Quels sont les principaux cas d’usage de l’intelligence artificielle en ophtalmologie ?
L’intelligence artificielle est déjà d’une aide précieuse en pratique ophtalmologique courante. En effet, des algorithmes sont utilisés en routine pour suivre l’évolution de l’épaisseur des couches de la rétine. Ces algorithmes nous donnent une probabilité d’altération d’une couche de fibres. Nous traduisons cette probabilité en diagnostic d’évolution en la confrontant à d’autres éléments de l’examen.
Elle va être utilisée aussi dans le cadre du dépistage de la rétinopathie diabétique. Le dispositif d’intelligence artificielle IDx-DR* vient d’être autorisée par la Food and Drug Administration.** Son travail est de dépister les rétines atteintes par la maladie diabétique, de les classer par ordre de sévérité et de proposer une conduite à tenir concernant le délai de rendez-vous avec le spécialiste. C’est une utilisation très prometteuse car les programmes de dépistage consomment un temps ophtalmologique aussi important qu’inintéressant. L’intelligence artificielle est donc la bienvenue dans cette activité de dépistage, et il semble acquis que son coût sera inférieur à celui d’un médecin.
C’est sur le thème du dépistage de la rétinopathie diabétique que Google avait fait sa première publication en novembre 2016.*** Cette étude, faite à partir d’une base de 128 000 images de rétine, montrait que l’intelligence artificielle avait une meilleure performance (F-score) que les ophtalmologistes. Plus récemment, en août 2018, le Moorfields Eye Hospital et DeepMind Health ont annoncé avoir mis au point un dispositif d’intelligence artificielle pouvant identifier les maladies oculaires potentiellement cécitantes avec un taux d’efficacité de 94 % concurrençant ainsi le groupe d’experts. Enfin, le laboratoire de traitement de l’information médicale de Brest (LaTIM Inserm UMR 1101) départage les photos de rétine en normales et pas normales.
Elle va être utilisée aussi dans le cadre du dépistage de la rétinopathie diabétique. Le dispositif d’intelligence artificielle IDx-DR* vient d’être autorisée par la Food and Drug Administration.** Son travail est de dépister les rétines atteintes par la maladie diabétique, de les classer par ordre de sévérité et de proposer une conduite à tenir concernant le délai de rendez-vous avec le spécialiste. C’est une utilisation très prometteuse car les programmes de dépistage consomment un temps ophtalmologique aussi important qu’inintéressant. L’intelligence artificielle est donc la bienvenue dans cette activité de dépistage, et il semble acquis que son coût sera inférieur à celui d’un médecin.
C’est sur le thème du dépistage de la rétinopathie diabétique que Google avait fait sa première publication en novembre 2016.*** Cette étude, faite à partir d’une base de 128 000 images de rétine, montrait que l’intelligence artificielle avait une meilleure performance (F-score) que les ophtalmologistes. Plus récemment, en août 2018, le Moorfields Eye Hospital et DeepMind Health ont annoncé avoir mis au point un dispositif d’intelligence artificielle pouvant identifier les maladies oculaires potentiellement cécitantes avec un taux d’efficacité de 94 % concurrençant ainsi le groupe d’experts. Enfin, le laboratoire de traitement de l’information médicale de Brest (LaTIM Inserm UMR 1101) départage les photos de rétine en normales et pas normales.
Dans quels domaines l’intelligence artificielle a-t-elle déjà changé les pratiques ?
Nous utilisons des algorithmes d’aide à la décision depuis longtemps, presque sans le savoir, dans les deux domaines les plus importants de l’ophtalmologie médicale : le glaucome et la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA). Ainsi, l’intelligence artificielle s’immisce dans notre pratique quotidienne grâce aux services qu’elle nous rend pour le suivi des patients. Son utilisation quotidienne nous montre à la fois sa puissance et sa faiblesse. Elle détecte des évolutions que nous avons du mal à voir sans son aide mais inversement elle propose parfois des résultats complètement incohérents. Cela peut se produire en cas de mauvaise acquisition des images et surtout lorsqu’il existe des particularités anatomiques qui faussent ce qu’on appelle « la segmentation des couches ». En effet, une erreur d’identification d’une couche cellulaire rétinienne entraîne une analyse erronée de son épaisseur. L’intelligence artificielle reste ainsi un outil dont les résultats, pour déterminants qu’ils soient, doivent rester en cohérence avec les autres éléments médicaux du patient.
Le déploiement de l’intelligence artificielle menace-t-il le métier d’ophtalmologiste ?
C’est une question qui inquiète tout le monde, sauf le ministère de la Santé qui, de toute façon, n’est pas dans une démarche prédictive de l’adéquation offre-besoins ! Reprenons les trois domaines d’action de l’intelligence artificielle en ophtalmologie. Tout d’abord, l’aide au diagnostic : elle n’a pas d’impact sur l’organisation des soins mais augmentera la qualité de ceux-ci. Ensuite, la nouvelle organisation que l’intelligence artificielle permet dans le champ du dépistage de la rétinopathie diabétique soulagera la communauté ophtalmologique d’une tâche fastidieuse, et lui fera économiser des heures de travail. Enfin, et c’est l’élément important, la capacité de trier les photos du pôle postérieur (rétine et nerf optique) selon la modalité normale-pas normale impactera profondément les flux de patients à examiner par les ophtalmologistes. Aujourd’hui, les patients sont obligés de les consulter avant l’achat de lunettes pour dépister une pathologie rétinienne. À partir du moment où il existera un dispositif d’intelligence artificielle capable d’effectuer ce dépistage, les patients pourront aller directement chez l’opticien, sans perte de chance.
