De nombreuses études publiées ces dernières années suggèrent que le microbiote intestinal pourrait servir de biomarqueur diagnostique, pronostique ou thérapeutique dans de nombreuses pathologies. Néanmoins, ces études sont, pour la grande majorité, de petite taille et construites dans un objectif de « découverte ». Ainsi, il manque encore à ce jour de grandes études évaluant et validant l’intérêt de biomarqueurs issus du microbiote pour guider le médecin dans des situations cliniques précises.
Pourtant, de nombreux labora- toires proposent aujourd’hui l’analyse du microbiote intestinal moyennant des tarifs souvent très élevés et avec la « promesse » que cela pourra guider le patient et/ou son médecin. À côté de l’absence actuelle d’intérêt clinique de ces tests, des questions se posent vis-à-vis de la validité scientifique même des résultats obtenus. En effet, l’analyse du même échantillon de selle par plusieurs compagnies proposant des analyses de microbiote fécal donne des résultats différents !1 Produire un résultat fiable d’analyse du microbiote intestinal nécessite une maîtrise parfaite des nombreuses étapes allant de l’obtention de l’échantillon jusqu’au rapport d’analyse (v. figure). Une fois l’échantillon obtenu, celui-ci est acheminé au laboratoire, puis l’ADN est extrait, parfois une étape d’amplification est requise avant le séquençage lui-même, puis l’analyse bio-informatique des séquences obtenues qui conduit à la rédaction d’un rapport. Toutes ces étapes sont très sensibles et la moindre variation des procédés employés conduit à de fortes différences sur le résultat final. Bien que des procédés standard permettant de garantir bonne qualité et reproductibilité aient été récemment publiés,2 ils ne sont de toute évidence pas utilisés, expliquant la grande variabilité dans les résultats. Enfin, comme aucune étude à grande échelle n’a été pour l’instant réalisée afin de valider l’intérêt de biomarqueurs issus du microbiote pour guider le clinicien, même si une analyse de bonne qualité était disponible, elle n’aurait pas aujourd’hui d’utilité clinique.
Le rationnel sous-tendant l’utilisation du microbiote comme biomarqueur est en revanche tout à fait solide scientifiquement et cette recherche est d’ailleurs extrêmement dynamique. Le fait que de nombreux industriels sérieux s’y intéressent actuellement fait envisager l’utilisation en pratique clinique de biomarqueurs issus du microbiote dans les prochaines années. Bien que les tests commercialisés actuellement (avec les limitations sus-citées) promettent des analyses globales du microbiote, il est plus probable que les tests qui seront validés et utilisés reposeront sur des analyses ciblées et spécifiques à chaque question clinique posée.
Références
1. https://www.sciencenews.org/blog/gory-details/here’s-poop-getting-your-gut-microbiome-analyzed

2. Costea PI, Zeller G, Sunagawa S, et al. Towards standards for human fecal sample processing in metagenomic studies. Nat Biotechnol 2017;35:1069-76.