Les probiotiques sont largement utilisés en automédication sous forme de médicaments, de compléments alimentaires ou d’aliments. Leur place en médecine fondée sur des preuves est réelle mais limitée et mal connue des prescripteurs. Stricto sensu, le qualificatif « probiotique » devrait être réservé à des bactéries ou levures ingérées vivantes ayant une capacité démontrée de produire des effets bénéfiques pour la santé de l’hôte.1 Le tableau ci-contre cite les produits étudiés en tant que tels et ayant des effets positifs. L’usage courant ne respecte pas cette définition scientifique, et le qualificatif est souvent donné à d’autres produits qui n’ont pas été étudiés chez l’homme mais contiennent des souches qui ont fait l’objet d’études cliniques (par exemple Lactobacillus rhamnosus GG, L. acidophilus La5, L. plantarum 299 et 299V CECT 7484 et Bifidobacterium animalis subsp. lactis BB12). Le prescripteur qui les choisit extrapole au produit final les résultats obtenus avec la souche, or cela est source de hasard si les doses ne sont pas les mêmes ou si la préparation du produit diffère.1, 2 Enfin, beaucoup d’autres produits contiennent des souches qui n’ont pas fait l’objet d’études humaines, et leur vendeur ne met en avant que des propriétés de survie dans l’intestin ou leur taxonomie voisine de souches efficaces qui ne doivent pas leurrer le professionnel de santé.
Les recommandations de sociétés savantes fondées sur l’analyse des essais randomisés contrôlés donnent une place à l’utilisation médicale de probiotiques dans quatre domaines : les troubles dus aux antibiotiques et l’infection à Clostridium difficile ; les gastroentérites aiguës ; le syndrome de l’intestin irritable et l’inconfort digestif ; la rectocolite hémorragique et la pochite.1, 3-6 D’autres domaines comme ceux de la prévention de l’allergie, des entérocolites aiguës nécrosantes du prématuré, et des infections hivernales ont aussi donné lieu à des essais randomisés contrôlés mais ne font pas encore l’objet de recommandations.
Les recommandations de sociétés savantes fondées sur l’analyse des essais randomisés contrôlés donnent une place à l’utilisation médicale de probiotiques dans quatre domaines : les troubles dus aux antibiotiques et l’infection à Clostridium difficile ; les gastroentérites aiguës ; le syndrome de l’intestin irritable et l’inconfort digestif ; la rectocolite hémorragique et la pochite.1, 3-6 D’autres domaines comme ceux de la prévention de l’allergie, des entérocolites aiguës nécrosantes du prématuré, et des infections hivernales ont aussi donné lieu à des essais randomisés contrôlés mais ne font pas encore l’objet de recommandations.
Troubles digestifs dus aux antibiotiques et infection à C. difficile
Les recommandations pour l’utilisation préventive ou curative de probiotiques dans ces indications diffèrent.1, 3, 4 La méta-analyse des 21 essais randomisés contrôlés faits avec le seul Saccharomyces. boulardii CNCMI-745 (4 780 malades) montre une réduction du risque de diarrhée de moitié aussi bien chez les enfants que chez les adultes1,3. Les experts de la Société européenne pédiatrique de gastroentérologie et nutrition (ESPGHAN) proposent « l’utilisation de L. rhamnosus GG ou S. boulardii CNCM I-745 en prévention d’une diarrhée associée aux antibiotiques en cas de facteurs de risque incluant le type et la durée de l’antibiothérapie, l’âge de l’enfant (moins de 2 ans), des comorbidités, une hospitalisation ou des antécédents de diarrhée aux antibiotiques (niveau de preuve modéré et recommandation forte) ».3 La méta-analyse Cochrane des essais randomisés contrôlés testant des probiotiques dans les diarrhées à C. difficile conclut à un « niveau de preuve modéré » et retient deux produits avec un effet plus net : S. boulardii CNCM I-745 et L. rhamnosusGG.4
Gastroentérites aiguës
Les conclusions du comité d’experts de l’ESPGHAN sont que « certaines souches de probiotiques peuvent être administrées dans le but de raccourcir la diarrhée, dès le début des symptômes en adjonction des solutés oraux de réhydratation ». Leurs recom- mandations sont « fortes (niveau de preuve faible) pour L. rhamnosus GG (dose > 1010/j pendant 5 à 7 jours) et S. boulardii CNCM I-745(250 et 750 mg pendant 5 à 7 jours) et faibles (très faible niveau de preuve) pour L. reuteri DSM 17938 ».5 Un essai randomisé contrôlé récent n’a pas montré d’efficacité de L. rhamnosus GG (1010 2 fois/j) pour améliorer les gastroentérites modérées à sévères chez 971 enfants d’âge médian 1,4 an ; ce qui diminue le niveau de preuve d’efficacité de cette souche dans cette situation.6
Syndrome de l’intestin irritable
Les recommandations de la World Gastroenterology Organisation sont les suivantes :7« Des souches spécifiques de probiotiques, comme B. lactis DN-173010 (Activia) et le cocktail probiotique VSL#3, ont des preuves d’efficacité clinique sur les ballonnements et flatulences. D’autres, comme B. infantis 35624 (Alflorex), réduisent les ballonnements et les autres symptômes cardinaux du syndrome de l’intestin irritable ».7
Maladies inflammatoires chroniques de l’intestin
La place des probiotiques est actuellement nulle dans la maladie de Crohn et limitée dans la pochite et la rectocolite hémorragique.8 Les recommandations européennes de l’European Crohn’s and Colitis Organisation statuent :8 « le produit VSL#3 a une efficacité pour maintenir la rémission induite par antibiotique et une efficacité pour prévenir la pochite »… dans le traitement de poussées de rectocolite hémorragique non sévères. « Il semble (niveau de preuve limité) que certains probiotiques, notamment VSL#3, aient un bénéfice thérapeutique quand on les ajoute au traitement usuel. » Enfin, « trois essais randomisés contrôlés ont suggéré que le probiotique Escherichia coli Nissle 1917 (Mutaflor, commercialisé en Allemagne) n’est pas moins effficace qu’une petite dose de 5-ASA pour prévenir la rechute ».
