Objectif
Connaître les éléments cliniques et de diagnostic d’une myélodysplasie.
Les myélodysplasies, ou plutôt les syndromes myélodysplasiques (SMD), représentent un groupe hétérogène d’affections clonales de la cellule souche hématopoïétique. Leur incidence est globalement faible (de l’ordre de 5/100 000), et l’âge médian au diagnostic est de 70 ans. L’incidence augmente nettement avec l’âge et l’on peut donc prédire que le vieillissement de la population sera associé à une augmentation de la fréquence de cette maladie.
L’origine des syndromes myélodysplasiques est généralement inconnue. Il existe toutefois des syndromes myélodysplasiques secondaires (environ 10 à 15 % des cas) à des expositions toxiques, le plus souvent iatrogènes (chimio-radiothérapie), environnementales ou professionnelles (benzène, solvants, hydrocarbures, pesticides), à des maladies génétiques (neurofibromatose, anémie de Fanconi) ou à des hémopathies (aplasie médullaire idiopathique, hémoglobinurie paroxystique nocturne).

Mécanismes physiopathologiques

La caractéristique physiopathologique des syndromes myélodysplasiques est le trouble de maturation (ou différenciation) des précurseurs médullaires, qui est responsable d’une hématopoïèse inefficace avec insuffisance de production des éléments figurés du sang. Ceci explique les cytopénies observées dans le sang des patients alors que la moelle est riche (on parle ainsi de « cytopénies à moelle riche », ce qui les oppose par exemple aux aplasies médullaires, qui sont des cytopénies à moelle pauvre). La conséquence clinique est le syndrome d’insuffisance médullaire (anémie, neutro­pénie ou thrombopénie, isolées ou combinées, et ce à des degrés divers), responsable des principaux symptômes (syndrome anémique) ou complications (infections, hémorragies).
Le trouble de maturation explique également les anomalies morphologiques observées au niveau de la moelle regroupées sous le terme de dysplasie (celle-ci associe la dysgranulopoïèse pour la lignée granuleuse, la dysérythropoïèse pour la lignée rouge et la dysmégacaryocytopoïèse pour la lignée plaquettaire) qui est un critère diag­nostique lorsque celle-ci est présente dans plus de 10 % des lignées.
Par ailleurs, le clone anormal, bloqué dans sa maturation, peut acquérir d’autres anomalies biologiques responsables de sa prolifération. Ces cellules immatures sont appelées « blastes » et leur expansion se traduit morphologiquement par un excès de blastes, fréquemment (mais pas toujours) rencontré dans les syndromes myélodysplasiques. Le pourcentage de blastes médullaires est corrélé à la sévérité de la maladie. L’évolution naturelle se fait vers l’augmentation des blastes médullaires et peut aboutir à une leucémie aiguë myéloïde (LAM). Il existe donc un continuum entre syndromes myélodysplasiques et leucémie aiguë myéloïde illustré par la forme frontière dite leucémie aiguë myéloïde/syndrome myélodysplasique (LAM/SMD) isolée dans la classification de l’International Consensus Classification (ICC) 2022 utilisée actuellement (figure).
Pour résumer, on peut dire que les syndromes myélodysplasiques sont caractérisés par un trouble de la maturation médullaire, responsable d’une hématopoïèse inefficace et d’un risque de transformation en leucémie aiguë.
Le primum movens des syndromes myélodysplasiques réside dans l’acquisition de mutations somatiques dans le génome des cellules souches hématopoïétiques. Grâce à l’apport récent du séquençage à haut débit, plusieurs dizaines de gènes régulièrement mutés dans les syndromes myélodysplasiques ont été identifiés. Ces anomalies géniques sont présentes pour près de 90 % des patients, permettant d’affirmer leur caractère clonal. Plusieurs mutations coexistent en général chez le même patient. Elles concernent des gènes impliqués dans différents processus biologiques comme la transcription, la transduction du signal, la régulation épigénétique, l’épissage des ARN, etc. Ces anomalies géniques sont responsables des anomalies fonctionnelles du clone myélodysplasique et ont tendance à s’accumuler au fil de l’évolution : ainsi, l’apoptose domine dans les formes débutantes de syndromes myélodysplasiques (où les cytopénies sont marquées) alors que, dans les formes avancées, un excès de prolifération (qui se traduit par l’excès de blastes) est observé. Cette évolution rend compte de l’agressivité croissante de la maladie et de sa transformation éventuelle en leucémie aiguë myéloïde (figure).
Corollaire de ces anomalies géniques, on rencontre, dans environ 50 % des cas, des anomalies chromosomiques qui ont également tendance à s’accumuler au cours de l’évolution de la maladie. C’est un signe d’aggravation qui témoigne de l’instabilité génomique retrouvée dans les syndromes myélodysplasiques. En outre, les différentes anomalies cytogénétiques observées sont corrélées avec l’augmentation du risque de transformation en leucémie aiguë myéloïde et du risque de mortalité.

