Cette maladie génétique affectant la peau est très difficile à vivre pour les patients qui sont confrontés quotidiennement au regard des autres.

Témoignage de Cécile, 29 ans

Être atteinte d’une maladie génétique rare n’est pas une chose facile au quotidien, surtout lorsque celle-ci touche principalement le physique… si ce n’est que le physique, ce n’est pas très grave ! Oui, c’est certain que comparé à d’autres pathologies avec des symptômes lourds et des traitements au quotidien, on peut penser qu’avoir ma forme de cutis laxa est une promenade de santé. Ce n’est pourtant pas du tout le cas !
Il est vrai que je ne souffre pas physiquement au quotidien, que je ne passe pas mes journées à l’hôpital, que ma mobilité est celle d’une ­personne « normale » et que je vis comme toute femme de 29 ans.
Ma douleur est plus subtile, elle n’est pas visible, je souffre psychologiquement.
Dans une société où le dictat de la beauté physique prime sur la beauté de l’âme, où être une femme comporte lui aussi son lot de combats, moi je suis les deux, je suis une femme et je suis différente. Un double combat pèse alors sur mes épaules.
Paraître 45 ans en moyenne et n’en avoir que 29 me confronte au quotidien au jugement des gens. Comment se fondre dans la masse quand tout ce que tu représentes ne correspond pas à qui tu es ?
C’est un combat au quotidien : faire valoir ma différence ; porter à bout de bras mes 29 ans, quitte à devoir me justifier 50 fois par jour ; prouver que je ne suis pas une quinquagénaire délurée qui n’accepte pas de vieillir, mais une jeune femme qui s’assume et vit pleinement sa jeunesse.
Et parfois ce combat est lourd à ­porter, il n’est pas facile d’accepter sa différence aux yeux des autres, de les laisser penser ce qu’ils veulent même s’ils se trompent, de les laisser imaginer ma vie en fonction de mon physique, et de vouloir juste arrêter de me justifier…
Or ce n’est pas la vie que je souhaite, et c’est pour ça que je ne cesserai jamais de crier haut et fort qui je suis : « Je m’appelle Cécile, je suis une femme libre et, quoi que vous puissiez imaginer, j’ai 29 ans. »
Je ne cesserai jamais de me battre contre le jugement des autres et je continuerai à vivre comme je le souhaite, quoi que puissent en penser les gens qui m’entourent. Car, oui, c’est ma vie, c’est ma peau et non la leur.
Alors voilà, le regard des autres ne doit plus être un frein à la vie, vous trouverez toujours quelqu’un sur votre route pour vous juger ou vous critiquer. Le plus important c’est d’être fière de ce que vous êtes et de vivre à fond pour votre bonheur car il est entre vos mains.
C’est dans la différence que se cultive l’intelligence.

