Il est nécessaire de bien connaître les ressources et réseaux de prise en charge de l’obésité de l’enfant pour répondre aux inégalités dans l’accès aux soins et mettre en place des actions ciblées et efficaces.
L’obésité de l’enfant est une pathologie multifactorielle et chronique entraînant des répercussions sur les différents pans de la vie. Chaque situation est unique et demande une évaluation multidimensionnelle afin d’aboutir à une prise en charge la plus adaptée possible. Cependant, cette dernière peut se heurter aux capacités réelles du système de soins et à ce qui est financièrement accessible aux patients. Depuis quelques années, des ressources et des réseaux se développent afin de répondre aux éventuelles inégalités que pourrait présenter le système de soins dans la prise en charge de l’obésité de l’enfant. Il est primordial de les connaître et de les solliciter pour un accompagnement au plus juste des enfants/adolescents et de leur famille.

Évaluation et suivi en soins primaires

Concernant l’obésité de l’enfant, les acteurs sollicités en première ligne sont souvent les médecins traitants, les médecins de santé scolaire, les médecins de la protection maternelle et infantile (PMI) ou encore les professionnels para­médicaux, diététicien(ne)s en tête. Ils sont confrontés à un enjeu de taille : identifier le maillage territorial des professionnels libéraux formés, en perpétuel mouvement et dont les prestations indispensables à l’évaluation et au suivi des patients ne sont malheureusement pas toutes prises en charge par l’Assurance maladie. Les dispositifs d’appui à la coordination1 (DAC) et les communautés professionnelles territoriales de santé2 (CPTS) sont des sources d’information utiles pour se repérer.

Un parcours de soins construit autour du médecin traitant

L’excès de poids, qui persiste à l’âge adulte chez deux tiers des enfants concernés, est une pathologie destinée à être suivie par les médecins généralistes dans le nouvel environnement multidisciplinaire et coordonné qu’est la médecine de parcours. Il est donc inéluctable que le médecin traitant demeure le repère et le pivot du parcours de soins d’un patient en excès de poids. Il est orienté dans cette démarche par un guide complet3 rédigé par la Haute Autorité de santé (HAS). Dans la grande majorité des obésités dites communes, le parcours vise, au-delà d’une prise en charge médicale classique, à atteindre des objectifs dits SMART (spécifiques, mesurables, atteignables, réalistes et temporellement définis) déterminés en concertation avec le patient (fig. 1).

De nouveaux parcours de soins ciblés

Une nouvelle offre de soins dédiée à la prise en charge des enfants en situation d’excès de poids s’organise et se structure sous forme de parcours intégrés (fig. 2). Ces programmes permettent l’accès aux soins pluridisciplinaires avec un engagement financier faible, voire nul, pour les familles ; ils peuvent prendre la forme de consultations individuelles et de groupe à travers des ateliers d’éducation thérapeutique du patient (ETP), ou encore la forme de véritables parcours accompagnés. ­Aujourd’hui, des ateliers variés d’ETP dédiés à l’obésité de l’enfant voient le jour grâce aux initiatives des CPTS.
Les réseaux de prévention et de prise en charge de l’obésité pédiatrique (RéPPOP) offrent un parcours de prise en charge multidisciplinaire et coordonné. Différents départements en sont dotés ; l’ensemble de ces réseaux est recensé sur le site de la Coordination nationale des RéPPOP (http://www.cnreppop.com/).
Des programmes personnalisés existent aussi, depuis de nombreuses années, au sein de l’Union pour la gestion des établissements des caisses de santé de l’Assurance maladie4 (Ugecam).
Après trois années d’expérimen­tation dans le Nord-Pas-de-Calais, la Seine-Saint-Denis et à La Réunion, le dispositif « Mission : retrouve ton cap »5 (MRTC) se généralise dans toute la France.6 Il permet aux enfants de 3 à 12 ans à risque d’obésité, en surpoids ou en situation d’obésité non complexe de bénéficier, sur prescription médicale, d’une prise en charge précoce et pluridisciplinaire (diététique, psychologique, activité physique) au sein de structures de proximité, remboursée à 100 % par l’Assurance maladie.
Enfin, le parcours Obepedia7 est expérimenté (en « article 51 ») dans neuf centres spécialisés obésité (Angers, Bordeaux, Lille, Lyon, Nancy, Toulouse, Nice, Île-de-France, La Réunion). Ce programme est dédié aux enfants et adolescents en situation d’obésité sévère et/ou complexe.

Certaines situations nécessitent l’avis de centres experts

Devant une suspicion d’obésité de cause rare, devant l’existence de comorbidités ou de complications, ou face à des situations qui nécessitent un étayage médico-social particulier, les professionnels libéraux doivent orienter les familles vers des centres experts : les centres spécialisés de l’obésité8 (CSO) sont rattachés à des services hospitaliers pédiatriques compétents, référencés dans le guide de la HAS.3 Ceux-ci sont aussi identifiables sur les plateformes d’expertise maladies rares (sites internet pour chaque région). Ils disposent de ressources humaines et de plateaux techniques pour explorer les obésités complexes et peuvent proposer, dans certains cas, de nouvelles prises en charge médicamenteuses.9 Ils peuvent également envisager la possibilité d’un recours à la chirurgie bariatrique. Celle-ci fait toutefois l’objet d’indications très restreintes et d’un parcours de préparation d’une année dans un CSO à compétence pédiatrique, encadré par des réunions de concertation pluridisciplinaire.10
De plus, des séjours dans les structures de soins médicaux et de réadaptation (SMR) peuvent être évoqués dans les situations où une rupture avec le milieu familial paraît utile à la prise en charge.