Diagnostic des syndromes myélodysplasiques

Circonstances de diagnostic

L’anémie est présente au diagnostic des syndromes myélodysplasiques dans près de 80 % des cas. C’est donc le plus souvent un syndrome anémique (pâleur, asthénie, dyspnée d’effort) ou la découverte fortuite d’une anémie sur un bilan biologique de routine (situation de plus en plus fréquente) qui attire l’attention. Il s’agit d’une anémie chronique et donc généralement bien tolérée. Chez des patients âgés, l’anémie se manifeste souvent par des signes de décompensation de pathologies cardiovasculaires préexistantes connues ou non (angor, claudication intermittente, arythmie…). Elle peut également être responsable de troubles cognitifs, de chutes ou de perte d’autonomie.
Plus rarement, le diagnostic est porté devant des complications :
  • de la neutropénie : infections bactériennes à répétition (principalement respiratoires et digestives) ;
  • de la thrombopénie : purpura thrombopénique, hématomes spontanés, bulles hémorragiques intrabuccales, gingivorragies, voire hémorragies plus sévères (digestives ou cérébrales).

Signes cliniques

Les cytopénies et leurs complications dominent le tableau clinique des syndromes myélodysplasiques. On observe également d’autres symptômes :
  • splénomégalie : peu fréquente et le plus souvent peu importante, elle se voit en particulier dans les anémies réfractaires sidéroblastiques et les formes frontières appelées syndromes myélodysplasiques/syndromes myéloprolifératifs ;
  • auto-immunité : des manifestations auto-immunes sont associées aux syndromes myélodysplasiques dans 10 à 20 % des cas. Il s’agit le plus souvent de vascularites cutanées, polyarthrite, lupus, syndrome de Sweet (dermatose neutrophilique), anémie hémolytique ou thrombopénie auto-immune, etc.

