Les personnes en situation de précarité ont des besoins multiples et complexes car imbriqués les uns avec les autres. Leur prise en charge doit être globale, et nécessite l’intervention de différents acteurs, travaillant en multidisciplinarité et en complémentarité. Les professionnels de santé – en particulier les médecins traitants – qui les reçoivent doivent repérer les obstacles qu’ils rencontrent dans leur accès aux soins et à la poursuite de ceux-ci afin d’adapter leur prise en charge, et d’orienter ces patients de manière optimale. Pour cela, il est nécessaire de connaître les structures disponibles, leurs modalités d’accès et de développer un réseau de partenaires. Alors même que les consultations pour ces patients sont longues, ce travail est lui-même chronophage et rendu difficile par la multi­plicité des dispositifs, leur manque de visibilité et la modification rapide de leurs offres. Les différentes structures de recours pour orienter des personnes en situation de vulnérabilité sont médicales, sociales ou associatives.

Prise en charge médicale

Il existe différents lieux de soins adaptés pour accueillir les personnes précaires, selon qu’elles ont ou non une couverture sociale.
Dans le cas où une personne est bénéficiaire d’une couverture sociale complète de type Puma avec complémentaire santé solidaire (CSS anciennement appelée CMUc), ou Puma avec mutuelle, ou aide médicale d’État (AME), elle peut être suivie médicalement en ambulatoire, chez un praticien libéral, ou dans un centre de santé (municipal, mutualiste, associatif) qui ne fait pas de dépassement d’honoraires.
Les Permanences d’accès aux soins de santé (PASS), en général hospitalières, sont à privilégier si la personne n’a aucune couverture sociale, ou si elle est incomplète.1 Les soins proposés dans les PASS sont uniquement ambulatoires, mais les professionnels orientent la personne vers une hospitalisation quand elle est nécessaire. Les PASS peuvent être généralistes ou spécialistes (dentaire, pédiatrique, ophtalmologiques…). Dans certaines régions il existe des structures associatives qui reçoivent le public sans droits ouverts à une couverture maladie. C’est le cas des Centres d’accueil de soins et d’orientation (CASO) de Médecins du Monde. En l’Île-de-France et dans quelques régions, un bus social dentaire intervient rapidement, dans différents lieux, pour les personnes sans droits ouverts. Le planning est disponible sur le site busdentaire.fr. Pour les enfants et les femmes enceintes, les centres de Protection maternelle et infantile (PMI) sont adaptés, et dispensent des conseils et soins médicaux de prévention essentiellement.
Pour les personnes précaires en situation complexe (qu’elles aient ou non une couverture sociale) et qui ont des difficultés dans leur parcours de soins en plus de difficultés administratives ou sociales, les réseaux de santé peuvent être sollicités. Ils interviennent en appui aux professionnels de santé pour la coordination, la continuité ou l’interdisciplinarité des prises en charge des personnes en situation complexe. Ils peuvent être plurithématiques (gériatrie, oncologie…) comme le réseau ASDES dans les Hauts-de-Seine, le REPY dans les Yvelines. Dans le domaine de l’accès aux soins, ils constituent un dispositif ressource supplémentaire. Bientôt les réseaux de santé seront remplacés par les Dispositifs d’appui à la coordination (DAC), toujours financés par l’Agence régionale de santé.2
Les personnes précaires doivent fournir pour leurs démarches administratives de nombreux certificats médicaux. Elles sont donc orientées par leur assistante sociale ou leur avocat vers le médecin pour la rédaction de ce certificat. Dans l’intérêt du patient il est primordial de préciser le motif du certificat afin de répondre au mieux à cette demande : certificat descriptif de coups et blessures dans le cas d’une demande d’asile à rédiger sur papier libre, certificat à destination du médecin de l’Office français de l’immigration et de l’intégration (OFII) pour une demande de titre de séjour à rédiger sur formulaire spécifique, certificat pour faciliter un hébergement… En cas de doute, les professionnels des PASS peuvent être un appui au praticien libéral sans s’y substituer.3

