Qu’est-ce que l’antigène HLA-B27?

Peu de tests biologiques ont une notoriété aussi forte que la recherche de l’antigène HLA-B27, connu de l’ensemble de la communauté médicale. C’est le principal test diagnostique résultant de la découverte du système HLA qui a valu le prix Nobel à ses découvreurs, dont le Français Jean Dausset. Cela s’explique à la fois par la fréquence relativement élevée des pathologies auxquelles il est associé, le groupe des spondyloarthrites (150 000 à 200 000 patients en France), et par la fréquence plus importante encore des patients ayant des symptômes évocateurs de ces pathologies (en particulier les rachialgies chroniques mais aussi les arthralgies avec ou sans gonflement articulaire) ainsi que par son utilité diagnostique appréciable devant ces pathologies pour lesquelles nous manquons de tests objectifs fiables. HLA-B27 lui-même est l’un des très nombreux allèles du locus HLA-B, l’un des trois gènes codant les antigènes majeurs d’histocompatibilité du système HLA de classe I qui compte aussi les locus HLA-A et HLA-C. Le HLA-B est le gène le plus polymorphe dans l’espèce humaine. Chaque individu en porte deux allèles, le plus souvent dis­semblables.
La prévalence du HLA-B27 varie d’une population à l’autre. Dans la population française, il est présent chez 7,2 % des individus. Il est plus fréquent dans les régions septentrionales du globe (14 % chez le Finnois, 30 % chez les Inuits) et plus rare au Japon (< 1 %) ou en Afrique subsaharienne (2,5 % en Gambie) [dans ces deux pays, la prévalence des spondyloarthrites est corrélée à celle de l’antigène HLA-B27].

Comment s’effectue sa recherche ?

Elle peut s’effectuer en pratique de deux façons distinctes : par cytométrie de flux ou par détermination génétique, les deux demandant une prise de sang qui est adressée à un laboratoire spécialisé. La première technique met à profit la caractéristique des antigènes HLA d’être exprimés à la surface des leucocytes pour y détecter la présence du HLA-B27 à l’aide d’un anticorps spécifique qui se fixe à cet antigène, ensuite révélé par fluorescence. Sa fiabilité n’est pas absolue. Sa principale limite est le risque de faux négatif quand l’antigène HLA-B27 est faiblement exprimé (qui serait de l’ordre de 10 %, mais il n’en existe pas d’évaluation précise). La seconde méthode par génotypage est plus fiable mais nécessite l’accord écrit du patient, recueilli sur un formulaire fourni par le laboratoire d’analyses, car il s’agit d’un test génétique. Le plus souvent, il consiste à révéler si l’allèle HLA-B27 est présent, par une amplification génique (polymerase chain reaction [PCR]) utilisant des amorces spécifiques de cet allèle. Le résultat est alors positif ou négatif. De façon moins courante, on peut recourir au génotypage HLA-B qui identifie précisément quels sont les deux allèles portés par l’individu (technique utilisée pour la transplantation d’organe). Les tests génétiques sont pratiquement exempts du risque de faux négatif ou positif.

Quand prescrire une recherche de l’antigène HLA-B27?

Devant toute suspicion de spondyloarthrite non encore confirmée, il est légitime de rechercher la présence de l’antigène HLA-B27 pour en conforter le diagnostic. Les ophtalmologistes le prescrivent en cas d’uvéite antérieure aiguë car la présence de l’antigène HLA-B27 correspond à un type particulier d’uvéite, qu’elle soit ou non révélatrice d’une forme plus complète de spondyloarthrite.

Comment interpréter un résultat positif ?

En France, 75 % des patients souffrant de spondyloarthrite sont porteurs de l’antigène HLA-B27, représentant de ce fait 0,2 à 0,5 % de la population générale.1 Compte tenu de la fréquence de l’allèle HLA-B27 dans la population (7,2 %), on peut en déduire que seuls 5 % des porteurs de l’antigène HLA-B27 ont un risque de développer une spondyloarthrite. On conçoit donc que la présence de l’antigène HLA-B27 n’a pas de spécificité suffisante pour dépister les sujets à risque et ne peut avoir d’utilité que pour conforter une suspicion diagnostique reposant sur des arguments cliniques. En revanche, si ce contexte est réalisé, la présence de l’antigène HLA-B27 aide à conforter le diagnostic. Par exemple, chez un sujet de moins de 40 ans souffrant de rachi­algies lombaires chroniques inflam­matoires, la détection de l’antigène HLA-B27 confère une valeur prédictive positive de 59 % pour le diagnostic de spondyloarthrite.2

Comment interpréter un résultat négatif ?

La négativité du HLA-B27 ne permet pas d’écarter le diagnostic de spondyloarthrite. C’est une situation qui concerne 25 % des patients souffrant de cette pathologie en France, et cette proportion augmente mécaniquement dans les populations où la fréquence de l’antigène HLA-B27 est moindre. Cette absence rend le diagnostic d’autant plus ardu que sa présence est elle-même associée à des formes plus parlantes de la maladie, comportant notamment une sacro-iliite radiographique et/ou en imagerie par résonance magnétique.3 Dans certains cas, il existe donc une forte probabilité clinique de spondyloarthrite impossible à confirmer par un test objectif. Une fois éliminés les autres diagnostics plausibles, c’est une situation qui a conduit de longue date à proposer un test théra­peutique par des anti-inflammatoires qui est relativement simple à mettre en œuvre car il s’agit de traitements facilement accessibles, et le délai de réponse n’est que de quelques jours. En cas de succès, la conviction du diag­nostic de spondyloarthrite s’en trouve renforcée et une première solution thérapeutique apportée. En cas de résistance aux anti-inflammatoires, il est devenu maintenant possible de conduire un test similaire par bio­thérapie anti-tumor necrosis factor alpha (anti-TNFα), si la conviction clinique est suffisante. Il s’agit d’une décision dont la réalisation relève du spécialiste hospitalier car ces traitements coûteux sont soumis à une réglementation stricte (prescription initiale hospitalière), nécessitent dans la plupart des cas une prise en charge au titre de l’affection de longue durée (ALD) « ALD – Spondylo­arthrite sévère » et ont un délai d’efficacité de plusieurs semaines. En cas de réponse positive, cette possibilité permet d’apporter une solution à nombre de patients qui, dans le cas contraire, restent en déshérence, faute d’alternative diagnostique et thérapeutique appropriée.
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Références
1. Costantino F, Talpin A, Said-Nahal R, et al. Prevalence of spondyloarthritis in reference to HLA-B27 in the French population: results of the GAZEL cohort. Ann Rheum Dis 2015;74:689-93.

2. Rudwaleit M. How to diagnose axial spondyloarthritis early. Ann Rheum Dis 2004;63:535-43.

3. Chung HY, Machado P, van der Heijde D, D’Agostino MA, Dougados M. HLA-B27 positive patients differ from HLA-B27 negative patients in clinical presentation and imaging: results from the DESIR cohort of patients with recent onset axial spondyloarthritis. Ann Rheum Dis 2011;70:1930-6.

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