Démarche diagnostique

Devant une ou plusieurs cytopénies persistantes et après avoir éliminé les causes les plus fréquentes (normalité du bilan martial et vitaminique [B12, folates], du bilan thyroïdien, du bilan inflammatoire et arrêt des médicaments), un myélogramme s’impose. L’examen réalisé par ponction sternale ou iliaque postérieure sous anesthésie locale permet la réalisation d’analyses complémentaires, indispensables pour le diagnostic d’un syndrome myélodysplasique :
  • l’analyse cytologique (ou morphologique) évaluant la richesse (élevée dans les syndromes myélodysplasiques), la dysplasie (touchant une, deux ou les trois lignées) et quantifiant les blastes. C’est l’examen de référence pour le diagnostic des syndromes myélodysplasiques (positif dans plus de 80 % des cas) ;
  • l’analyse cytogénétique (ou caryotype) révélant des anomalies chromosomiques chez près de 50 % des patients. Il s’agit le plus souvent d’anomalies de nombre (trisomies, monosomies) ou de pertes de matériel (délétions). À la différence des leucémies, les translocations sont rares dans les syndromes myélodysplasiques. Parmi les anomalies les plus fréquentes, on retient la délétion 5q, la trisomie 8, la monosomie 7 et les anomalies complexes (par définition, trois ou plus de trois anomalies clonales). La plupart de ces anomalies ne sont pas spécifiques des syndromes myélodysplasiques (beaucoup sont également rencontrées dans les leucémies aiguës myéloïdes). L’analyse cytogénétique est principalement un examen à visée pronostique mais peut aussi aider au diagnostic lorsqu’une anomalie chromosomique typique des syndromes myélodysplasiques est observée (par exemple, la délétion 5q) ;
  • l’analyse moléculaire identifiant des mutations géniques fréquemment retrouvées dans les syndromes myélodysplasiques. Deux anomalies particulières sont isolées dans la classification ICC 2022 des syndromes myélodysplasiques en raison de leur impact sur le pronostic ou la thérapeutique. Il s’agit des anomalies des gènes TP53 et SF3B1. D’autres mutations géniques sont couramment recherchées en raison de leur rôle pronostique et la réponse aux thérapeutiques. Les mutations les plus fréquentes concernent les gènes TET2, ASXL1 et les gènes du splicéosome. Les classifications pronostiques intégrant les anomalies moléculaires sont de plus en plus utilisées.
Le diagnostic positif de syndrome myélodysplasique repose sur les critères suivants, actualisés dans la classification ICC 2022 :
  • une ou plusieurs cytopénies chroniques (typiquement datant de plus de 4 mois) qui ne sont pas expliquées par une prise médicamenteuse ou par une autre cause ;
ET
  • une dysplasie touchant plus de 10 % des cellules d’une ou plusieurs lignées myéloïdes ;
ET/OU
  • la présence d’une anomalie clonale détectée par cytogénétique ou biologie moléculaire ;
ET
  • la présence de moins de 10 % de blastes médullaires.
La présence d’une hyperleucocytose persistante supérieure à 13 G/L sans cause évidente, d’une monocytose, de même qu’une thrombocytose supérieure à 450 G/L (sauf cas particulier ; par exemple, la présence d’une anomalie chromosomique 5q-) excluent le diagnostic de syndrome myélodysplasique et imposent un diagnostic de forme frontière entre un syndrome myéloprolifératif et un syndrome myélodysplasique.
La biopsie ostéomédullaire n’est pas utile au diagnostic, sauf dans les rares formes de syndromes myélodysplasiques hypoplasiques dans lesquelles la moelle est pauvre et le myélogramme difficilement interprétable.

Classification des syndromes myélodysplasiques

La classification ICC 2022 est la référence actuelle utilisée par les cliniciens pour le diagnostic des syndromes myélodysplasiques. Les grands principes à retenir restent inchangés par rapport aux anciennes classifications (OMS 2008 et 2016).
La classification actuelle repose sur les critères suivants issus des précédentes classifications :
  • le nombre de lignées atteintes par la dysplasie (uni- vs multilignée) ;
  • le pourcentage de blastes dans le sang et/ou la moelle ;
  • la présence d’une délétion 5q.
À ces critères s’ajoute la mise en évidence d’anomalies moléculaires associées à des entités particulières :
  • les mutations du gène TP53 en raison de leur impact négatif sur le pronostic ;
  • une mutation du gène SF3B1 fréquemment associée à la présence de sidéroblastes en couronne.
Parmi les principales entités, trois sont superposables à celles issues de la précédente classification :
  • les cytopénies réfractaires avec dysplasie multilignée associant plusieurs cytopénies et à risque d’évolution en leucémie aiguë plus sévère que les cytopénies réfractaires avec dysplasie unilignée ;
  • l’anémie réfractaire avec excès de blastes caractérisée par un taux de blastes médullaires ≥ 5 % qui augmente au fil du temps, pour aboutir le plus souvent à une forme frontière SMD/LAM (≥ 10 % mais < 20 % de blastes) et à une leucémie aiguë myéloïde (> 20 % de blastes) ;
  • le syndrome myélodysplasique avec délétion 5q caractérisé par une anémie souvent associée à des plaquettes normales ou élevées. Ces formes répondent spécifiquement au traitement par lénalidomide et sont de pronostic favorable.
Deux nouvelles entités sont isolées dans la nouvelle classification ICC 2022 en raison de la présence d’anomalies moléculaires particulières :
  • les syndromes myélodysplasiques avec mutation SF3B1 correspondant à l’entité d’anémie réfractaire sidéroblastique retrouvée dans les anciennes classifications ;
  • les syndromes myélodysplasiques avec mutations TP53 et/ou caryotype complexe incluant une anomalie du bras long du chromosome 17 (sur lequel est situé le gène TP53).
À noter que, dans la nouvelle classification ICC 2022, la catégorie de SMD avec un excès de blastes de type 2 a été remplacée par la forme frontière SMD/LAM comportant entre 10 et 19 % de myéloblastes.
Le tableau présente les différentes catégories de l’ancienne (2016) et de la nouvelle (2022) classifications et les critères diagnostiques correspondants.

