Les données d’imagerie fonctionnelle ont permis de mieux comprendre la physiopathologie des troubles somatoformes (ou troubles à symptomatologie somatique et apparentés), et en particulier des troubles à symptomatologie neurologique fonctionnelle (ou troubles de conversion) et d’élaborer de nouvelles hypothèses (v. p. 207 ). Les troubles à symptomatologie neurologique fonctionnelle impliqueraient en effet des réseaux dysfonctionnels, que ce soit ceux en lien avec les étapes précoces du contrôle du mouvement volontaire ou ceux associés à la représentation de soi, au sentiment d’agentivité (perception de soi comme étant à l’origine de ses actions), à la régulation des émotions et de la douleur ou enfin de la mémoire. On peut donc désormais explorer des voies thérapeutiques en ciblant plus spécifiquement ces réseaux.
Techniques non invasives de neuromodulation
La stimulation magnétique transcranienne répétée (rTMS) consiste à soumettre le sujet à un champ magnétique, focalisé sur une région de la surface cérébrale (le cortex) par l’application d’une bobine au contact du cuir chevelu. Elle stimule des zones du cerveau de manière précise. Plusieurs paramètres de réalisation peuvent varier afin d’obtenir différents effets thérapeutiques : la fréquence de stimulation (haute ou basse fréquence), la zone cible, l’intensité de la stimulation, le nombre d’impulsions, le nombre de séances. Depuis 2003, des études ont été publiées, en particulier dans le domaine de troubles à symptomatologie neurologique fonctionnelle avec paralysies ou avec mouvements anormaux, cependant les niveaux de preuve sont très variables, allant du case report à l’étude en ouvert, peu ont bénéficié d’une comparaison avec un conditionnement placebo. Les recommandations de Lefaucheur considéraient que le niveau de preuve n’était pas suffisant pour que la rTMS soit indiquée dans ces troubles. Elles soulignaient cependant que les résultats publiés laissent supposer un effet potentiel, ce que des études récentes viennent confirmer.1 Il faut noter cependant que dans le champ des troubles à symptomatologie somatique avec douleur prédominante (ancien trouble douloureux chronique de la 4e version du Manuel statistique et diagnostique des troubles mentaux [DSM-IV]), des essais ouverts suggèrent un effet bénéfique, sur la perception de la douleur et l’amélioration de la qualité de vie dans les actes du quotidien. Enfin, pour certains troubles dissociatifs de la conscience tels que la dépersonnalisation, des protocoles expérimentaux sont en cours dont un en France : ils ciblent le gyrus angulaire droit, zone impliquée dans la perception spatio- temporelle du corps.
La stimulation transcrânienne à courant direct (tDCS) est une autre technique de neurostimulation non invasive qui consiste à faire passer un courant électrique de faible intensité (0,5 à 2 milliampères) pendant une durée de 10 à 30 minutes sur le scalp via deux électrodes (une anode et une cathode). La zone stimulée dépend de leur taille, qui varie de 25 à 35 cm2, et le courant, délivré en continu, permet de moduler l’activité corticale : l’anode augmente l’excitabilité tandis que la cathode la diminue. En modifiant le seuil de dépolarisation de la membrane, la tDCS modifie la probabilité des neurones d’être activés. Cette technique comporte peu d’effets indésirables (si ce n’est quelques réactions dermatologiques au niveau des électrodes et plus rarement des céphalées sensibles au paracétamol). Dans le cadre du traitement des troubles neuropsychiatriques, elle a montré une efficacité dans plusieurs indications (le trouble dépressif caractérisé, la schizophrénie, les acouphènes, certaines addictions). Dans le champ des troubles somatoformes, plusieurs études soulignent son intérêt dans le traitement des troubles à symptomatologie somatique avec douleur (dont la fibromyalgie). Une revue de la littérature de 2017 recommande l’utilisation de cette technique avec l’anode positionnée sur le cortex moteur M1 gauche dans ce type de trouble (grade B).2