Prise en charge sociale

Elle est assurée principalement par les assistantes sociales qui interviennent, selon la structure, pour un public ou un besoin précis. Cet accompagnement est une aide pour accéder aux droits sociaux, en particulier aux droits à la couverture santé, et pour les démarches administratives souvent complexes. Selon la structure, il est réservé aux personnes en situation régulière ou ouvert à tous.
Pour accéder à une couverture sociale, toute personne, y compris en situation irrégulière, peut se rendre à la Caisse primaire d’assurance maladie de son quartier. Elle peut y effectuer les démarches en ligne, avec un accompagnement social si besoin. Les personnes en situation de grande vulnérabilité peuvent être reçues sur rendez-vous. Sur le site ameli.fr, des informations sont disponibles, sur les droits à une couverture médicale et sur les modalités pour les obtenir. Les assistantes sociales hospitalières, qu’elles soient référentes PASS ou dans les services hospitaliers, aident les personnes vulnérables à faire valoir leurs droits à une couverture sociale. Elles assurent un rôle d’accueil, d’information et d’orientation, en prenant en compte les particularités de ce public. Elles sont également en lien avec les autres acteurs institutionnels locaux.
Les personnes en situation régulière peuvent se rendre dans les espaces départementaux d’action sociale (EDAS) ou les Centres communaux d’action sociale (CCAS) qui accueillent, orientent et accompagnent sur le plan social les personnes en difficulté administrative ou juridique : soutiens financiers, aides à domicile, places d'hébergement, allocation person­nalisée d'autonomie, prestation de compensation du handicap. À Paris, les Permanences sociales d’accueil (PSA) proposent aux personnes en situation régulière, sans domicile, fixe une domiciliation administrative entre autres.
Sur le plan juridique ou administratif, les Points d'accès au droit (PAD) sont des lieux d’accueil généralistes, gratuits, qui permettent d’apporter une information de proximité sur les droits et devoirs. Il existe également des associations spécialisées dans les droits des migrants, telle que La Cimade qui défend la dignité et les droits des personnes réfugiées et migrantes, quelles que soient leurs origines. Le site web lacimade.org recense les lieux d’accueil et les permanences. Certains lieux de soins tels que le Comede, quelques PASS et lieux d’hébergement peuvent répondre aussi à ces demandes.
Les conditions d’hébergement vont largement influencer l’état de santé, et les possibilités à suivre correctement le parcours de soins proposé. Pour les personnes sans difficulté majeure de santé, le professionnel de premier recours peut indiquer le Samu social : le 115, numéro d’urgence, accessible 24 h/24, unique pour toute la France, répond à tous les usagers. En parallèle, le Service intégré d’accueil et d’orientation (SIAO) est une plateforme départementale à destination uniquement des professionnels sociaux accompagnant les usagers dans leur recherche d’hébergement. Cette première étape indispensable permet une évaluation par les écoutants sociaux afin d’optimiser l’orientation vers des Centres d’hébergement d’urgence (CHU). En effet, certains centres vont recevoir un public particulier : femmes isolées, familles, demandeurs d’asile (centres d’accueil des demandeurs d’asile [CADA]), migrants (centres d’accueil et d’évaluation sociale [CAES]). Malheureusement le 115 est souvent saturé et les places d’hébergement sont insuffisantes. Par la suite, l’accompagnement social permet de trouver éventuellement une place dans un hébergement plus pérenne de type Centre d’hébergement et de réinsertion sociale (CHRS), voire logement social. Si la personne précaire relève de soins médicaux tels que des soins infirmiers incompatibles avec la vie dans la rue, mais sans nécessité d’hospitalisation, il est possible de faxer au Samu social une demande de lits infirmiers (Lits halte soins santé [LHSS]). D’autres structures telles que les Lits d’accueil médicalisés (LAM) accueillent des personnes majeures sans domicile fixe atteintes de pathologies lourdes et chroniques handicapantes avec une perte d’autonomie. À Paris, les Espaces solidarité insertion (ESI), gérés par des associations telles que Aurore, Emmaüs ou la Croix-Rouge accueillent de manière inconditionnelle toutes les personnes vulnérables, y compris en situation irrégulière, pour un accueil de jour : repas chaud, douches, accompagnement social, vestiaire.

Le tissu associatif

Enfin, la prise en charge des personnes les plus démunies doit être complétée par des aides qui sont apportées par le tissu associatif. La liste des associations est, en règle générale, publiée dans le livret de la ville disponible en mairie et permet de comprendre les aides proposées, et les modalités d’accès à ces structures. Certaines associations comme la Croix-Rouge, le Secours catholique, proposent une domiciliation administrative, point de départ de toutes les démarches à venir. Certaines offrent un accès à un vestiaire, une aide alimentaire (les Restos du Cœur, les épiceries solidaires), des douches, voire un soutien financier complémentaire. Selon les régions, certaines associations ont des missions particulières, par exemple Médecins sans frontières et Médecins du Monde, accueillent et organisent la prise en charge des migrants mineurs non accompagnés.

Maillage local et médical

La prise en charge des personnes précaires est donc complexe, et nécessite la coordination de différents acteurs médicaux et sociaux. Une des conditions de réussite est l’adhésion de la communauté à ce travail en collaboration pluridisciplinaire. Le maillage local médical et social est riche et permet de proposer une prise en charge globale et adaptée à ce public fragile. Il n’existe pas d’annuaire des ressources par département, mais les sites des mairies, des ARS, recensent une partie de ces dispositifs.
Références
1. DGOS, circulaire n° DGOS/R4/2013/246 du 18 juin 2013 relative à l’organisation et le fonctionnement des permanences d’accès aux soins de santé (PASS).
2. Loi de santé 24 juillet 2019.
3. Comede. Soins et accompagnement – Migrants/étrangers en situation précaire. Guide pratique pour les professionnels. Comede, 2015. https://bit.ly/3avcs3U

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Résumé

Les personnes en situation de précarité ont des besoins multiples et complexes. Leur prise en charge doit être globale, elle nécessite la coordination de différents acteurs médicaux et sociaux travaillant en multidisciplinarité et en complémentarité. Repérer les structures disponibles et leurs modalités d’accès est la première étape pour le professionnel de santé qui reçoit une personne vulnérable ou démunie : elles peuvent être médicales, sociales ou associatives. Les sites institutionnels de l’Agence régionale de santé, des départements et des collectivités locales recensent une partie de ces structures.