Évolution

L’évolution des syndromes myélodysplasiques est chronique, associée à une réduction de l’espérance de vie variable (survies médianes comprises entre moins de 1 an et 10 ans selon les sous-types de syndromes myélodysplasiques). Les deux principales modalités évolutives sont l’aggravation des cytopénies et le risque de transformation en leucémie aiguë myéloïde.

Aggravation des cytopénies

Elle est inéluctable et concerne toutes les catégories de syndromes myélodysplasiques. L’anémie, son retentissement et ses complications sont au premier plan :
  • altération de la qualité de vie liée à l’asthénie, la dyspnée d’effort, les troubles cognitifs (chez le sujet âgé) ;
  • aggravation d’une cardiopathie associée (coronaropathie) ;
  • complications des transfusions répétées (immunologiques, infections virales, hémochromatose post-transfusionnelle et ses complications cardiaques ou hépatiques).
La neutropénie, rarement symptomatique dans les formes débutantes, est associée à des complications infectieuses à répétition qui peuvent engager le pronostic vital (septicémie, choc septique, pneumopathies sévères). Il en va de même pour la thrombopénie responsable de décès par hémorragie (environ 10 % des causes de décès dans les syndromes myélodysplasiques).

Transformation en leucémie aiguë

Elle concerne environ 40 % des patients. Le risque est corrélé au pourcentage de blastes médullaires ainsi qu'au caryotype. Elle est définie par une blastose médullaire ≥ 10 % (nouvelle catégorie SMD/LAM remplaçant l’ancien SMD-EB2) ou une blastose médullaire ≥ 20 %. Elle est généralement associée, mais à des degrés divers, à une altération de l’état général (amaigrissement, fièvre prolongée) et à une aggravation des cytopénies. La survie médiane des syndromes myélodysplasiques acutisés est inférieure à six mois.

Complications et situations d’urgence

Au diagnostic

Le diagnostic de syndrome myélodysplasique n’est pas une situation d’urgence, et l’accent doit être porté sur la qualité et l’exhaustivité du bilan diagnostique (diagnos­tics différentiels , qualité des échantillons biologiques médullaires). Toutefois, des cytopénies profondes peuvent être associées à des complications aiguës (essentiellement infection et hémorragie) qui révèlent la maladie : l’urgence est alors liée à la complication elle-même mais aussi au diagnostic différentiel avec des urgences hématologiques (aplasie médullaire, leucémie aiguë). Dans ces cas, l’hospitalisation en urgence et la réalisation immédiate du myélogramme s’imposent.

Neutropénies fébriles et autres complications

Les infections bactériennes à bacilles à Gram négatif et à cocci à Gram positif sont les plus fréquentes et sont le plus souvent respiratoires ou digestives. Du fait de la neutro­pénie, elles nécessitent une prise en charge en urgence avec une antibiothérapie à large spectre (voir l’item Agranulo­cytose). Des infections fongiques sont également possibles.
Il n’existe pas de recommandations de prophylaxie antibiotique.
En dehors des épisodes fébriles, l’hospitalisation n’est pas indiquée.

Risque hémorragique et sa prévention

Dans les syndromes myélodysplasiques, du fait de la chronicité de la maladie, les transfusions prophy­lactiques de plaquettes ne sont pas recommandées. La transfusion est nécessaire en urgence chez les patients avec un taux de plaquettes < 20 G/L en cas de saignement muqueux (bulles intrabuccales, épistaxis, etc.) ou avant tout geste invasif si le taux de plaquettes est < 50 G/L (recommandation de l’Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé [AFSSAPS] 2003).

Anémie et tolérance cardiaque

Les transfusions de concentrés érythrocytaires sont recommandées en cas d’anémie < 80 g/L ou à un seuil plus élevé chez les patients cardiaques. Il s’agit en général de transfusions programmées effectuées en ambulatoire. Cependant, en cas de mauvaise tolérance cardiovasculaire (hypotension, palpitations, douleur angineuse, syncopes), elle peut être nécessaire en urgence.
Une surveillance biologique, à la recherche de signes de surcharge en fer (hypersidérémie avec augmentation du coefficient de saturation et de la ferritine), est nécessaire. Un traitement chélateur peut être proposé.

