La périménopause se définit par le début des irrégularités menstruelles associées ou non à des symptômes climatériques, survenant vers 47 ans et d’une durée d’environ quatre ans. Cette période de transition est marquée par une diminution de la durée de la pratique d’une activité physique ou sportive, une diminution de leur intensité et une augmentation du temps de sédentarité, temps passé devant un écran et/ou en position assise selon un rapport de l’Observatoire national de l’activité physique et de la sédentarité (Onaps) en 2023.1 Pourtant, les recommandations rappelées par les autorités de santé sont de maintenir une activité physique ou sportive en endurance d’intensité modérée durant cent-cinquante à trois-cents minutes par semaine, ou soixante-quinze à cent-cinquante minutes d’intensité vigoureuse, ou une combinaison des deux. Deux fois par semaine, cette pratique doit être associée à des exercices de renforcement musculaire d’intensité modérée ou plus soutenue, faisant travailler les grands groupes musculaires.2
Modifications et risques liés à la période de ménopause
Il est reconnu que l’activité physique et sportive (APS) peut améliorer la santé physique et psychosociale de chacune avec des bénéfices spécifiques à la ménopause.
Bénéfices de l’activité physique et sportive sur les bouffées vasomotrices
Elles impactent la qualité de vie de 25 % des femmes, du fait des troubles du sommeil plus fréquents à cette période qui sont alors majorés, et du fait de la fatigue, induisant une perturbation des activités quotidiennes et un impact sur la vie sociale.
Elles sont aussi un marqueur potentiel de risque cardiovasculaire.
Ces symptômes sont liés à des mécanismes complémentaires associant :
– un mécanisme central localisé dans le noyau arqué de l’hypothalamus, siège d’une hyperactivation du système neuro-endocrinien formé par les neurones KNDy à kisspeptine ou substance P, neurokinine B et dynorphine. Ce système est rendu hyperactif et hypertrophié par l’hypo-estrogénie de la ménopause qui, elle-même, s’accompagne d’une libération accrue de GnRH hypothalamique. Les neurones KNDy hyperactivés stimulent la zone de thermorégulation au niveau du noyau pré-optique hypothalamique, entraînant le déclenchement de bouffées vasomotrices ;
– une réduction du volume de la zone de neutralité thermique au niveau du noyau pré-optique ;
– des mécanismes périphériques liés à une hyperactivation sympathique avec un contrôle vagal parasympathique diminué. La pratique d’activité physique et sportive pourrait agir sur ces mécanismes périphériques ;
– une altération de la réactivité vasculaire périphérique observée chez les femmes symptomatiques, ces dernières présentant plus de facteurs de risque cardiovasculaire.
Ces mécanismes complexes expliquent la grande variabilité de l’expression des bouffées vasomotrices en intensité et en fréquence, accompagnées de vasodilatation au niveau de la face et du cou et de sueurs nocturnes.
L’effet de l’activité physique et sportive a été rapporté dans une récente méta-analyse avec des résultats contradictoires.4 Six études randomisées concluent à une tendance à la réduction en nombre des bouffées vasomotrices perçues lors d’une activité physique régulière d’intensité modérée (exercices en endurance et en résistance, à raison de trois séances par semaine d’une durée de soixante minutes pendant douze à seize semaines) ; trois autres études ne montrent pas de différence significative par rapport au groupe contrôle ; pour l’une, l’absence de supervision des activités physiques et le manque d’engagement des participantes sont évoqués.
Les auteurs concluent que :
– une activité physique modérée et régulière peut réduire la perception des bouffées vasomotrices rapportées par les femmes ménopausées ;
– une activité physique de courte durée peut réduire les bouffées vasomotrices rapportées et objectivées ;
– l’engagement dans une pratique régulière d’intensité modérée peut être un moyen utile pour réduire ces symptômes chez les femmes ménopausées souffrant de dépression.
Bénéfices sur les troubles du sommeil et les troubles de l’humeur
Chez la femme ménopausée, ces symptômes sont fréquents, qu’il s’agisse des troubles du sommeil (40 à 60 % d’entre elles), de syndrome dépressif (6 à 17 %) ou de dépression (2,2 à 5,7 %). L’activité physique et sportive devrait faire partie intégrante du parcours de soins.5
Les données de l’étude longitudinale SWAN ont révélé que les femmes âgées de 54 à 63 ans qui avaient les niveaux les plus élevés d’APS de loisirs régulière déclarent avoir une meilleure qualité de sommeil et moins de réveils nocturnes que celles qui pratiquent le moins. Les symptômes dépressifs sont moins présents chez celles qui pratiquent une activité physique régulière de type aérobie ; cette diminution des symptômes persiste dix ans après la ménopause.6 L’association d’activités en endurance (comme la marche) et en résistance (comme le renforcement musculaire) apporte le plus de bénéfices sur le syndrome dépressif, l’anxiété et les troubles du sommeil, par ses effets sérotoninergiques et adrénergiques.
