La santé vit sa e-révolution : des dossiers médicaux vont sur le Cloud, des dizaines de milliers d’applications mobiles liées à la santé débarquent sur les smartphones, des dispositifs se connectent à Internet. Pour mieux comprendre ce qui se joue dans cette accumulation d’outils, la première question est de déterminer comment caractériser un dispositif médical connecté pour le distinguer des objets de santé connectés. Ils ont en commun la capacité de recevoir et d’envoyer des données mais n’ont pas la même finalité.
Qu’est-ce qu’un dispositif médical connecté ?
Sa finalité médicale est le premier élément qui le caractérise. Qu’il soit à usage individuel comme un défibrillateur implantable connecté ou un capteur de glycémie connecté, ou qu’il soit réservé aux professionnels de santé (logiciel d’aide à la décision diagnostique et thérapeutique), le dispositif doit directement modifier la prise en charge ou récupérer des données pour modifier cette prise en charge.
Comme pour les autres dispositifs médicaux, la finalité du marquage CE (conformité européenne) est de s’assurer de son niveau de sécurité et permettre sa libre circulation dans l’Union européenne. Pour un dispositif connecté, le marquage CE évalue l’objet physique et le logiciel associé. Dans le défibrillateur implantable les deux sont liés, alors que pour le lecteur de glycémie la certification porte d’une part sur le capteur qui mesure la glycémie et d’autre part sur le lecteur spécifique qui donne le taux de glycémie et sa tendance. Mais le niveau de sécurité exigé pour les dispositifs médicaux connectés s’étend au-delà du risque direct pour la santé du patient car il doit respecter la confidentialité des données recueillies. L’hébergeur doit offrir des garanties de la non-diffusion des données sans l’accord explicite des patients. Il doit respecter le Règlement général sur la protection des données (RGPD).
La finalité médicale des dispositifs connectés incite les fabricants à rechercher un accès au remboursement auprès de la Haute Autorité de santé (HAS). L’évaluation par sa commission spécifique prend en compte l’existence du marquage CE, les données des autres agences d’évaluation et bien entendu les données de la littérature.1 La très grande rapidité d’évolution technologique, l’interaction avec d’autres dispositifs médicaux ou plateformes ne facilite pas l’analyse de ces produits. La HAS centre son évaluation individuelle sur le bénéfice clinique, l’observance, l’amélioration de la qualité de vie et, sur le plan collectif, sur une meilleure accessibilité aux soins. Cette approche lui a permis de se prononcer pour une prise en charge d’un logiciel destiné à la télésurveillance médicale des rechutes et complications chez les patients atteints d’un cancer du poumon (Moovcare) et sur une pompe à insuline couplée à un capteur de glucose interstitiel exploitant les données entrées par le patient (Diabeloop) [fig. 1 et 2 ].
L’existence de cyberattaques sur les systèmes d’information d’établissements de santé et la potentialité d’intervention sur des dispositifs médicaux connectés individuels ont rehaussé le niveau de vigilance des autorités sanitaires. En 2017, la constatation de failles de sécurité sur des pompes à insuline de Johnson & Johnson et sur des défibrillateurs de St Jude avait conduit au rappel et à la mise à jour de près d’un demi-million d’appareils.
Comme pour les autres dispositifs médicaux, la finalité du marquage CE (conformité européenne) est de s’assurer de son niveau de sécurité et permettre sa libre circulation dans l’Union européenne. Pour un dispositif connecté, le marquage CE évalue l’objet physique et le logiciel associé. Dans le défibrillateur implantable les deux sont liés, alors que pour le lecteur de glycémie la certification porte d’une part sur le capteur qui mesure la glycémie et d’autre part sur le lecteur spécifique qui donne le taux de glycémie et sa tendance. Mais le niveau de sécurité exigé pour les dispositifs médicaux connectés s’étend au-delà du risque direct pour la santé du patient car il doit respecter la confidentialité des données recueillies. L’hébergeur doit offrir des garanties de la non-diffusion des données sans l’accord explicite des patients. Il doit respecter le Règlement général sur la protection des données (RGPD).
La finalité médicale des dispositifs connectés incite les fabricants à rechercher un accès au remboursement auprès de la Haute Autorité de santé (HAS). L’évaluation par sa commission spécifique prend en compte l’existence du marquage CE, les données des autres agences d’évaluation et bien entendu les données de la littérature.1 La très grande rapidité d’évolution technologique, l’interaction avec d’autres dispositifs médicaux ou plateformes ne facilite pas l’analyse de ces produits. La HAS centre son évaluation individuelle sur le bénéfice clinique, l’observance, l’amélioration de la qualité de vie et, sur le plan collectif, sur une meilleure accessibilité aux soins. Cette approche lui a permis de se prononcer pour une prise en charge d’un logiciel destiné à la télésurveillance médicale des rechutes et complications chez les patients atteints d’un cancer du poumon (Moovcare) et sur une pompe à insuline couplée à un capteur de glucose interstitiel exploitant les données entrées par le patient (Diabeloop) [
L’existence de cyberattaques sur les systèmes d’information d’établissements de santé et la potentialité d’intervention sur des dispositifs médicaux connectés individuels ont rehaussé le niveau de vigilance des autorités sanitaires. En 2017, la constatation de failles de sécurité sur des pompes à insuline de Johnson & Johnson et sur des défibrillateurs de St Jude avait conduit au rappel et à la mise à jour de près d’un demi-million d’appareils.