Prise en charge des syndromes myélodysplasiques

Stratification pronostique

Elle est un préalable indispensable à toute décision thérapeutique. Les facteurs à prendre en compte sont le nombre et la profondeur des cytopénies, le pourcentage de blastes médullaires et les anomalies cytogénétiques (elles-mêmes classées en anomalies de pronostic favorable, intermédiaire ou défavorable).
En pratique, on affecte des points à chacune de ces variables, on additionne les points et l’on obtient un score appelé International Prognostic Scoring System (IPSS). La valeur de ce score prédit la survie médiane et le risque de transformation en leucémie aiguë myéloïde. On peut ainsi classer les patients dans différents groupes de risque (faible, intermédiaire 1 et 2, élevé). En pratique, ces catégories sont regroupées et on distingue deux grands groupes : les syndromes myélodysplasiques de faible risque (correspondant aux catégories faible et intermédiaire 1) et les syndromes myélodysplasiques de haut risque (intermédiaire 2 et haut risque). Une version révisée du score IPSS (R-IPSS) ainsi qu’une version incluant les anomalies moléculaires (IPSS-M) ont ensuite été mises au point. La classification IPSS moléculaire inclut en plus les données issues du séquençage retrouvant des mutations associées à un risque variable de transformation en leucémie aiguë.
Pour les syndromes myélodysplasiques de bas risque, le risque de transformation est faible, l’évolution est chronique, avec des survies médianes comprises entre cinq et neuf ans. Il s’agit en général de cytopénies réfractaires avec dysplasie uni- ou multilignée sans anomalies cytogénétiques ou moléculaires de pronostic défavorable, ou de syndromes myélodysplasiques avec délétion 5q.
Pour les syndromes myélodysplasiques de haut risque, le risque de transformation est élevé à court ou moyen terme, et les survies médianes sont comprises entre huit et seize mois. Il s’agit le plus souvent d’anémies réfractaires avec excès de blastes, avec cytogénétique de pronostic défavorable ou avec une mutation TP53.

Options thérapeutiques

Syndromes myélodysplasiques de bas risque

L’objectif est ici de traiter les cytopénies (notamment l’anémie) pour améliorer la qualité de vie, sans essayer d’éradiquer la myélodysplasie. Lorsque les cytopénies ne sont pas symptomatiques (par exemple, une anémie modérée bien tolérée), les patients font l’objet d’une simple surveillance. Les agents simulant l’érythropoïèse (érythropoïétine recombinante ou ses analogues) sont efficaces et très utilisés ; certains disposent d’une autorisation de mise sur le marché. Le bénéfice des traitements par facteurs de croissance hématopoïétique (granulocytaire pour la neutropénie ou analogues de la thrombopoïétine pour la thrombopénie) n’est pas démontré. Le lénalidomide est indiqué chez les patients avec anémie réfractaire avec délétion 5q anémiques et dépendants des transfusions de globules rouges. Le luspatercept est indiqué en cas d’anémie réfractaire avec sidéroblastes en couronne (= SMD avec mutations du gène SF3B1). Lorsque ces traitements ne sont pas efficaces, les patients reçoivent des transfusions régulières.
 

Syndromes myélodysplasiques de haut risque

L’objectif est de prolonger la survie et, si possible, d’éradiquer le clone myélodysplasique. La greffe de cellules souches hématopoïétiques allogéniques est le seul traitement potentiellement curatif. Ses indications sont toutefois limitées par l’âge du patient (< 70 ans), les comorbidités et la nécessité de disposer d’un donneur compatible. Les agents déméthylants (5-azacitidine) constituent le traitement de référence pour les patients qui ne sont pas candidats à une greffe.
Le patient est informé de son diagnostic et des options de traitement lors d’une consultation d’annonce. La décision thérapeutique est validée en réunion de concertation pluridisciplinaire.

