La maladie thromboembolique veineuse (MTEV) – thrombose veineuse profonde des membres inférieurs et embolie pulmonaire – est un problème de santé publique puisqu’elle est la troisième cause de mortalité au monde.1 Plus finement, dans les pays occidentaux, l’incidence de la MTEV et de l’embolie pulmonaire est d’environ 0,87 à 1,82 pour 1 000 personnes-années et 0,45 à 0,95 pour 1 000 personnes-années, respectivement.2 Il est classique de définir trois types de facteurs qui majorent le risque de MTEV et peuvent se cumuler : facteurs associés à une stase veineuse, à un état d’hypercoagulabilité ou liés à des lésions/inflammation endothéliales. Ainsi, parmi les facteurs de risque les plus connus, on peut citer l’âge, un contexte postopératoire, un alitement prolongé, une maladie néoplasique, une obésité, voire une thrombophilie génétique…
Un risque théorique élevé
Avec plus de 40 000 patients opérés chaque année en France depuis une décennie, la chirurgie bariatrique s’est imposée comme une alternative efficace à une prise en charge médicale bien conduite pour les patients souffrant d’obésité morbide, avec une balance bénéfice/risque qui lui semble favorable.3 Cependant, cette chirurgie est considérée comme à haut risque de MTEV : contexte postopératoire, obésité, comorbidités (insuffisance veineuse sévère, par exemple), risque de complications infectieuses postopératoires (péritonite, par exemple), intervention parfois longue, risque d’alitement prolongé pour les personnes dont l’indice de masse corporelle (IMC) est très élevé et dont la réhabilitation est difficile…
Une thromboprophylaxie active
Une étude portant sur des données nationales françaises publiées en 2018 a parfaitement établi le risque de MTEV en postopératoire d’une chirurgie bariatrique. Sur plus de 110 000 chirurgies bariatriques, son incidence, dans les 90 jours qui suivent l’intervention, a été estimée à 0,51 %, dont une majorité diagnostiquée après la sortie du patient de l’hôpital.4 Les grands facteurs de risque identifiés en analyse multivariée étaient : l’âge croissant, les obésités les plus sévères, les complications postopératoires, les antécédents de MTEV. À noter que les profils de risque de la sleeve gastrectomie et du bypass gastrique étaient globalement proches.4 Ce risque postopératoire peut cependant paraître faible, comparé à celui d’autres chirurgies digestives lourdes (incidence évaluée à plus de 2 % après chirurgie pour cancer de l’œsophage, par exemple).5 Ceci s’explique par l’utilisation d’une voie mini-invasive (cœlioscopie) qui autorise une déambulation le soir même, un taux final de complications chirurgicales graves très faible (inférieur à 4 %)6 et une stratégie de thromboprophylaxie médicamenteuse agressive et répandue.4
En matière de thromboprophylaxie, les recommandations ont été éditées en 2011 par la Société française d’anesthésie-réanimation7 et réactualisées en 2018 à la suite des travaux de l’European Society of Anesthesiology. Une thromboprophylaxie postopératoire pendant au moins dix jours est préconisée : par une héparine de bas poids moléculaire ou du fondaparinux, avec des doses pouvant aller de 3 000 à 6 000 UI anti-Xa toutes les douze heures, par voie sous-cutanée. Les recommandations émettent la possibilité d’une dose quotidienne unique. La contention élastique n’est plus d’actualité (sauf en cas d’insuffisance veineuse symptomatique), mais la compression intermittente pendant l’hospitalisation reste indiquée.8 Enfin, la place d’une thromboprophylaxie par les anticoagulants oraux directs n’est pas établie.
En matière de thromboprophylaxie, les recommandations ont été éditées en 2011 par la Société française d’anesthésie-réanimation7 et réactualisées en 2018 à la suite des travaux de l’European Society of Anesthesiology. Une thromboprophylaxie postopératoire pendant au moins dix jours est préconisée : par une héparine de bas poids moléculaire ou du fondaparinux, avec des doses pouvant aller de 3 000 à 6 000 UI anti-Xa toutes les douze heures, par voie sous-cutanée. Les recommandations émettent la possibilité d’une dose quotidienne unique. La contention élastique n’est plus d’actualité (sauf en cas d’insuffisance veineuse symptomatique), mais la compression intermittente pendant l’hospitalisation reste indiquée.8 Enfin, la place d’une thromboprophylaxie par les anticoagulants oraux directs n’est pas établie.
Vers une désescalade ?
Le risque de MTEV après chirurgie bariatrique, théoriquement élevé, est finalement faible, à l’aune des données massives et des grandes cohortes, grâce à des suites postopératoires maîtrisées et à une thromboprophylaxie active. Dans ce contexte, et avec le développement de la chirurgie ambulatoire et de la réhabilitation accélérée, les réflexions actuelles sont à la désescalade des protocoles de thromboprophylaxie.