La stimulation transcrânienne à courant direct (tDCS) est une autre technique de neurostimulation non invasive qui consiste à faire passer un courant électrique de faible intensité (0,5 à 2 milliampères) pendant une durée de 10 à 30 minutes sur le scalp via deux électrodes (une anode et une cathode). La zone stimulée dépend de leur taille, qui varie de 25 à 35 cm2, et le courant, délivré en continu, permet de moduler l’activité corticale : l’anode augmente l’excitabilité tandis que la cathode la diminue. En modifiant le seuil de dépolarisation de la membrane, la tDCS modifie la probabilité des neurones d’être activés. Cette technique comporte peu d’effets indésirables (si ce n’est quelques réactions dermatologiques au niveau des électrodes et plus rarement des céphalées sensibles au paracétamol). Dans le cadre du traitement des troubles neuropsychiatriques, elle a montré une efficacité dans plusieurs indications (le trouble dépressif caractérisé, la schizophrénie, les acouphènes, certaines addictions). Dans le champ des troubles somatoformes, plusieurs études soulignent son intérêt dans le traitement des troubles à symptomatologie somatique avec douleur (dont la fibromyalgie). Une revue de la littérature de 2017 recommande l’utilisation de cette technique avec l’anode positionnée sur le cortex moteur M1 gauche dans ce type de trouble (grade B).2
Réalité virtuelle
La réalité virtuelle est en passe de prendre une place majeure au sein des nouveaux outils technologiques, en particulier dans le champ de la psychiatrie. Cette technologie permet aux utilisateurs d’interagir avec un monde généré par ordinateur, où les perceptions sensorielles naturelles des utilisateurs sont remplacées par une alternative numérique tridimensionnelle (3D), pouvant être personnalisée en fonction des individus et de la sévérité de leurs troubles. Il est possible d’associer à cette expérience d’autres types d’outils tels que des biocapteurs (pression artérielle, rythme cardiaque, électroencéphalogramme, etc.) qui vont renforcer l’interactivité et surtout permettre de mesurer l’effet des thérapeutiques appliquées à une situation donnée.
La réalité virtuelle est définie par ses trois composantes principales : le niveau d’immersion, qui correspond à la capacité d’occulter le monde extérieur et surtout la place du sujet dans l’environnement, le degré d’autonomie, qui traduit le niveau d’interaction avec les objets de l’environnement et la liberté de l’avatar, et enfin l’interaction, qui représente la technologie utilisée dans l’interface homme-machine.
Cette technologie ouvre des possibilités très larges, puisqu’elle permet de simuler des environnements variés, pouvant être adaptés au sujet. Leur utilisation a fait l’objet de nombreux travaux dans le champ des troubles anxieux par exemple, comme support actif des thérapies cognitives et comportementales (TCC). Ici, c’est la question de l’incarnation du corps qui peut être travaillée.
L’utilisation des TCC dans les troubles à symptomatologie neurologique fonctionnelle a été évaluée. Cependant, peu de données ont été publiées, mais des essais sont en cours, dont un proposé par Kim Bullock à Stanford. L’objectif est double puisqu’elle cherche à démontrer que ces techniques sont acceptables par le patient et qu’elles procurent un bénéfice thérapeutique.3 Elles utilisent un « avatar égocentrique » (la représentation de soi dans le programme est centrée sur le sujet) dans un jeu qui encourage l’activité motrice et implique le suivi du corps à l’aide d’un retour sensoriel. L’objectif est donc de renforcer la sensation de mouvement en temps réel, tout en travaillant sur la désensibilisation aux signaux émotionnels. Les chercheurs émettent l’hypothèse que les patients utiliseront et accepteront cette modalité de traitement en toute sécurité et auront une diminution de la fréquence de leurs symptômes.
La réalité virtuelle est définie par ses trois composantes principales : le niveau d’immersion, qui correspond à la capacité d’occulter le monde extérieur et surtout la place du sujet dans l’environnement, le degré d’autonomie, qui traduit le niveau d’interaction avec les objets de l’environnement et la liberté de l’avatar, et enfin l’interaction, qui représente la technologie utilisée dans l’interface homme-machine.
