Chez les enfants avec trouble du spectre de l’autisme (TSA), la robotique facilite les apprentissages sociaux dans un cadre ludique, sécurisant et progressif. À ce jour, les scénarios précis, la faisabilité à long terme et l’efficacité clinique sont en cours d’évaluation.
Ces 10 dernières années, plusieurs modèles de robots ont été utilisés, uniquement dans des programmes de recherche. Ils ont différentes caractéristiques, formes (humanoïde, animale, mécanique ; encadré) et fonctionnalités (capacité de choix ou de contrôle, de déplacement, possibilité d’offrir des récompenses sensorielles, qualité d’engagement spontané lors des interactions avec l’enfant).1, 2

Pourquoi les robots ?

Chez les personnes avec TSA, l’entrée en interaction sociale, le traitement du langage oral sont compliqués, voire impossibles. Ces enfants recherchent volontiers un environnement immuable. Les robots proposent des interactions plus adaptées à leurs particularités. Contrairement aux humains, leurs réponses sont simplifiées, prévisibles, répétitives, donc rassurantes. D’attractivité visuelle différente, anthropomorphes ou non, ils suscitent l’intérêt de ces enfants, augmentant ainsi leur motivation à interagir et soutenant de nouvelles acquisitions, sans jugement.1

Comment les utiliser ?

Les protocoles de recherche ont analysé essentiellement l’interaction entre un patient donné et un robot. La plupart du temps, l’enfant est accompagné par un clinicien (école Georges-Heuyer de la Pitié-Salpêtrière).
Parfois, les robots sont utilisés auprès d’un groupe, par exemple dans des classes spécialisées (unité d’enseignement maternelle autisme [UEMA] de l’école maternelle La Fontaine aux jardins de Quetigny, académie de Dijon).
Plus ou moins autonomes, ils peuvent être contrôlés en direct à distance par un opérateur (en mode magicien d’Oz), comme le robot NAO. Il n’est donc pas en situation interactive réelle, cela limite la complexité des scénarios d’apprentissage.

Que travaillent-ils ?

D’après les études récentes, les personnes avec TSA montrent parfois plus d’interactions avec des robots qu’avec des humains.2
C’est pourquoi ces outils permettent de travailler les habiletés sociales : imitation, attention conjointe, compréhension des gestes mais également des expressions faciales ; langage oral (moins souvent). Les robots sont l’interlocuteur principal ou servent de support dans la communication de l’enfant avec une autre personne. Plus rarement, ils font travailler des capacités motrices ou encore l’intégration des stimulus sensoriels, souvent perturbée chez ces patients.
Enfin, quelques travaux émergents s’intéressent aux compétences scolaires ou préscolaires.3

Effet protégé et robot co-writer

Dans notre service et l’école rattachée, le robot NAO est utilisé dans un scénario développé en coopération avec l’école polytechnique fédérale de Lausanne : pendant des séances hebdomadaires au cours de l’année scolaire, l’enfant a pour consigne de lui enseigner l’écriture, grâce à une tablette graphique. Il se sent responsable de ses progrès, c’est l’« effet protégé ». Il doit évaluer l’écriture du robot pour comprendre quel point améliorer.
En analysant son écriture et celle du robot, il entraîne ses capacités d’auto- évaluation. Les enfants attribuent spontanément des compétences à la machine car ils ont des croyances et des projections : « le robot est plus nul que moi », « il a bien progressé »,« il est un peu fatigué aujourd’hui ».
Ce système est associé à des jeux sérieux dont l’objectif est de travailler certains aspects perturbés de l’écriture (dysgraphie) : pression, inclinaison et vitesse.

Quelles perspectives ?

La robotique pourrait être utile dans la caractérisation objective des difficultés d’interaction sociale via l’utilisation des capteurs du robot (imagerie comportementale).
De plus, l’intérêt des robots par rapport à de simples avatars virtuels doit être mieux étudié.
Les résultats restent encore préliminaires. Si la littérature est riche d’un point de vue qualitatif et descriptif, les études portent sur de faibles échantillons de patients. Il est donc difficile d’évaluer les effets de ces supports, et encore plus d’estimer si les acquis sont utilisés dans la vie quotidienne. Pour autant, ce domaine de recherche est dynamique et prometteur.5
Références
1. Boucenna S, Narzisi A, Tilmont E, et al. Information communication technology (ICT) and autism: overview and focus on early developmental issues and social robotics. Cognitive Computation 2014;6:722-40.
2. Scassellati B, Admoni H, Matarić M. Robots for use in autism research. Ann Rev Biomed Eng 2012;14:275-94.
3. Huijnen CA, Lexis MA, Jansens R, de Witte LP. Mapping robots to therapy and educational objectives for children with autism spectrum disorder. J Autism Dev Disord 2016;46:2100-14.
4. Asselborn T, Gargot T, Kidziński Ł, et al. Automated human-level diagnosis of dysgraphia using a consumer tablet. NPG Digit Med 2018;1:42.
5. Begum M, Serna RW, Yanco HA. Are robots ready to deliver autism interventions? A comprehensive review. Int J Soc Robot 2016;8:157-81.

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essentiel

Les personnes avec TSA interagiraient plus facilement avec un robot qu’avec un humain.

Les robots sont essentiellement évalués pour travailler les habiletés sociales.

Malgré les résultats encourageants, l’efficacité dans l’autisme est encore à démontrer.

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