Ressources en formation professionnelle

Devant la prévalence de l’obésité en pédiatrie, il est indispensable d’avoir suffisamment de professionnels formés pour répondre aux besoins. Or la formation initiale des professionnels de santé est succincte sur le sujet.
Il existe de nombreuses propositions en formation continue qui offrent cependant des niveaux de qualification disparates. Les diplômes universitaires, sanctionnés par un examen, sont les formations les plus exhaustives et nécessitent un investissement sur une année académique entière :
– diplôme universitaire « Nutrition et obésité de l’enfant et de l’adolescent »11 (Sorbonne Université) ;
– diplôme interuniversitaire « Obésité pédiatrique, approche de santé publique »12 (université d’Angers) ;
– diplôme universitaire « Prise en charge intégrée des obésités »13 consacrant un module à l’obésité pédiatrique (Sorbonne Université).
La formation, dispensée dans les antennes régionales de l’Association pour la prise en charge et la prévention de l’obésité en pédiatrie14 (APOP), est destinée aux professionnels de santé qui souhaitent devenir référents libéraux de parcours de soins dédiés à l’obésité pédiatrique.

Une place pour les associations de patients

Regroupées au sein de structures agréées, les associations de patients informent, forment, organisent des activités thématiques et structurent leur propre maillage territorial de professionnels de soins sensibilisés et formés. Deux associations se distinguent : le Collectif national des associations d’obèses15 (CNAO) et la Ligue contre l’obésité16, qui dispose d’un conseil scientifique.

Des structures pour organiser la synergie des soins

Que la prise en charge soit réalisée en ville, directement ou après un passage dans un centre expert ou encore dans un parcours spécifique, elle gagne à être coordonnée par un professionnel connaissant le patient, la pathologie mais aussi les techniques de prise en charge des maladies chroniques comme l’éducation thérapeutique du patient (ETP) ou l’entretien motivationnel. Ce référent, quel que soit le corps auquel il appartient, assure l’homogénéité des messages délivrés au patient et vise la synergie des soins dispensés par les différents professionnels mobilisés autour d’objectifs discutés avec le patient. Sa connaissance des acteurs et des solutions permet d’aplanir les difficultés d’accès aux soins et les inégalités d’ordre socio-économique.

Références

1. Ministère de la Santé et de la Prévention. Les dispositifs d’appui à la coordination (DAC). https://vu.fr/WZut
2. Agence régionale de santé. Les communautés professionnelles territoriales de santé. 11 mars 2021. https://vu.fr/IrMR
3. Haute Autorité de santé. Guide du parcours de soins : surpoids et obésité de l’enfant et de l’adolescent(e). 3 février 2022. https://vu.fr/AwEQ
4. Groupe Ugecam. Enfants et adolescents. https://vu.fr/qeca
5. Prévention de l’obésité chez l’enfant de 3 à 8 ans. Dispositif « Mission : retrouve ton cap ». https://vu.fr/zJLR
6. « Mission : retrouve ton cap » : le dispositif pour aider les enfants face au surpoids. Assurance maladie. Communiqué du 25 novembre 2022. https://vu.fr/xRxY
7. Arrêté du 20 novembre 2019 relatif à l’expérimentation du parcours de soins pour les enfants et adolescents atteints d’obésité sévère (Obepedia). Journal officiel du 24 novembre 2019. https://vu.fr/RtDv
8. Ministère de la Santé et de la Prévention. Les centres spécialisés d’obésité. 3 juin 2022. https://vu.fr/zEBD
9. Hinnay H, Körner A, Fischer-Posovszky. The promise of new anti-obesity therapies arising from knowledge of genetic obesity traits. Nat Rev Endocrinol 2022;18:623-37.
10. Haute Autorité de santé. Chirurgie de l’obésité pour les moins de 18 ans : à n’envisager que dans des cas très particuliers. 30 mars 2016. https://vu.fr/nyVc
11. Sorbonne Université. DU Nutrition et obésité de l’enfant et de l’adolescent. https://vu.fr/bMsK
12. Université d’Angers. DIU Obésité pédiatrique, approche de santé publique. https://vu.fr/RNcN
13. Sorbonne Université. DU Prise en charge intégrée des obésités. https://vu.fr/wbzC
14. Agence nationale du développement professionnel continu. https://www.agencedpc.fr/formations-dpc-rechercher-un-dpc
15. Collectif national des associations d’obèses. https://cnao.fr/
16. Ligue contre l’obésité. https://liguecontrelobesite.org/

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