Bénéfices sur la composition corporelle et le maintien de la stabilité pondérale
– seul le renforcement musculaire avec des charges élevées ou des entraînements combinés associant endurance (trente minutes au moins par session, trois fois par semaine, en charge [la marche] et/ou des activités physiques avec impacts [jogging, saut, montée des escaliers]) et renforcement musculaire à charge élevée (trois fois par semaine) ont montré leur efficacité pour freiner la perte de masse musculaire, voire pour l’augmenter (niveau de preuve NP1) ;
– une activité physique régulière de type endurance aérobie diminue la masse grasse viscérale de façon significative mais modérée, en l’absence de restriction alimentaire, quel que soit l’IMC (NP2).
Ces bénéfices ont été constatés pour une durée de pratique d’au moins douze semaines.
Bénéfices sur le syndrome métabolique et le risque cardiovasculaire
Les recommandations pour la pratique clinique7,8 confirment que, spécifiquement chez la femme ménopausée avec ou sans facteurs de risque cardiovasculaire, l’APS régulière diminue significativement le risque de survenue de maladies cardiovasculaires et la mortalité globale (NP1), avec un rôle protecteur sur le risque cardiovasculaire de toute activité physique, même de faible intensité (NP2), associée à une diminution de la sédentarité.
C’est ce que la cohorte américaine de la Nurse’ Health Study a montré lors du suivi durant huit ans en moyenne de 72 488 infirmières, âgées de 40 à 65 ans : la pratique de trois heures ou plus de marche par semaine était associée à une diminution du risque cardiovasculaire de 35 % par rapport aux femmes qui marchaient le moins. La diminution de risque était comparable pour celles qui avaient une pratique régulière d’exercices plus intenses, correspondant à la même dépense d’énergie.10 Toute activité physique est donc bénéfique, sous réserve de respecter les précautions d’usage (
Bénéfices sur la densité osseuse et le risque d’ostéopénie et d’ostéoporose
L’association la plus bénéfique pour la densité osseuse et la réduction du risque de fracture chez la femme ménopausée comporte :
– des activités d’endurance avec impacts, de préférence aléatoires, en charge d’intensité modérée (marche ou tai chi, par exemple) ou en charge d’intensité plus élevée (marche rapide, gymnastique suédoise, course à pied, danse), cumulant soixante-quinze minutes par semaine en intensité élevée et cent-cinquante minutes par semaine en activité modérée ;
– des exercices de renforcement musculaire contre résistance, deux fois par semaine.
La combinaison d’un apport calcique suffisant, d’un apport en vitamine D adapté et d’une activité physique ou sportive à fortes contraintes mécaniques permet d’optimiser la densité osseuse après la ménopause.14
Bénéfices sur les troubles cognitifs
Il existe de nombreux mécanismes par lesquels les œstrogènes jouent un rôle dans les fonctions cognitives : en régulant le métabolisme, en augmentant le flux sanguin cérébral et la croissance dendritique, en agissant sur les facteurs de croissance nerveuse par la colocalisation des récepteurs, par la synthèse et le renouvellement des neurotransmetteurs. Il existe un impact négatif de la carence estrogénique sur les facultés cognitives. Des études récentes de neuro-imagerie identifient des changements dans les schémas d’activité au sein des régions cérébrales, en corrélation avec les performances cognitives pendant la périménopause.
Le rôle de l’activité physique est précisé depuis quelques années. L’activité physique améliore la capacité de réaction, la mémoire, le raisonnement.
Une méta-analyse incluant 2 049 personnes de plus de 50 ans a montré qu’il existe une corrélation entre l’augmentation des capacités aérobies et l’augmentation des performances cognitives : l’entraînement en endurance est associé à des améliorations de l’attention et de la vitesse de traitement des fonctions exécutives et de la mémoire.16
Des modifications fonctionnelles et anatomiques cérébrales ont été rapportées à la suite de la pratique d’entraînement en endurance : amélioration significative du volume de l’hippocampe, amélioration de la plasticité neuronale, modifications morphologiques et physiologiques des synapses en réponse à des changements d’activité neuronale.
