’est une maladie rare du tissu conjonctif, avec une pénétrance et une expression variable entre les individus atteints et au sein d’une même famille, pouvant rendre le diagnostic difficile. La transmission est autosomique dominante.
Comme pour les personnes atteintes du syndrome de Marfan, les patients sont souvent longilignes, avec une arachnodactylie et des déformations du thorax, une scoliose plus ou moins sévère, des pieds plats. On retrouve une hyperlaxité, avec antécédents d’entorses et de luxations. En revanche, l’hypertélorisme, la présence d’une luette bifide orientent d’emblée vers un syndrome de Loeys-Dietz.
Au niveau oculaire, il n’y a pas d’atteinte du cristallin, ce qui constitue une différence majeure avec le syndrome de Marfan. Cependant, myopie plus ou moins forte, cataracte précoce et décollement rétinien sont possibles.
Autre particularité du syndrome de Loeys-Dietz : la fréquence des allergies. On objective ainsi assez souvent un asthme mais aussi des allergies alimentaires, de l’eczéma et des rhinites allergiques. La survenue de pneumothorax est possible.
C’est l’atteinte vasculaire qui fait la gravité de syndrome ; les causes principales de décès dans les premières séries sont les dissections aortiques et les hémorragies cérébrales. En effet, on observe presque constamment une dilatation de l’aorte ascendante. Des valvulopathies peuvent être associées (bicuspidie aortique, prolapsus mitral). Dans le syndrome de Loeys-Dietz , l’atteinte artérielle est souvent multifocale (anévrisme, dissection) avec un aspect tortueux des artères, notamment au niveau cervical ; elle doit être impérativement dépistée pour être traitée à temps. Les progrès de la chirurgie vasculaire et de la radiologie interventionnelle ont permis d’améliorer le pronostic de cette maladie chronique.
Le syndrome de Loeys-Dietz nécessite un diagnostic précoce pour mettre en place un suivi pluridisciplinaire adapté à la situation de chaque patient, avec une attention portée sur le plan cardiovasculaire, pour dépister précocement les lésions anévrismales, notamment au niveau de l’aorte thoracique. Il est parfois difficile d’arriver au diagnostic car l’atteinte musculosquelettique peut être très frustre. La structuration de la filière des maladies rares permet aux patients de rencontrer des professionnels sensibilisés à leur situation dans des centres de compétence et de pouvoir bénéficier d’une prise en charge dédiée.
Une association pour créer du lien
L’Association française des syndromes de Marfan et apparentés, créée en 1995, a pour objectifs :
– d’informer et d’accompagner les personnes touchées par ces syndromes ;
– de travailler en très étroite collaboration avec les différents centres de référence et de compétence ;
– de lever des fonds pour faire avancer la recherche ;
– de faire connaître ces syndromes afin de poser un diagnostic le plus précoce possible et d’éviter au maximum les complications ;
– de tisser des liens avec les associations européennes et internationales.
Cette organisation s’appuie sur des bénévoles et met en avant son slogan : « 100 % de bénévoles + 100 % de dons privés = 200 % d’énergies positives ».
L’association diffuse des informations sur son site internet (www.assomarfans.fr), par le biais d’une newsletter mensuelle et sur les réseaux sociaux, facebook et instagram (@assomarfans).
Sites internet pour vos patients :
- www.orphanet.net en tapant la recherche : « Loeys-Dietz »
Des dépliants édités par l’association dispensent des informations essentielles sur le syndrome de Loeys-Dietz (apparenté au syndrome de Marfan).
Les centres de références : Centre national de référence Marfan, Hôpital Bichat, Paris ; onze Centres de Compétence Marfan et syndromes apparentés en région (Bordeaux, Caen, Dijon, Lille, Lyon, Marseille, Nantes, Nancy, Rennes, Strasbourg, Toulouse).