Références
1. Guarner F, Sanders ME, Eliakim R, et al; World Gastroenterology Organisation review team. Probiotiques et prébiotiques. World Gastroenterology Organisation Global Guidelines, février 2017. www.worldgastroenterology.org ou http://bit.ly/2xgnBDD.
2. Biagioli M, Capobianco D, Carino A, et al. Divergent effectiveness of multispecies probiotic preparations on intestinal microbiota structure depends on metabolic properties. Nutrients 2019;11. pii: E325. doi: 10.3390/nu11020325
3. Szajewska H, Canani RB, Guarino A, et al; ESPGHAN working group for probioticsprebiotics. Probiotics for the prevention of antibiotic-associated diarrhea in children. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2016;62:495-506.
4. Goldenberg JZ, Yap C, Lytvyn L, et al. Probiotics for the prevention of Clostridium difficile-associated diarrhea in adults and children. Cochrane Database Syst Rev 2017;12:CD006095.
5. Szajewska H, Guarino A, Hojsak I, et al; European Society for Pediatric Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition. Use of probiotics for management of acute gastroenteritis: a position paper by the ESPGHAN working group for probiotics and prebiotics. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2014;58:531-9.
6. Schnadower D, Tarr PI, Casper TC, et al. Lactobacillus rhamnosus GG versus Placebo for Acute Gastroenteritis in Children. N Engl J Med 2018;379:2002-14.
7. Quigley EM, Fried M, Gwee KA, et al; Review team. World Gastroenterology Organisation Global guidelines irritable bowel syndrome: a global perspective update September 2015. J Clin Gastroenterol 2016;50:704-13.
8. Magro F, Gionchetti P, Eliakim R, et al; European Crohn's and Colitis Organisation [ECCO]. Third European evidence-based consensus on diagnosis and management of ulcerative colitis. Part 1: Definitions, diagnosis, extra-intestinal manifestations, pregnancy, cancer surveillance, surgery, and ileo-anal pouch disorders. J Crohns Colitis 2017;11:649-70.
2. Biagioli M, Capobianco D, Carino A, et al. Divergent effectiveness of multispecies probiotic preparations on intestinal microbiota structure depends on metabolic properties. Nutrients 2019;11. pii: E325. doi: 10.3390/nu11020325
3. Szajewska H, Canani RB, Guarino A, et al; ESPGHAN working group for probioticsprebiotics. Probiotics for the prevention of antibiotic-associated diarrhea in children. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2016;62:495-506.
4. Goldenberg JZ, Yap C, Lytvyn L, et al. Probiotics for the prevention of Clostridium difficile-associated diarrhea in adults and children. Cochrane Database Syst Rev 2017;12:CD006095.
5. Szajewska H, Guarino A, Hojsak I, et al; European Society for Pediatric Gastroenterology, Hepatology, and Nutrition. Use of probiotics for management of acute gastroenteritis: a position paper by the ESPGHAN working group for probiotics and prebiotics. J Pediatr Gastroenterol Nutr 2014;58:531-9.
6. Schnadower D, Tarr PI, Casper TC, et al. Lactobacillus rhamnosus GG versus Placebo for Acute Gastroenteritis in Children. N Engl J Med 2018;379:2002-14.
7. Quigley EM, Fried M, Gwee KA, et al; Review team. World Gastroenterology Organisation Global guidelines irritable bowel syndrome: a global perspective update September 2015. J Clin Gastroenterol 2016;50:704-13.
8. Magro F, Gionchetti P, Eliakim R, et al; European Crohn's and Colitis Organisation [ECCO]. Third European evidence-based consensus on diagnosis and management of ulcerative colitis. Part 1: Definitions, diagnosis, extra-intestinal manifestations, pregnancy, cancer surveillance, surgery, and ileo-anal pouch disorders. J Crohns Colitis 2017;11:649-70.