La méta-analyse de Northey et al. regroupant 34 études randomisées concernant des adultes de plus de 50 ans17 précise que la pratique d’exercices physiques améliore de manière significative les fonctions cognitives, quel que soit l’état cognitif de départ. Des bénéfices positifs pour les fonctions cognitives sont apparus avec des exercices comprenant du tai chi ou des exercices de résistance et d’endurance, prescrits isolément ou combinés, d’une durée minimale de quarante-cinq minutes et d’une intensité modérée à vigoureuse.
Combiner exercices en endurance et en résistance pour une efficacité maximale
Une approche personnalisée a pour objectif de réduire le temps de sédentarité et d’encourager une activité physique régulière chez les femmes ménopausées, informées des avantages potentiels de celle-ci sur le soulagement des plaintes fréquentes comme les troubles de l’humeur, du sommeil ou de la mémoire et les bouffées de chaleur ressenties.
Règles de bonnes pratiques de l’activité physique et sportive en prévention cardiovasculaire
L’interrogatoire précise les facteurs de risque cardiovasculaire :
– tabagisme ;
– antécédents familiaux et personnels d’hypertension artérielle, de troubles lipidiques ou glucidiques ;
– existence de symptômes liés à l’effort ou non (dyspnée, malaises, céphalées) ;
– prise éventuelle de médicaments et de traitement hormonal substitutif ;
– passé sportif, pratique actuelle et niveau de sédentarité.
L’examen clinique comprend l’auscultation cardiaque, la mesure de la pression artérielle, l’examen de l’état veineux. Un électrocardiogramme (ECG) de repos est justifié.
L’épreuve d’effort en milieu cardiologique peut être indiquée au-delà de 50 ans, si la patiente désire reprendre une activité physique intense (> 60 % VO2 max) ; elle permet le dépistage d’anomalies en faveur d’une coronaropathie plus souvent cliniquement atypique chez la femme ; une épreuve négative élimine une maladie coronaire significative, mais n’élimine pas formellement le risque.
La patiente est prévenue qu’elle doit consulter si des symptômes inhabituels apparaissent au cours ou au décours d’une séance d’entraînement.
Les règles de bonne pratique sont utilement rappelées, en particulier le respect des trois phases (échauffement, travail, récupération), le besoin d’une hydratation suffisante, la nécessité d’adapter l’intensité et la durée de l’effort aux conditions ambiantes, l’arrêt du tabagisme ou l’abstention de fumer dans les deux heures précédant ou suivant l’effort et l’abstention de pratique en cas de fièvre, infection ou fatigue anormale.
Les recommandations dépendent aussi du niveau de pratique. Ainsi, chez une femme sédentaire, il est conseillé de commencer par intégrer l’activité physique dans le quotidien (marche rapide liée aux déplacements pour aller au travail par exemple, montée des escaliers sur plus de trois étages ou équivalent) et diminuer le temps de sédentarité à moins de sept heures par jour. Des activités en aérobie trois fois par semaine de trente à soixante minutes par séance comme la marche, associées à des activités de musculation légère de vingt minutes une à deux fois par semaine peuvent être proposées. En prévention tertiaire, le bénéfice de l’activité physique régulière comme la marche après la survenue d’un infarctus du myocarde a été rapporté dans l’étude WHI (Women’s Health Initiative-Observational Study), avec une diminution de la mortalité globale et de la mortalité par cardiopathie ischémique ; à l’opposé, l’augmentation d’une heure par jour du temps de sédentarité au-delà de huit heures augmente le risque de mortalité globale et cardiovasculaire.11
2. Haute Autorité de santé. Consultation et prescription médicale d’activité physique à des fins de santé chez l’adulte. Juillet 2022. https://vu.fr/oTOZq
3. Avis NE, Crawford SL, Green R. Vasomotor symptoms across the menopause transition: Differences among women. Obstet Gynecol Clin North Am 2018;45(4):629-40.
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8. Duclos M. Effets de l’activité physique et de la diminution des comportements sédentaires chez la femme ménopausée. Recommandations pour la pratique clinique du CNGOF et du GEMVi. Gynecol Obstet Fertil Senol 2021;49(5):335-48.
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Dans cet article
- Modifications et risques liés à la période de ménopause
- Bénéfices de l’activité physique et sportive sur les bouffées vasomotrices
- Bénéfices sur les troubles du sommeil et les troubles de l’humeur
- Bénéfices sur la composition corporelle et le maintien de la stabilité pondérale
- Bénéfices sur le syndrome métabolique et le risque cardiovasculaire
- Bénéfices sur la densité osseuse et le risque d’ostéopénie et d’ostéoporose
- Bénéfices sur les troubles cognitifs
- Combiner exercices en endurance et en résistance pour une efficacité maximale