Ainsi, à terme, le dépistage des maladies oculaires disparaîtra des structures ophtalmologiques qui ne recevront que les patients atteints de pathologies. Cette intelligence artificielle provoquera la révolution dans l’organisation des soins en ophtalmologie, et elle va être disponible à un moment où, en France, les professionnels sont en nombre insuffisant. L’intelligence artificielle les aidera à redéployer leurs activités vers le soin.
Ainsi, à terme, le dépistage des maladies oculaires disparaîtra des structures ophtalmologiques qui ne recevront que les patients atteints de pathologies. Cette intelligence artificielle provoquera la révolution dans l’organisation des soins en ophtalmologie, et elle va être disponible à un moment où, en France, les professionnels sont en nombre insuffisant. L’intelligence artificielle les aidera à redéployer leurs activités vers le soin.
Comment évaluez-vous les impacts pour les professions paramédicales ?
Nous ne sommes pas au stade où un patient pourrait être confié totalement à une intelligence artificielle, ce qui impliquerait un accompagnement par du personnel très peu qualifié. Au contraire, nous allons évoluer, du fait de la pénurie médicale, vers une organisation dans laquelle le suivi des patients ayant une pathologie stabilisée sera organisée par des professionnels paramédicaux assistés de l’intelligence artificielle. Dans ce contexte, il est nécessaire d’avoir un corps de professionnels bien formés, c’est-à-dire à la fois capables de s’assurer que l’acquisition des données est la meilleure possible et ayant l’aptitude à douter d’un résultat hors norme. Enfin, et c’est très important, il sera toujours nécessaire d’avoir un intermédiaire humain ayant à la fois des connaissances scientifiques et des qualités humaines pour accompagner les patients. Il y a aussi un problème culturel : la société n’en est pas au stade où l’intelligence artificielle serait tellement intégrée à la culture ambiante que la population lui ferait entièrement confiance. Personne n’a envie d’être suivi par une secrétaire qui lirait des tickets émis par un dispositif d’intelligence artificielle. Il y a donc une place importante pour les paramédicaux.
Quelles sont les orientations pour adapter la formation initiale et continue ?
L’analyse effectuée par l’algorithme est évidemment dépendante de la qualité des prises de mesures, de la qualité des datas entrants. Dans les utilisations que nous en faisons, il convient toujours de contrôler que l’étape d’acquisition des données n’a pas été perturbée par une particularité anatomique du patient. L’utilisation des propositions émises par l’intelligence artificielle ne doit pas être mécanique mais adaptée au contexte. Un peu comme quand le GPS vous propose de tourner à droite mais que la rue est bloquée pour des travaux : vous ne tournez pas. Vous adaptez votre comportement en fonction du contexte en intégrant l’information de l’intelligence artificielle avec d’autres paramètres. Dès lors, l’apprentissage doit être centré sur le doute et la gestion d’une éventuelle dissonance cognitive entre la situation perçue et l’avis de l’intelligence artificielle.
D’ailleurs, l’intelligence artificielle n’a pas d’avis, ce sont les humains qui ont des avis. L’intelligence artificielle ne donne que des probabilités qui sont ensuite utilisées par des humains pour construire un diagnostic. Un des risques liés à l’utilisation de l’intelligence artificielle est la paresse intellectuelle, la démission de toute expertise avec l’acceptation de diagnostics automatisés. Il faut au contraire stimuler la réflexion et rappeler la notion de responsabilité. In fine, seul le médecin est responsable du devenir de son patient. L’intelligence artificielle n’est qu’un outil parmi d’autres. En droit, le médecin est responsable des outils qu’il utilise.
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D’ailleurs, l’intelligence artificielle n’a pas d’avis, ce sont les humains qui ont des avis. L’intelligence artificielle ne donne que des probabilités qui sont ensuite utilisées par des humains pour construire un diagnostic. Un des risques liés à l’utilisation de l’intelligence artificielle est la paresse intellectuelle, la démission de toute expertise avec l’acceptation de diagnostics automatisés. Il faut au contraire stimuler la réflexion et rappeler la notion de responsabilité. In fine, seul le médecin est responsable du devenir de son patient. L’intelligence artificielle n’est qu’un outil parmi d’autres. En droit, le médecin est responsable des outils qu’il utilise.
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Dans cet article
- Quels sont les principaux cas d’usage de l’intelligence artificielle en ophtalmologie ?
- Dans quels domaines l’intelligence artificielle a-t-elle déjà changé les pratiques ?
- Le déploiement de l’intelligence artificielle menace-t-il le métier d’ophtalmologiste ?
- Comment évaluez-vous les impacts pour les professions paramédicales ?
- Quelles sont les orientations pour adapter la formation initiale et continue ?