Planification du suivi et aspects sanitaires et sociaux

Quellehttp:// que soit l’option de traitement choisie, les patients doivent faire l’objet d’un suivi régulier (y compris pour les patients en abstention thérapeutique), clinique et biologique (hémogramme), coordonné entre le médecin généraliste et le spécialiste (voir les recommandations de la Haute Autorité de santé : https://www.has-sante.fr/jcms/c 662211/fr/ald-n-2-syndromes-myelodysplasiques ).
Le diagnostic de syndrome myélodysplasique ouvre droit à l’exonération du ticket modérateur (liste ALD30).
Une déclaration de maladie professionnelle peut aussi être proposée lorsqu’il existe une exposition professionnelle à l’un des toxiques listés plus haut.
Enfin, une déclaration de pharmacovigilance doit être réalisée si l’implication d’un médicament (cytotoxiques notamment) est suspectée. 
Points forts
Syndromes myélodysplasiques

POINTS FORTS À RETENIR

Les syndromes myélodysplasiques sont un groupe d’affections de la lignée myéloïde caractérisées par un trouble de la maturation (dysplasie), une hématopoïèse inefficace responsable de cytopénies et d’un risque de transformation en leucémie aiguë myéloïde.

L’anémie (normo- ou macrocytaire arégénérative) est le symptôme le plus fréquent.

L’évolution est chronique, marquée par l’aggravation des cytopénies et leurs complications.

Le diagnostic est porté sur un myélogramme qui montre une moelle riche, des signes de dysplasie d’une ou plusieurs lignées et fréquemment un excès de blastes.

Le caryotype (anormal dans la moitié des cas) doit compléter le bilan diagnostique.

Le bilan moléculaire permet d’identifier des mutations de gènes ayant un intérêt pronostique ou thérapeutique.

Le choix du traitement est fondé sur la stratification en syndrome myélodysplasique de bas ou de haut risque. Les options sont le traitement de l’anémie (érythropoïétine ou transfusions), les agents déméthylants ou la greffe de cellules souches hématopoïétiques pour les syndromes myélodysplasiques de haut risque.

Message auteur

Syndromes myélodysplasiques

La difficulté représentée par les myélodysplasies pour les étudiants tient à l’hétérogénéité de la maladie et à la complexité de leur classification. Il est donc important de bien comprendre leur physiopathologie, quitte à la simplifier : c’est un trouble de la maturation des précurseurs myéloïdes qui aboutit à une hématopoïèse inefficace et à un risque de transformation en leucémie aiguë myéloïde. De cette simple formulation, il découle les symptômes (cytopénies), les complications (anémie, infections, hémorragies) et le risque (leucémie aiguë myéloïde).

Les syndromes myélodysplasiques sont révélés par l’anémie : c’est donc sur ce symptôme et la démarche diagnostique à dérouler que l’on vous interrogera. Vous serez conduit au diagnostic devant une anémie centrale, normo- ou macrocytaire en l’absence de carence en B12 ou folates.

Les examens du diagnostic : retenir la ponction médullaire. Elle permet l’analyse cytologique (morphologique), cytogénétique (le caryotype) et moléculaire.

Les cytopénies et leurs complications : rien de spécifique aux syndromes myélodysplasiques et donc source potentielle de beaucoup de questions. Cela rejoint les aplasies médullaires, les complications des leucémies, de la chimiothérapie, les syndromes hémorragiques, les infections chez l’immunodéprimé ou les transfusions…

Il faut connaître aussi les grandes lignes et surtout les principes de la classification de l’OMS 2016 et de son actualisation dans la classification ICC 2022 (qui repose sur la mise en évidence de dysplasie d’une ou plusieurs lignées, d’un excès de blastes, d’anomalies du caryotype ou de la présence de mutations géniques).

Savoir que l’évaluation pronostique est fondamentale avant toute décision de traitement dans cette maladie. On ne vous demande pas de savoir calculer un score IPSS ; en revanche, il faut savoir qu’il repose sur les cytopénies, les blastes médullaires et le caryotype. Savoir également que l’on pourra ainsi distinguer deux groupes de syndromes myélodysplasiques : des syndromes myélodysplasiques de faible risque et des syndromes myélodysplasiques de haut risque pour lesquels les objectifs et les choix thérapeutiques sont différents.

La transformation en leucémie rejoint l’item « Leucémies aiguës ».

Les syndromes myélodysplasiques sont transversaux et peuvent faire l’objet de dossiers progressifs débutant avec le diagnostic d’une anémie, faisant explorer la moelle, se compliquant d’une neutropénie fébrile et évoluant vers une leucémie aiguë myéloïde.

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