Insomnie et syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) constituent les deux pathologies du sommeil les plus fréquentes, toutes deux associant des perturbations du sommeil, des altérations du fonctionnement diurne, des troubles de l’humeur et un impact fort sur la qualité de vie.
Fragmentation du sommeil consécutive au SAOS
Le syndrome d’apnées obstructives du sommeil se caractérise par la survenue répétée au cours du sommeil d’occlusions partielles ou complètes des voies aériennes supérieures, limitant (hypopnées) ou interrompant (apnées) le flux aérien, accompagnées de désaturation en oxygène, et qui se terminent par un micro-éveil, voire un éveil franc, permettant la reprise ventilatoire, accompagnée d’une activation du système nerveux sympathique. La fragmentation du sommeil secondaire aux événements respiratoires anormaux induit une sensation de sommeil chroniquement non réparateur, voire une somnolence franche, des troubles du fonctionnement diurne, retentissant sur la qualité de vie globale.
L’indice d’apnées-hypopnées (IAH) représente le nombre d’apnées-hypopnées comptabilisées au cours de la nuit rapporté à la durée de sommeil : supérieur à 5 par heure, il est pathologique. Le SAOS est défini par un IAH supérieur à 5 par heure associé à des symptômes, nocturnes et diurnes.
Sa prévalence en population générale est élevée, de l’ordre de 15 %, selon une étude récente menée en France.1 Le traitement le plus souvent mis en œuvre est une ventilation nocturne en pression positive continue (PPC). Très efficace pour corriger l’IAH, elle n’est cependant pas toujours bien tolérée, et les abandons de traitement sont de l’ordre de 30 % à un an.
L’indice d’apnées-hypopnées (IAH) représente le nombre d’apnées-hypopnées comptabilisées au cours de la nuit rapporté à la durée de sommeil : supérieur à 5 par heure, il est pathologique. Le SAOS est défini par un IAH supérieur à 5 par heure associé à des symptômes, nocturnes et diurnes.
Sa prévalence en population générale est élevée, de l’ordre de 15 %, selon une étude récente menée en France.1 Le traitement le plus souvent mis en œuvre est une ventilation nocturne en pression positive continue (PPC). Très efficace pour corriger l’IAH, elle n’est cependant pas toujours bien tolérée, et les abandons de traitement sont de l’ordre de 30 % à un an.
Association insomnie et apnées du sommeil : COMISA
La co-occurrence du trouble insomnie et du syndrome d’apnées du sommeil a été rapportée pour la première fois en 1973 par Guilleminault et al.2 Cette association a été « mise de côté » pendant quelques dizaines d’années avant de trouver un regain d’intérêt vers 2010, et le terme de COMISA (co-morbid insomnia and sleep apnea) pour désigner cette association est apparu en 2017.3
La description de chacun de ces troubles illustre le recouvrement sémiologique potentiel entre ces entités : trouble du maintien du sommeil, sommeil non réparateur, asthénie.
La description de chacun de ces troubles illustre le recouvrement sémiologique potentiel entre ces entités : trouble du maintien du sommeil, sommeil non réparateur, asthénie.
Synergie délétère
De plus, l’un et l’autre jouent un rôle synergique délétère : le SAOS, responsable de difficultés de maintien du sommeil, peut être l’un des facteurs précipitants et perpétuants du trouble de l’insomnie, en renforçant la « crainte » de mauvais sommeil. Réciproquement, l’instabilité du sommeil et le seuil d’éveil bas peuvent intervenir directement dans la collapsibilité des voies aériennes responsable du SAOS.
La présence de plaintes d’insomnie chez les patients SAOS est de l’ordre de 40 à 60 % selon les séries, et celle du SAOS dans les cohortes de patients insomniaques est, en miroir, de l’ordre de 30 % dans la méta-analyse la plus récente.4
Les patients avec COMISA souffrent d’un retentissement de leur pathologie en moyenne plus important comparé à celui de patients porteurs de chaque pathologie isolément, tant nocturne (troubles du maintien du sommeil plus sévère, temps de sommeil plus court) que diurne, en particulier d’altérations cognitives, d’irritabilité, de troubles de la concentration, de symptômes dépressifs et anxieux plus importants. La morbi-mortalité et notamment le pronostic cardiovasculaire semblent également altérés.5
La présence de plaintes d’insomnie chez les patients SAOS est de l’ordre de 40 à 60 % selon les séries, et celle du SAOS dans les cohortes de patients insomniaques est, en miroir, de l’ordre de 30 % dans la méta-analyse la plus récente.4
Les patients avec COMISA souffrent d’un retentissement de leur pathologie en moyenne plus important comparé à celui de patients porteurs de chaque pathologie isolément, tant nocturne (troubles du maintien du sommeil plus sévère, temps de sommeil plus court) que diurne, en particulier d’altérations cognitives, d’irritabilité, de troubles de la concentration, de symptômes dépressifs et anxieux plus importants. La morbi-mortalité et notamment le pronostic cardiovasculaire semblent également altérés.5
Critères diagnostiques à préciser
Les critères diagnostiques ne sont pas complètement fixés. L’évaluation du trouble de l’insomnie devrait se systématiser par l’emploi d’un questionnaire dédié, comme l’Insomnia Severity Index (ISI). Bien que celui-ci ait été bâti initialement hors champ des troubles respiratoires du sommeil,6 son utilisation dans le cadre de la COMISA semble désormais admise, mais en distinguant les domaines diurne et nocturne balayés par les différentes questions composant ce score. Quant au diagnostic de SAOS, il repose sur la réalisation d’un enregistrement de variables respiratoires au cours du sommeil, par polygraphie ou polysomnographie.