Commentaire de l’association Cutis Laxa internationale

Une peau flasque et ridée est le premier symptôme évident de la cutis laxa, quel que soit l’âge du malade.
Dans les formes génétiques, dès la naissance, les enfants ont une apparence âgée due à l’absence et/ou la dégradation des fibres élastiques. Le faciès particulier de ces enfants (rides nasogéniennes profondes, par exemple) et l’ensemble du corps ridé (en particulier au niveau des plis axillaires) les stigmatisent au quotidien. Dès la cour de l’école, cette différence est assimilée à un âge avancé ne correspondant pas à celui attendu. Les enfants entre eux n’étant pas tendres, le harcèlement et le rejet font partie des fardeaux quotidiens des enfants atteints de cutis laxa.
Or, dans l’évolution de l’individu, pouvoir s’identifier aux autres dans un effet « miroir » fait partie des éléments qui permettent de grandir et d’acquérir la confiance en soi nécessaire à un adulte. Que ce soit dans la famille, que ce soit dans la société, les enfants atteints de cutis laxa n’ont aucune possibilité d’identification visuelle. L’extrême rareté de la maladie (moins de 450 cas à ce jour dans le monde entier, tous types confondus) implique que rencontrer un autre malade est presque impossible.
Dans la forme acquise de la maladie, la cutis laxa apparaît à l’âge adulte après certaines expositions environnementales, telles que certains médicaments, des infections ou des maladies auto-immunes. Le retentissement sur la qualité de vie est alors différent. Si les enfants ayant des formes génétiques sont « habitués » à leurs rides dès la plus tendre enfance, la dégradation très rapide de l’aspect de la peau à l’âge adulte est vécue tout autrement.
Ne nous voilons pas la face, nous vivons dans une société où l’image et l’apparence physique ont une grande importance, et cela rend le quotidien des malades atteints de cutis laxa ­encore plus difficile à supporter.
Dans tous les cas, le recours à la chirurgie réparatrice reste une option pour cette maladie qui n’a pas de traitement à ce jour. Néanmoins, ce n’est pas simple ; l’absence et/ou la dégradation des fibres élastiques ne garantit pas une permanence des résultats, ce qui entraîne la nécessité de plusieurs opérations au fil des années.
Par ailleurs, outre le nécessaire accompagnement psychologique de la prise de décision, il n’existe pas aujourd’hui de liste de chirurgiens plasticiens ­experts qui connaissent la cutis laxa et peuvent donc prendre ces patients en charge. De plus, le remboursement à 100 % par la Sécurité sociale donne souvent lieu à une bataille pied à pied, car la nécessité d’une telle intervention est souvent jugée uniquement « esthétique » sans que soit pris en compte le retentissement psychologique de la maladie au quotidien.
Et la cutis laxa, ce ne sont pas seulement des rides. De nombreux organes internes peuvent également être ­atteints selon le type et la mutation impliquée. 

Encadre

Une maladie complexe

La cutis laxa est une maladie très complexe dont les symptômes ne sont pas uniquement cutanés.

Les symptômes principaux, tous types confondus, sont : la tortuosité artérielle, l’emphysème, la peau ridée/laxe, les troubles neurologiques avec ou sans retard de croissance intra-utérin. En plus de ces symptômes principaux, des critères mineurs sont classifiés pour chaque type : arachnodactylie, anévrismes et/ou sténoses aortiques, détresse respiratoire, diverticules, perte auditive, large fontanelle antérieure, contractures articulaires, luxation de hanche, ataxie. Chacun de ces symptômes est associé à l’une ou l’autre des différentes formes de la maladie, que ce soit :

– une forme dominante, ADCL1 (mutation ELN), ADCL2 (mutation FBLN5), ADCL3 (mutation ALDH18A1) ;

– une forme récessive, ARCL1A (mutation FBLN5), ARCL1B (mutation FBLN4), ARCL1C (mutation LTBP4), ARCL2A (mutation ATP6V0A2), ARCL2B (mutation PYCR1), ARCL2C (mutation ATP6V1E1 ou ATP6V1A), ARCL3A (syndrome de De Barsy A) [mutation ALDH18A1], ARCL3B (syndrome de De Barsy B) [mutation PYCR1], Geroderma Osteodysplastica (mutation SCYL1BP1), Occipital horn syndrome (mutation ATP7A), syndrome MACS (mutation RIN2) ;

– ou la forme acquise, ACL.

Encadre

Pour en savoir plus

- Association Cutis laxa internationale, https://www.cutislaxa.org

- Centre de référence des maladies génétiques à expression cutanée (MAGEC), Pr Christine Bodemer (christine.bodemer@aphp.fr), service de dermatologie, hôpital Necker, AP-HP, Paris.

- Réseau européen de référence peau-maladies du tissu conjonctif de cause mendélienne (ERN-Skin-MCTD), Pr Bert Callewaert (bert.callewaert@ugent.be), Center for Medical Genetics, Ghent University Hospital, Gent, Belgique.

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