Objets connectés sans finalité médicale déclarée
Il existe de multiples objets connectés qui ont la capacité de recevoir et d’envoyer des données avec la finalité d’améliorer le « bien-être » de l’utilisateur. C’est le cas des applications destinées à suivre le poids (hors suivi de maladie), à mesurer son exercice physique, à évaluer la qualité du sommeil ou à traiter une anxiété ou des troubles alimentaires. Ces objets connectés ne peuvent prétendre à une prise en charge par la collectivité.
En novembre 2019, le New England Journal of Medicine publie une étude sur près de 400 000 porteurs de l’Apple Watch qui montre sa capacité à détecter une irrégularité du pouls chez plus de 2 000 d’entre eux dont la moitié correspondait à une fibrillation atriale.2 Ce résultat issu d’une collaboration de plusieurs années avec la Food and Drug Administration a enthousiasmé la communauté cardiologique qui doit faire face à une pathologie fréquente et en augmentation ; en effet, la fibrillation atriale est un vrai problème de santé publique avec des conséquences graves justifiant un traitement anticoagulant à vie. Bien qu’il soit possible de disposer d’une technique d’exploration et de détection simple, Apple ne cherche pas, pour le moment, à exploiter ce bénéfice médical en recherchant une prise en charge de la fonctionnalité ECG de ses montres. Elle garde son positionnement de bien-être dans sa population cible. C’est la limite de cette importante étude qui n’incluait quasiment que des sujets de moins de 65 ans possédant une Apple Watch et un IPhone adapté. Cette stratégie d’équiper et de recueillir les données de santé d’une population privilégiée risque d’aggraver la fracture numérique. Un article publié dans la revue Science en octobre 2019 a montré qu’un des algorithmes de stratification des patients les plus utilisés dans le système de santé américain produit des discriminations massives à l’égard des personnes de couleur.3
En France, le développement considérable de la télémédecine a été favorisé par le remboursement des téléconsultations et la prise de conscience, favorisée par la pandémie de la Covid-19, de l’avantage de ces consultations pour les soignants et les malades ayant des difficultés pour se déplacer. La prise en charge allant jusqu’à un taux de remboursement de 100 % et un accompagnement institutionnalisé peut être considéré comme le principal outil pour limiter cette fracture numérique.
En novembre 2019, le New England Journal of Medicine publie une étude sur près de 400 000 porteurs de l’Apple Watch qui montre sa capacité à détecter une irrégularité du pouls chez plus de 2 000 d’entre eux dont la moitié correspondait à une fibrillation atriale.2 Ce résultat issu d’une collaboration de plusieurs années avec la Food and Drug Administration a enthousiasmé la communauté cardiologique qui doit faire face à une pathologie fréquente et en augmentation ; en effet, la fibrillation atriale est un vrai problème de santé publique avec des conséquences graves justifiant un traitement anticoagulant à vie. Bien qu’il soit possible de disposer d’une technique d’exploration et de détection simple, Apple ne cherche pas, pour le moment, à exploiter ce bénéfice médical en recherchant une prise en charge de la fonctionnalité ECG de ses montres. Elle garde son positionnement de bien-être dans sa population cible. C’est la limite de cette importante étude qui n’incluait quasiment que des sujets de moins de 65 ans possédant une Apple Watch et un IPhone adapté. Cette stratégie d’équiper et de recueillir les données de santé d’une population privilégiée risque d’aggraver la fracture numérique. Un article publié dans la revue Science en octobre 2019 a montré qu’un des algorithmes de stratification des patients les plus utilisés dans le système de santé américain produit des discriminations massives à l’égard des personnes de couleur.3
En France, le développement considérable de la télémédecine a été favorisé par le remboursement des téléconsultations et la prise de conscience, favorisée par la pandémie de la Covid-19, de l’avantage de ces consultations pour les soignants et les malades ayant des difficultés pour se déplacer. La prise en charge allant jusqu’à un taux de remboursement de 100 % et un accompagnement institutionnalisé peut être considéré comme le principal outil pour limiter cette fracture numérique.
Remerciements Les auteurs remercient le Dr Yann-Mael Le Douarin, conseiller médical télésanté (télémédecine et télésoin) – Ministère des Solidarités et de la Santé.
Références
1. Haute Autorité de santé. Guide sur les spécificités d’évaluation clinique d’un dispositif médical connecté (DMC) en vue de son accès au remboursement. Évaluation des dispositifs médicaux par la CNEDiMTS. HAS, janvier 2019. www.has-sante.fr ou https://bit.ly/3tdtEUx
2. Perez MV, Mahaffey KW, Hedlin H, et al.; Apple Heart Study investigators. Large-scale assessment of a smartwatch to identify atrial fibrillation. N Engl J Med 2019;381:1909-17.
3. Obermeyer Z, Powers B, Vogeli C, Mullainathan S. Dissecting racial bias in an algorithm used to manage the health of populations. Science 2019;366:447-53.
2. Perez MV, Mahaffey KW, Hedlin H, et al.; Apple Heart Study investigators. Large-scale assessment of a smartwatch to identify atrial fibrillation. N Engl J Med 2019;381:1909-17.
3. Obermeyer Z, Powers B, Vogeli C, Mullainathan S. Dissecting racial bias in an algorithm used to manage the health of populations. Science 2019;366:447-53.