Adapter le traitement
L’existence d’une insomnie semble affecter négativement l’acceptation et l’observance du traitement par PPC. De ce fait, l’approche proposée actuellement est de débuter simultanément thérapie cognitivo-comportementale pour l’insomnie (TCCi) et PPC, ou de commencer par la TCCi avant de débuter la PPC.
En ce qui concerne la TTCi chez les patients COMISA, des études récentes ont observé l’absence de différence d’efficacité entre les groupes de patients insomniaques et les groupes de patients COMISA. Ainsi une amélioration des scores d’ISI et des paramètres de l’agenda du sommeil avec une diminution des pensées et attitudes dysfonctionnelles par rapport au sommeil ont été mises en évidence.
Aucun événement indésirable lié à l’usage de la TCCi n’a été signalé dans les études, à l’exception d’une augmentation de la somnolence temporaire résultant de la thérapie de restriction de sommeil, et peut-être des résultats inférieurs en matière de retentissements neurocognitifs pour les COMISA comparés aux insomnies sans SAOS, toujours en raison de la restriction de sommeil inhérente. Ces données invitent à définir des programmes de TCCi spécifiques.7 Les approches pharmacologiques de traitement de l’insomnie par les benzodiazépines ne sont plutôt pas recommandées en raison du risque putatif de majoration de trouble respiratoire du sommeil. Par ailleurs, il est indispensable d’envisager chez les patients COMISA des alternatives à la PPC telles que les orthèses d’avancée mandibulaire.
En ce qui concerne la TTCi chez les patients COMISA, des études récentes ont observé l’absence de différence d’efficacité entre les groupes de patients insomniaques et les groupes de patients COMISA. Ainsi une amélioration des scores d’ISI et des paramètres de l’agenda du sommeil avec une diminution des pensées et attitudes dysfonctionnelles par rapport au sommeil ont été mises en évidence.
Aucun événement indésirable lié à l’usage de la TCCi n’a été signalé dans les études, à l’exception d’une augmentation de la somnolence temporaire résultant de la thérapie de restriction de sommeil, et peut-être des résultats inférieurs en matière de retentissements neurocognitifs pour les COMISA comparés aux insomnies sans SAOS, toujours en raison de la restriction de sommeil inhérente. Ces données invitent à définir des programmes de TCCi spécifiques.7 Les approches pharmacologiques de traitement de l’insomnie par les benzodiazépines ne sont plutôt pas recommandées en raison du risque putatif de majoration de trouble respiratoire du sommeil. Par ailleurs, il est indispensable d’envisager chez les patients COMISA des alternatives à la PPC telles que les orthèses d’avancée mandibulaire.
Références
1. Balagny P, Vidal-Petiot E, Renuy A, Matta J, Frija J, Steg PG, et al. Prevalence, treatment and determinants of obstructive sleep apnoea and its symptoms in a population-based French cohort. ERJ Open Res 2023;9:00053-2023.
2. Guilleminault C, Eldridge FL, Dement WC. Insomnia with sleep apnea: A new syndrome. Science 1973;181:856-8.
3. Sweetman A, Lack LC, Catcheside PG, Antic NA, Chai-Coetzer CL, Smith SS, et al. Developing a successful treatment for co-morbid insomnia and sleep apnoea. Sleep Med Rev 2017;33:28-38.
4. Zhang Y, Ren R, Lei F, Zhou J, Zhang J, Wing YK, et al. Worldwide and regional prevalence rates of co-occurrence of insomnia and insomnia symptoms with obstructive sleep apnea: A systematic review and meta-analysis. Sleep Med Rev 2019;45:1-17.
5. Lechat B, Appleton S, Melaku YA, et al. Comorbid insomnia and sleep apnoea is associated with all-cause mortality. Eur Respir J 2022;60:2101958.
6. Bastien CH, Vallières A, Morin CM. Validation of the insomnia severity index as an outcome measure for insomnia research. Sleep Med 2001;2:297-307.
7. Sweetman A, Farrell S, Wallace MD, Crawford M. The effect of cognitive behavioural therapy for insomnia in people with comorbid insomnia and sleep apnoea: A systematic review and meta-analysis. J Sleep Res 2023; 32(6):e13847.
2. Guilleminault C, Eldridge FL, Dement WC. Insomnia with sleep apnea: A new syndrome. Science 1973;181:856-8.
3. Sweetman A, Lack LC, Catcheside PG, Antic NA, Chai-Coetzer CL, Smith SS, et al. Developing a successful treatment for co-morbid insomnia and sleep apnoea. Sleep Med Rev 2017;33:28-38.
4. Zhang Y, Ren R, Lei F, Zhou J, Zhang J, Wing YK, et al. Worldwide and regional prevalence rates of co-occurrence of insomnia and insomnia symptoms with obstructive sleep apnea: A systematic review and meta-analysis. Sleep Med Rev 2019;45:1-17.
5. Lechat B, Appleton S, Melaku YA, et al. Comorbid insomnia and sleep apnoea is associated with all-cause mortality. Eur Respir J 2022;60:2101958.
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7. Sweetman A, Farrell S, Wallace MD, Crawford M. The effect of cognitive behavioural therapy for insomnia in people with comorbid insomnia and sleep apnoea: A systematic review and meta-analysis. J Sleep Res 2023; 32(6):e13847.