Cette technologie ouvre des possibilités très larges, puisqu’elle permet de simuler des environnements variés, pouvant être adaptés au sujet. Leur utilisation a fait l’objet de nombreux travaux dans le champ des troubles anxieux par exemple, comme support actif des thérapies cognitives et comportementales (TCC). Ici, c’est la question de l’incarnation du corps qui peut être travaillée.
L’utilisation des TCC dans les troubles à symptomatologie neurologique fonctionnelle a été évaluée. Cependant, peu de données ont été publiées, mais des essais sont en cours, dont un proposé par Kim Bullock à Stanford. L’objectif est double puisqu’elle cherche à démontrer que ces techniques sont acceptables par le patient et qu’elles procurent un bénéfice thérapeutique.3 Elles utilisent un « avatar égocentrique » (la représentation de soi dans le programme est centrée sur le sujet) dans un jeu qui encourage l’activité motrice et implique le suivi du corps à l’aide d’un retour sensoriel. L’objectif est donc de renforcer la sensation de mouvement en temps réel, tout en travaillant sur la désensibilisation aux signaux émotionnels. Les chercheurs émettent l’hypothèse que les patients utiliseront et accepteront cette modalité de traitement en toute sécurité et auront une diminution de la fréquence de leurs symptômes.
Neurofeedback
Une autre technique prometteuse est le neurofeedback. Agissant comme une « rééducation cérébrale », elle s’appuie sur une boucle d’apprentissage afin d’entraîner le cerveau à modifier et à réguler son activité (v . figure ). L’activité cérébrale du patient est mesurée avec précision grâce à un système non invasif d’électroencéphalographie (EEG), qui est ensuite analysée en temps réel afin d’en extraire des informations, qui reflètent souvent les changements dans les pensées, les émotions et les comportements, et sont traduites en un retour visuel ou auditif qui dépend des modifications physiologiques recherchées. Ce retour permet à l’utilisateur de comprendre quelles modifications de son état cérébral sont bénéfiques. Au fil du temps et des séances de rééducation cérébrale, ces modifications pourront être reproduites sans recourir au système de neurofeedback, la modulation des ondes cérébrales devenant un automatisme. Cette technique a déjà démontré un intérêt dans plusieurs études, notamment pour le traitement des troubles dépressifs caractérisés, des troubles anxieux, et des troubles déficits de l’attention avec ou sans hyperactivité (TDAH). Concernant les troubles à symptomatologie neurologique fonctionnelle, cette technique est utilisée pour le traitement des mouvements anormaux (tremblements et troubles neurologiques fonctionnels) : un électrogoniomètre est alors couplé au dispositif de neurofeedback, et le patient va progressivement apprendre à réduire l’intensité du tremblement.4 Il n’existe pour le moment pas de recommandations concernant l’utilisation de ces techniques.
Références
1. Schönfeldt-Lecuona C, Lefaucheur JP, Lepping P, et al. Non-invasive brain stimulation in conversion (functional) weakness and paralysis: a systematic review and future perspectives. Front Neurosci 2016;10:140.
2. Lefaucheur JP, Antal A, Ayache SS, et al. Evidence-based guidelines on the therapeutic use of transcranial direct current stimulation (tDCS). Clin Neurophysiol 2017;128:56-92.
3. Bullock K. Embodied virtual reality therapy for functional neurological symptom/conversion disorder (VR4FND), clinical trial : NCT02764476. Standford University.
4. Espay AJ, Edwards MJ, Oggioni GD, et al. Tremor retrainment as therapeutic strategy in psychogenic (functional) tremor. Parkinsonism Relat Disord 2014;20:647-50.
2. Lefaucheur JP, Antal A, Ayache SS, et al. Evidence-based guidelines on the therapeutic use of transcranial direct current stimulation (tDCS). Clin Neurophysiol 2017;128:56-92.
3. Bullock K. Embodied virtual reality therapy for functional neurological symptom/conversion disorder (VR4FND), clinical trial : NCT02764476. Standford University.
4. Espay AJ, Edwards MJ, Oggioni GD, et al. Tremor retrainment as therapeutic strategy in psychogenic (functional) tremor. Parkinsonism Relat Disord 2014;20:647-50.